Chaque année, au mois de juin, nous quittons nos pupitres pour faire une sortie d'une journée et, traditionnellement, c'est moi qui anime cette journée: c'est devenu un rite, je ne peux y déroger.
Un rite auquel se joignent des randonneurs du Boulou.
Mon village vu du sol |
Et vu du ciel |
Vue d'ensemble : les ravins la végétation et les vignes arrachées |
J'avais choisi de faire cette visite de façon non académique : pas de cours professoral, je ne suis pas botaniste même si c'est un de mes nombreux centres d'intérêt. Simplement présenter les végétaux comme les habitants fantastiques et un brin fantasques de la garrigue, avec leur personnalité, leurs vertus et leurs vices, dans un paysage fortement marqué par le cours de la vie et en voie perpétuelle de mutation.
Eglantier ou cynorrhodon Le "gratte cul"= excellente gelée Très énergétique en vit C |
C'est ainsi que, sur un parcours de 900 m, nous sommes passés du Moyen Age au XXI eme siècle, nous avons vu se creuser des ravins, dévaler des orages, se modifier le paysage à la faveur des cultures et de leur oubli et assister, enfin, à une nouvelle mutation, celle des vignes arrachées voilà 10 ans et reconquises de façon spectaculaire par la nature. Essayer de donner vie à des lieux si familiers qu'on ne les voit plus.
Un ancien coupe feu très érodé |
Donc, partons ! Dans un paysage inchangé depuis la nuit des temps car une grande partie n'a pas été bouleversée par l'homme sinon lors d'un épisode de la Bataille du Boulou, mais partons dans un paysage où la végétation a bien évolué.
La forêt non défrichée |
La forêt défrichée |
Je ne vous conterai pas en détail la balade ce serait trop long. Et puis il faut la vivre, sentir ses parfums, toucher ses végétaux et ses couleurs, écouter les insectes et chanter le vent s'il fait partie du voyage. Ce ne fut pas le cas et il ne joua pas les perturbateurs. L'été éclatait ce jour là de toute sa chaleur.
Les épaisses forêts du Moyen Age cédèrent peu à peu le pas à la trilogie méditerranéenne, blé, huile et vin. Vers la fin du 19 eme siècle, la vigne s'implanta fortement, aidée en cela par l'avènement du chemin de fer (1853) qui aida le département des Pyrénées Orientales à se désenclaver en ouvrant la porte de l'exportation, les grands axes de communication étant jusqu'alors sur une ligne Toulouse / Narbonne / Montpellier. Cette ouverture permit la monoculture de la vigne qui vit son apogée en 1914, puis au gré de fluctuations économiques, revit une nouvelle apogée au début des années 2000.
La garrigue avait alors son territoire réduit au minima : quelques terres vraiment arides et un lacis de ravines impressionnant où ne coulent des torrents qu'en cas de pluies diluviennes. En 2006, une forte crise économique qui perdurait, laissant les viticulteurs exsangues, doublée d'une politique d'arrachage financée firent que 70% du vignoble disparut. Alors la garrigue, peu à peu reprend ses droits...vers la forêt du Moyen Age ?
Sans remonter si loin dans le temps (18 eme et 19 eme S) , la garrigue était exploitée : des troupeaux de moutons, chèvres et porcs paissaient et laissaient un sol propre, dégagé d'arbustes et herbes invasifs. Plus tard, avec l'arrêt des pâtures, la nature reprit ses droits et les paysans exploitèrent autrement la broussaille : récolte d'ajoncs et bruyères vendus aux boulangers pour l'allumage des fours. Aujourd'hui la garrigue est devenue inutile, elle recouvre tout le sol d'un épais manteau de broussaille aride, épineuse, agressive pour lutter contre la sécheresse et l'évaporation.
Pourtant elle sait être un enchantement, juste deux mois par an, en mai et juin.
C'est dans ce singulier domaine que je conduis mes promeneurs et mes lecteurs.
Cette forêt naissante s'étoffe rapidement de bruyères arborescentes, cistes, ajoncs, toutes sortes de genêts, et calicotomes épineux, chênes kermes, filaires et autres résidents agressifs ou non.
Des ronces tapissent le sol, ainsi que des chardons, des graminées, et l'inévitable pelouse de brachypode rameux. Des graminées étendent leurs tiges grêles et ondulantes sur ce tableau.
La bruyère arborescente omniprésente, précieuse pour les soucis urinaires |
Quant aux autres végétaux, soit la chaleur exaspère leurs effluves, soit un froissement de doigts les révèle.
Tout ce beau monde aux vices et vertus apparents (odeurs, épines) est doté de vices et vertus cachés, leurs propriétés médicinales ou autres. C'est ainsi que je me plais à dire qu'une sélection rigoureuse de quelques uns devrait avoir le pouvoir de nous éviter médecine et pharmacie à perpétuité et nous garantir , au passage, de douceurs (en gelées) voire de bricolage !
Mais aussi de nous expédier dans l'au delà sans ambages...
Ainsi le "Nerprun", qu'on ne remarque pas tant il est discret, est le véritable "homme à tout faire" dans cette garrigue.
Et peut vivre 100 ans ! Alors, avoir un Nerprun chez soi...
Le monde des sous bois |
Le monde des colonisateurs grimpants |
salsepareille & panicaut |
Il n'en est pas un qui...sauf le "brachipode rameux" qui ne soigne rien mais qui est nommé "Herbe à moutons" et, adapté aux sols arides, assurera toujours la chaîne alimentaire.
