vendredi 2 septembre 2022

Saint Georges (Axat 11) sur terre comme au ciel

 Nous voilà tous les trois, Claude, Josy et moi, en train de fureter éperdument dans la courbe élégante d'une piste forestière. On va, on vient, on tourne et retourne; le bout de papier où j'ai recopié un topo et un schéma  est aussi muet que le décor; il existe ce départ de sentier, et difficile à trouver. On essaie tous les départs, on grimpe fort, ça glisse, on peine, on sue sous ce fouillis d'arbres, on roule sur des cailloux : rien. C'est un vrai coupe gorge, ironie, on est dans des gorges mais sans intention de les couper, juste grimper au belvédère qui les surplombe et dont la rambarde rouillée nous nargue. Si près, si loin.

J'enrage : moi qui trouve des chemins disparus de puis 200 ans me voilà incapable de dénicher ce sentier bien actuel. En désespoir de cause, pensant qu'un temps de latence fera du bien, nous partons sur la piste en suivant les traces effacées de l'ancienne voie qui contournait la gorge avant que n'existe la route qui la traverse.

Mais où sommes nous donc ? 


Les gorges St Georges et l'arête


Dans l'Aude, tout près d' Axat, à l'entrée des gorges St Georges qui sur 400 m balafrent d'une haute et étroite saignée les murailles des falaises calcaires. Une route qui existe depuis plus de 150 ans s'est faufilée dans ce défilé, mi creusée dans la muraille, mi en surplomb du fleuve. Une bande étroite de 30 m abrite la route et le fleuve, ainsi que rafts et canoës; y circuler en voiture est aisé  car la circulation est alternée, y circuler à pied est aisé pour les mêmes raisons. Avant la route, on contournait les falaises hautes de plus de 100m, je ne comprends d'ailleurs pas pourquoi le nouveau tracé emprunta la gorge.

Il paraît qu'ici aussi des réserves de dynamite étaient cachées afin de "faire sauter" le défilé en cas d'attaque.

L'arête surmontée du belvédère


La route des gorges



Années 50, la petite fille fascinée, c'est moi





Fort étroit passage

En surplomb

la route est construite avec les débris
de la falaise  creusée

Partie excavée par l'homme
Y avait il des stocks de dynamite?

La route début 20 eme (Site
Eric Teulière)

Le débardage du bois : n'est pas tiré mais poussé (Site Eric Teulière)

A l'entrée des gorges, côté Axat, se trouve une résurgence canalisée en deux fontaines, de l'autre côté, une centrale électrique (eau captée à Gesse),  une imposante falaise qui m'a faite rêver durant des années; j'eusse aimée la grimper comme un chat . J'ai appris il y a peu de jours qu'un sentier arrive au sommet coiffé d'un belvédère. Oui mais justement, ce sentier...


Là où nous allons (tout en haut)

On peut comparer avec il y a un siècle : l'invasion de la végétation

Autrefois : l'usine électrique et notre belvédère vierge de végétation (site Eric Teulière)



Le départ de l'ancienne voie de contournement

Le décor ambiant

Les flancs pentus de la montagne

Revenus de la balade en forêt, je trouve instantanément le sentier dont l'accès est caché par un tronc d'arbre effondré. Comme si ce sentier s'était créé pendant notre absence.

Le sentier grimpe fort


Le suivre est un jeu  d'enfant, même les poils blancs et les yeux de jais de Roxane pétillent !

En un rien de temps nous arrivons en haut, rencontrons quelques pierres blanches et je crie  : "Ohhh!"

Du fouillis végétal qui habille la crête et masque le vide autant que le paysage, émergent deux ruines de murs, sur une petite esplanade plutôt circulaire, les ruines du monastère Saint Georges, cité déjà en l'an 906, qui ressemble davantage à une tour de guet mais peut être cette fonction s'y juxtaposa t'elle ?

Ruines du monastère de St Georges (env 600m)


Nous nous attardons dans ce site surprenant. Un monastère ! Minuscule. Mais d'où sortait donc l'eau à moins de la faire monter avec un seau et une corde de plus de 100 m depuis l'Aude en contrebas.











