dimanche 30 décembre 2018

Noël à Uchentein

Uchentein est un petit village d' Ariège, à 970 m d'altitude, en Couserans, soit au sud de St Girons. Uchentein m'a séduite d'emblée lorsque je l'ai rencontré voilà quelques années, par son nom qui chante, certes, mais aussi par sa morphologie et sa situation exceptionnelles.


Au zoom depuis le ciel de ma rando, le village d'Uchentein et mon camion sur son perchoir
 face aux montagnes
J'avais donc décidé au lendemain de mon Noël cévenol de 2016 de venir célébrer Noël ici. Projet ajourné en 2017 mais bien implanté sur la liste de mes envies.
Alors, en cet estival 24 décembre, nous voilà partis, l'inséparable trio, Nina, Mathurin et moi. Les deux chats sont sceptiques :
-Eux : Hier déjà on était partis, mais tu nous a fait le coup de la panne à 2 km de la maison, alors qu'est ce que tu nous fais aujourd'hui ?
-Moi : D'abord on va réparer la roue crevée chez le garagiste.
- Eux : Ah tu parles d'une aventure ! Nous voilà dans un endroit bizarre et en plus le garagiste, tout barbu, pire qu'un chat, nous fait grimper au plafond, nous et le camion! Oh la terreur !
- Moi : Et oui, c'est le pont.
- Eux : Le pont ? D'habitude, dessous il y a de l'eau...Ah ces bipèdes quand ils se mettent à plusieurs pour nous contrarier...

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3 heures de route, et on est à Foix, la capitale ariégeoise. Après la traversée de deux départements.
En passant par Quillan, où les chats ont vu ...






-Mathu : Tu as vu Nina ? C'est là qu'elle vient récolter ce truc affreux qu'elle a dans la salle de bains et qui lui sert quand on a un abcès!!
-Nina : Quoi ? ça ? Ah oui, tu as raison. Et bien elle a de quoi faire le stock là!! Grr...Et elle est partie récolter !
- Moi (de retour): mais non idiots, c'est pas du coton, c'est de la brume et ça ne se récolte pas.

Foix : un temps estival. Mathu ne quitte mes genoux que le temps des photos. Le voyage commence vraiment là; direction le Couserans qui resplendit de lumière et de verdure, la vallée du Lez, ses villages et hameaux aux noms se terminant par "ein" ou "ech" ce qui serait une lointaine transcription gasconne d'autres suffixes plus familiers à nos oreilles.





Uchentein, notre terminus, est perché à 970 m; le village a éparpillé des maisons, des granges, des prairies tout au long de la minuscule route et enfin nous nous posons au noyau central, en plein virage, juste devant l'église, le petit cimetière désuet, la mairie minuscule.





Arrivée à Uchentein : son église et son décor; on va se loger entre les deux,
 on a réservé le "5 étoiles"
Eglise St Etienne

Je loge mon camion, mes chats et moi, entre les croix, celles du calvaire, du cimetière, du portail de l'église, enfin que de croix! Je n'en crois pas mes yeux ! Si avec cela nous ne sommes pas protégés une nuit de Noël. Et pourtant "je ne crois pas". Ce que je vois par contre m'enchante. Et m'enchantera bien davantage la nuit venue.



Ce que je vois, depuis mon perchoir, c'est ce décor! Sur fond de roses trémières un peu fripées par le gel (il a neigé ici en novembre), cette chaîne de montagnes de plus de 2500 m de haut, qui aligne des pics mythiques : le Valier, 2838 m, le Barlonguère, 2802 m, le Pic d'Orle, 2813 m, le Mail de Bulard, 2750 m et le plus haut, le Mauberné, 2880 m. Aucune route ne traverse ces montagnes, des sentiers escarpés y mènent et, me suis-je laissé conter, de petits trésors y sont enfouis : granges, "orris" (cabanes) et mines de tungstène en des endroits très acrobatiques...A voir un jour !













Petite promenade sous haute surveillance!

Décor diurne

Décor nocturne
Une partie du repas; tout le monde
y a eu droit




Uchentein m'enchante de toute façon mais ce décor .....Que veut on de plus beau pour une nuit de Noël?
Une lune ronde et blonde entre les branches nues, un décor blanc glacé qui resplendit sous des millions d'étoiles, deux chats bien au chaud dans la lumière claire de notre "crèche" tout juste repeinte. Le camion / studio est blanc et lumineux .
Les chats ronronnent, le chauffage chantonne, la cloche a toujours le son (très) fêlé, nous avons un bon repas festif, le champagne au frais, et le grand silence dans ce sanctuaire.





Petite balade nocturne

On a des voisins! Le village compte à présent 4 habitants mais avec Noël une famille toulousaine a loué, ce seront nos proches voisins . Leurs deux chiens déplaisent à mes félins !
- Eux : Mais tu le fais exprès? Partout où on va il y a de ça! T'as vu le gros, là ??
- Moi : Celui qui emporte sa petite patronne ? 50 kg, le bougre.