Le chêne kermès, rabougri et agressif |
Dorycnie hirsute |
Et aussi la "Dorycnie hirsute", dernière survivante en cas de désertification qui remplacera la luzerne...on ne mourra pas de faim !
Notre avenir est assuré.
Il l'est même par le "genêt à balais" qui a un étonnant pouvoir : guérir des morsures de vipère et de cobra; la recherche scientifique le prouve. Ouf !!
Genêt à balai |
Mais ...la garrigue n'a pas que des végétaux à bienfaits.
Quelques euphorbes toxiques peuvent vous jeter leurs maléfices ...enfin à condition d'aller les chercher.
Et enfin...ENFIN....elle a un petit nom charmant
Daphné...
Ne vous y fiez point : c'est une tueuse.
Tout en elle est toxique, jusqu'au parfum de ses fleurs.
Tout en elle est redoutable . elle est la Bruixa de la garrigue (=sorcière)
Je ne vous dresserai pas la liste de ses maléfices, cela vous ferait froid dans le dos...et pire encore
Regardez la bien...mais n'y touchez point...
DaphnéGnidium |
Allons , il y a tant de belles choses à voir, dans la garrigue....
Chèvrefeuille |
Je n'entraînerai pas "mes promeneurs enchantés"dans un de ces chemins creux qui sont aujourd'hui ceux des chasseurs ou des amateurs de trial mais qui furent chemins de vignes. Je les conduirai juste sous les ombrages...ils l'ont bien mérité.
Ombrages du sentier Historique |
Bernard et Marie |
une belle leçon de sciences naturelles comme on disait à mon époque. Encore bravo !
RépondreSupprimerJuste une évocation un peu plus complète sur le terrain. merci
SupprimerBonjour Lison, les garrigues me rappellent encore de bons souvenirs quand je parcourais celles proches de Montpellier (le petit Montpellier de 50.000 hbts) avec un ami collectionneur d'insectes, en particulier coléoptères. Personnellement, c'était plutôt quelques sauterelles pour ensuite les lâcher discrètement en classe... Merci pour ces photos et ce texte, demain je vais noter quelques noms de plantes. J'espère qu'il n'y a pas de cobra dans votre "maquis" !
RépondreSupprimerOh le polisson !!Pauvres sauterelles bien sûr...et pauvres profs...il n'y a pas de cobras jusqu'au jour où un polisson (tiens ça me rappelle quelqu'un ...) oui un polisson en lâchera une armée...alors nous serons armés pour le combat contre le cobra
SupprimerChez nous il y a aussi le thon le romarin et la sarriette mais j'ai retrouvé pas mal de plantes de chez nous aussi ...je vais aller de ce pas dans ma montagnette découvrir ces plantes que tu nous a si bien décrites. Quant au nettoyage de la garrigue elle se fait toujours par les troupeaux de moutons et de chèvres au printemps. .il faudra que je mette des photos de ces troupeaux très beaux à voir bises et merci encore pour ce récit passionnant...dommage que j'habite si loin je serai bien aller à votre club d'écriture. ..j'adore. .bises
RépondreSupprimerje vais donner le lien du club d'écriture en additif sur mon blog. Je n'ai pas cité toutes les plantes, ni même présenté à mes promeneurs nous y serions encore ! Oui tu nous mettras ces photos sur ton site, ce sera joli: bisous
SupprimerLire le thym. ...hihihi !!! Erreur de frappe trop vite
RépondreSupprimerce n'est qu'un lapsus pas anodin ! Il y en a dans la garrigue des "thons", ceux sont ceux qui la saccagent
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RépondreSupprimerTu en connais des choses, Amédine, mais cela ne m'étonne pas, tu es une amoureuse de la nature, et quand on aime, on ne compte pas ! :-)
RépondreSupprimerMerci pour ce joli compte rendu de balade. Bisous.
Très joli commentaire, j'apprécie le style. Bisous
SupprimerCoucou ... Quelle belle balade ... on a apprend des choses intéressantes avec toi ... Merci !!!
RépondreSupprimerBelle semaine, bisous, sans oublier les câlins à tes Félins ;)
merci pour moi merci pour eux. Autrefois j'emmenais , le soir, mes 7 félins se promener dans la campagne. Un moment merveilleux ! A présent les maisons ont remplacé leurs terrains de jeux. Bises
SupprimerVous avez Bien Raison " Les Filles " ( J ai vu quelques Gars quand même pour Le Casse-Croûte ) d en profiter de Notre Belle Garrigue de Notre Beau Maquis car aujourd'hui ici Les Îlots de Nature se font rares :) Encore une Belle Balade Amédine toujours autant d Énergie " Per Molts Anys " :)
RépondreSupprimerCalinous aux Minous Bisous à Vous Amédine :)
RépondreSupprimerEt bien Claudie, si le coeur voue en dit vous pouvez vous joindre à notre groupe. Si ce n'est pas trop loin...au cas où, nous avons un petit aérodrome pas loin et depuis peu, une piste pour boeing au village ...lol...Bisous malicieux
SupprimerQuel beau reportage, une fois de plus. Bravo
RépondreSupprimerAmédine. Je t'embrasse. ELZA
Moi aussi Elza; je vais t'écrire par lettre. J'ai eu tellement de travail...je t'embrasse
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RépondreSupprimerje vais voir le relire c'est tellement beau et vrai merci Amedine
RépondreSupprimerEt oui c'est bien de chez nous c'est aussi notre âme
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