Ligne de crêtes


Du monastère commence l'arête, après avoir franchi une symbolique porte, naturelle ou pas. Je commence à me jucher suivie par Claude et Josy, et j'aboutis sur une plate forme exigüe ouvrant sur le vide vertigineux , un tronçon de route et de fleuve. 

La porte

La crête est revêtue de buissons

Vue vertigineuse et grandiose en direction des gorges




On émerge de l'enfer vert

Qui nous imaginerait en haut ? Roxane est vite nantie de sa laisse courte, sous bonne garde. Ensuite j'escalade un premier belvédère, le point culminant, où des ruines métalliques laissent à penser à une ancienne antenne. Mes amis ne veulent pas me suivre. De là, je vois le décor fantastique de murailles tous azimuts, hormis la trouée où s'étale Axat. Des dentelles de roches pâles et grises, habillées d'arbres aussi anciens que rabougris. De la route la vue est chiche : deux murailles imposantes. D'en haut, le décor est somptueux.




Vu d'en haut : un morceau de rivière et de route


Vertige ? non mais je me tiens à un buisson

Même lieu vu d'en bas...

Le site où nous sommes perchés vu d'en bas

Pour gagner le belvédère, il suffirait de suivre l'arête qui semble malaisée ou emprunter un sentier cairné à sa base, glissant mais confortable. Ce que nous faisons. Quelques pas faciles d'escalade et nous pouvons jouer, sur cette étrave fendant le vide, les Léonardo di Caprio et Kate Winslet, sans risquer de sombrer en un historique naufrage.

Au bout du belvédère



Prudent ! Et échevelée


Franchement , c'est beau, le paysage est étendu vers l'aval avec la ville d'Axat et le pont SNCF, le viaduc de Canals ( 1900).


Pendant que mes amis savourent le décor, je me faufile sur l'arête délaissée mais je n'irai pas loin: un solide gendarme barre mon chemin, le contourner est risqué donc je reviens sur mes pas et nous prenons le chemin du retour.

 


J'y vais !
Au milieu et au loin une conduite forcée
Centrale de Nantilla



J'y suis
Je ne passe pas
Je reviens
Au zoom

Eux sont au bout presque au belvédère






Etonnant faux sentier


Je ferai une petite escapade en solitaire pour aller visiter les pieds creux de ce gendarme : grottes miniatures et cavités témoignent d'un ancien passage d'eaux qui ont sculpté le tendre calcaire. Surprenant  relief tourmenté au plus près du ciel.


Les chaussures trouées du gendarme


Dans la "grotte"

Depuis la grotte, on peut voir le paysage qui tourne le dos au défilé : la forêt vierge


Dans la jungle

Elle a envie de rejoindre la grotte

Revenir à la piste puis aux véhicules n'est plus qu'une formalité. Décidément ce "voyage" insolite nous a enthousiasmés. Mais demain nous attend un autre voyage aérien, cette fois je connais et prendrai plaisir à être un peu guide, un peu conteuse.

Et ces arbres grimpeurs !




Un dernier regard d'en bas


Le trajet 





5 commentaires:

  1. Merci pour ces frissons, un parcours magnifique qui débouche sur un superbe belvédère, nous avons cherché le départ du sentier, notre persévérance a payé. La découverte du monastère a été un plus. Une rando insolite comme tu sais les choisir. Ton récit est plaisant comme toujours, tu es une vraie conteuse. Bises, Josy, Claude, Roxanne

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    1. je peux juste te dire "au suivant" ! Si vous le voulez bien. bises

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  2. C'est à la fois sauvage, minéral et.... vertigineux ! Perso, je me sentirais mieux sur les rives de l'Aude, bien qu'elle soit assez impétueuse en ces lieux ! L'eau.... la vie !! :) P.D.S.

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    1. Et bien on pourrait s'y envoyer un petit bonjour à distance . Une en haut, l'autre en bas mais vu l'à pic vertigineux, on ne s'entendrait même pas. Même si l'Aude acceptait de se taire un instant. AM

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