Mais que vois-je ??

-Nina : Mais il n'y a pas que ça : oh...ça ne me dit rien qui vaille cet énorme chat à deux têtes, ils sont fêlés ici !!
-Mathu : sotte, tu ne vois pas que ce sont deux chats ?

Prêts au combat ?

Uchentein s'endort sous les étoiles dans le silence parfait d'une nuit non glacée. Du fond de la vallée monte le grondement sourd de la rivière.  Bien au chaud, la soirée sera calme et reposante. La nuit magique.
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C'est Noël !! 10 heures de sommeil plus tard, et sans champagne...Une aube pâle et froide, ourlée de rose, caresse les montagnes. Le Valier, au zoom est impressionnant
Géométrie du Valier


 C'est alors que je me prépare à partir en randonnée, laissant mon petit monde au soleil levant, que je rencontre Marc. Marc, un des 4 habitants qui a choisi un Noël solitaire à Uchentein et qui, tombé amoureux de ce village, y a acheté une grange qu'il rénove patiemment. Marc m'explique bien des choses, ainsi ma randonnée n'en sera que plus riche (prochain récit) et la petite église livrera ses secrets. J'ai dormi près d'une petite Tour de Pise ! Le clocher a pris 10 cm de gite et une réparation sophistiquée de la charpente, qui va commencer juste après les fêtes va tenter de redresser l'ensemble, avant que de s'habiller d'une toiture neuve.
Peu de neige pour le moment



Le clocher penché et ses étranges orifices
supports d'un ancien échafaudage?


Partie de la grosse cloche, je n'ai pas trouvé la date


 A mon retour de rando, toujours sous un temps estival, j'apprendrai à Marc une autre des particularités d'Uchentein : le 1er méridien  traverse le village !


A Noël original, dégustation originale :  nous partagerons avec Marc, le "champagne belge", le Ruffus, face au décor sublime de ces montagnes que la fin d'une belle journée illumine de soleil et de bulles mêlées. Mathurin aura droit à une larme de bulles sur ses babines, Nina détournera son minois, dégoûtée.
Petite histoire du Ruffus : 
En 2002 naquit sous le soleil belge un domaine viticole de 23 hectares, sur sol calcaire, planté de chardonnay, pinot noir et pinot meunier, né de l'association d'un viticulteur champenois, d'un négociant , d'un agriculteur et de deux entrepreneurs. Les vins, tous effervescents sont plusieurs fois médaillés (d'or)
Celui-ci est un chardonnay brut, la cuvée la plus vendue. Des verres spéciaux accompagnent ce vin car les bulles s'y expriment mieux depuis la base creuse du pied. Un ami me l'offrit et je le gardai pour une grande occasion. Noël à Uchentein le valait bien !

Zone de production du Ruffus, en Belgique







A la santé de St Etienne et longue vie à son
futur couvre chef !


















Cependant la journée n'est pas finie et je prends la route, en fin d'après midi, vers d'autres proches horizons, à la rencontre d'autres lieux dont aucun ne me séduira autant qu'Uchentein  et son Noël sous des millions d'étoiles s'ajoutant à celles qui brillent dans nos yeux....
Je regrette encore de n'y avoir pas passé une seconde nuit. Qu'en pensent Nina et Mathurin ?
Ils vous le raconteront dans un prochain billet. Je leur laisserai la parole .
Mais un Noël comme ça, on ne l'oubliera pas !

A Suivre, bientôt, sur l'un ou l'autre blog:
Le Noël de Nina et Mathurin (petit récit en images)
Ma randonnée au Pic d' Araing (randonnée)
Le marbre d'Uchentein et Balacet (balade patrimoniale)




dimanche 23 décembre 2018

Balade "calcaire" impromptue mais non interrompue

A l'heure où j'écris ces lignes je devrais me trouver haut perchée dans le froid et la nuit d'un petit village d'Ariège, exempt ou presque d'habitants. Mais à peine (et fort heureusement)  avais je pris la route,  la roue de mon camion eut la visite néfaste d'un gros boulon qui l'asphyxia par manque d'air. Comme je ne tenais pas à partir sans roue de secours car c'est dimanche (et c'est la 2nde fois en 1 mois jour pour jour), je changeai de cap, de voiture, remettant le départ à demain et je pris la route des Corbières pour une balade calcaire sans prétention. Une fois sur place, mon projet fut lui aussi ajourné (il y a des jours comme ça), car le chemin s'avérait impraticable et je partis donc à l'aventure. Une aventure comme une valse, en trois temps. Par des petites routes grossièrement asphaltées puis se muant en chemins de garrigues.
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D'abord, 1er temps de la valse,  j'arpentai la garrigue, sous un ciel de feu ! Quelle chaleur ! Mais le décor en valait la peine, proche comme lointain.


Le décor : en fond des crêtes que j'ai déjà parcourues



Un peu de varappe

Des vignes enchâssées dans la garrigue: beaucoup sont mortes

Justement le proche lointain me montrait une ligne de falaises, pas très hautes, au pied desquelles j'étais passée et qui m'attirait de plus en plus.

La ligne de falaises

Peu après (2 ème temps de ma valse) j'y étais, tout près de la Belle Auriole, une ferme du 17 ème siècle devenue camping, gîte etc.. Un beau bâtiment, au milieu d'un décor sauvage.
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Je me gare au pied de la barrière rocheuse afin de trouver un passage. Un vrai grimpeur n'accorderait ni un regard, ni trois lignes à cette barre rocheuse. Alors je sais que pour moi elle sera unique.
Je m'enfonce dans un fouillis végétal qui m'obligera plusieurs fois à rectifier ma trajectoire avant de parvenir aux éboulis puis à un petit couloir que je grimpe pour toucher le soleil.

Le petit couloir rocheux

Ne dirait-on pas une impressionnante arête ?
Chemin de roche : en fond, château d'Opoul







Parvenue en haut, très peu haut perché, je me trouve devant un paysage typique d'ici : en haut c'est quasi plat, semé de gros rochers et de maquis à perte de vue. J'ai le choix d'arpenter ce tapis de roche ou de suivre au plus près le fil de la crête, quelques dizaines de mètres de vide sur ma gauche.





Il ne lui manque que la déco : c'est Noël !

Peu importe la hauteur quand on n'a pas le vertige - quand on l'a c'est pareil, peu importe- je marche, je cours presque d'un roc à l'autre, je dévie pour descendre un peu, pour grimper un peu, juste pour le fun, car ce pourrait être une balade de retraitée (que je suis !).
Mais il suffit d'un certain regard...et tout est changé.


La Belle Auriole vue des crêtes





Tout en bas, des ruches
Ce qui fait la beauté de ce parcours modeste, c'est la qualité de la roche, son décor, sa rugosité et sa couleur; c'est le proche paysage dans lequel elle s'inscrit, c'est ce jardin d'hiver que je découvre au fil de mes pas dansants et c'est cet écrin de lointains bleus, les montagnes.

Jardin d'hiver




Jardin d'automne : le buis


Canigou

Albères

Cerdagne ?

Capcir ?

Roc de Frausa : Vallespir

 C'est aussi ce Château d' Opoul, fièrement campé sur son piton rocheux entaillé de falaises et percé de grottes.


Au bout de la crête, le château d' Opoul, 13 eme S

Au zoom
Bref, c'est magnifique dans cette extrême simplicité, une barre rocheuse qui est, j'en suis sûre, boudée du commun des mortels. Ainsi la voici vue d'en haut et d'en bas : modeste assurément !






Constellée de fossiles étrangement regroupés par sites.

Fossiles


Pour sourire....


Un chien en pierre veille sur le décor


Vu d'en bas


Une petite ferme

Je la suis jusqu'à son extrémité, quelques mètres me séparent de la route mais non, je ferai le chemin à l'envers, car un beau décor se doit d'être découvert dans les deux sens, avec cette lumière dorée de l'hiver, alors que je transpire sous la chaleur.


Tronc de genévrier, lichens

Je m'offrirai dans ce poudroiement de lumière un page d'écriture avant que de redescendre dans la paroi, en une désescalade de débutant.

Au chaud, au soleil, j'écris, puis je fuis, dévorée de moustiques !

Tour naturelle






Mais ma valse a un 3 eme temps, je ne le sais pas encore à cet instant. Un intermède musical me conduit à cet étrange chicot rocheux un peu troglodyte, alors que d'abruptes parois en défendent son toit. Une petite grotte qui fut aménagée mais tomba en ruine n'ouvre plus que son échancrure sur le château d'Opoul son illustre et si vieux voisin.



L'entrée de la grotte troglodyte

Dans la grotte : face au château d'Opoul














































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Le 3 eme temps de ma valse au grand soleil estival sera un petit morceau sportif : une autre barre rocheuse m'ouvre ses bras ; il faut juste choisir celui qui sera carrossable car elle est peu commode la barre. Toutefois elle m'invite à une séance d'escalade facile mais prudente ; de belles prises, bien corrosives et acérées rendent le parcours ludique; j'y engage quelques forces, de la prudence et un grand bonheur : il faut que je m'entraîne!

Escalade facile, ou moins facile, varappe, il y en a pour tous les goûts
Le tout est de savoir ce qu'on peut oser

J'ose ! Mais c'est "dans mes cordes" sans besoin de corde
Un calcaire très corrosif


Moi qui ai toujours peur de trouver un cadavre
dans mes endroits paumés , et bien je l'ai, au bout de mes doigts :
un piaf !!
Voilà un après midi bien rempli, bien festif et bien loin des froideurs ariégeoises! J'aurai donc gagné un jour d'été supplémentaire....
                                                                                                           A Bientôt pour un Noël original