mardi 21 janvier 2020

Il neigeait à Thorrent (66)




Promenade le long du canal
7 h du matin, je me réveille dans la nuit d'encre, j'ouvre la porte et il ne pleut pas à Thorrent. Il neige !
Il neige doucement à Thorrent, petite commune à 876 m d'altitude, déjà mentionnée au 10 eme siècle, créée en 1790 et rattachée en 1822 à Sahorre, dans la vallée de la Rotja, un étage plus bas.
Un bel étage de 200 m de haut, quand même !


J'ai pris de nuit la petite route qui monte sur Escaro et bifurque sur un terminus, Thorrent. Il fait froid dans la nuit sombre , mais une grosse étoile brille dans le ciel. Je campe à l'entrée du village pour m'évader des murs resserrés, après un petit tour nocturne.  Et éviter les rideaux suspicieux qui s'écartent au dessus de mon toit. Qui est donc cette intruse ?
Thorrent, balcon sur Canigou
Soirée sous la lampe devant le chauffage, j'étudie la carte et je modifie ma rando de demain.
C'est décidé j'irai à Py et ferai le chemin à l'envers, ainsi le demi tour me cueillera avant la fin du parcours et m'évitera les longs 19 km AR, je choisirai le tronçon le plus aérien.
Je dors...et vite ! Un long braiment troue la nuit, c'est mon voisin de palier, me souhaite t'il la bienvenue ? Ou la bonne nuit !
 Et à 7 h, il neige à Thorrent, ou Torèn.
La rando n'aura pas lieu : aller sur un sentier aérien et rocheux, couvert d'une fine pellicule plus glissante que si elle fut épaisse, dans un décor invisible, n'a aucun intérêt, pour moi et mes articulations, car cette rando vaut par son décor.
Mais je ne me tiendrai pas tranquille pour autant ! La lève-tôt, saluée par "son" voisin d'âne, démarre à un peu plus de 8 h dans un matin bleu nuit et froid, la neige a cessé, une pellicule éphémère recouvre le sol et je pars.

Aube bleue et glacée

Objectif le château. La montée est férocement raide, des sacs de sel jalonnent le parcours, la ruelle est bitumée jusqu'à la dernière maison ouvrant sa terrasse sur le Canigou. Personne dans les parages.

Terrasse sur Canigou
On peut comprendre...La route continue par un chemin creux, bordé de murs de roches ferriques, la couleur est annoncée, c'est le pays des mines de fer. L'histoire du fer du Canigou a un très long passé (antérieur à l'an zéro) mais hélas plus aucun présent si ce n'est un musée à Escaro, proche de Thorrent et des vestiges éparpillés dans la nature qui a repris ses droits.Ainsi je verrai quelques wagonnets à l'abandon...


Je suis partie sans sac, sans anorak mais finalement je marche. Et je vais largement dépasser le château mon but initial.
Le château fut d'abord , en l'an 901, une crypte construite par 3 moines, comportant deux pièces dont une salle de prière taillée à même le sol à laquelle s'ajouta rapidement une tour de guet. Je ne conterai pas l'histoire du château, car château il devint, mentionné dès le 14 eme siècle, et se dota d'une tour carrée construite sur un roc de minerai de fer.


Les murs de soutènement


L'ancienne tour à signaux

La tour carrée

De remaniements en restaurations, il est actuellement propriété privée aussi, après avoir franchi un sommaire portillon,  je ne sais pas si j'ai ou non le droit d'être là et je file rapidement. Des restaurations sont en cours mais des recherches historiques et architecturales  s'attachent à la voûte de la crypte qui serait une des premières représentations de l'art roman en Roussillon.
Le château serait aussi relié à la petite église de Thorrent (12 eme S) par un souterrain.

Chapelle Ste Croix, ancienne chapelle castrale, 12 eme S


Je reprends le sentier dans un matin pâle et le quitte pour suivre un petit canal comme le Conflent sait si bien en posséder, petits canaux en courbe de niveau permettant l'irrigation des parcelles en contrebas. Si la forêt a gagné du terrain, les photos aériennes de 1960 montrent l'importance alors  des cultures. Et des prairies.


Le sentier et le canal


Image années 1960, les cultures
En jaune mon parcours 

Image actuelle, ce n'est plus que de la forêt

 Quelques ouvertures montrent des pans de montagne enneigés, un ciel bouché, un temps peu propice aux balades. Le Canigou reste résolument enturbanné ! Invisible.
Dans la forêt c'est la chanson du silence après la neige.


Un peuplier phénoménal, 1.20 m de diamètre

Forêt vers le ciel

Dernières larmes du peuplier

Le canal est vide et je ne parviens pas à savoir dans quel sens il coule tant la pente est infime. Mais je poursuis. Le silence de la forêt est troué par un pivert qui s'acharne sur un tronc et par une vache qui meugle désespérément au loin, sans jamais s'arrêter, relayée plus tard par un autre bovin plus convaincant. Tout est bordé de clôtures, bardé de barrières, il faut parfois se contorsionner pour poursuivre, ça réchauffe!

Le sentier du canal, il ne mène à rien ou presque

J'arrive ainsi au terminus du canal, à présent je sais qu'il coule dans le sens inverse de ce que je croyais.


Tristesse hivernale, côté Canigou



Le canal peu après son départ, à Py
Certes pas facile de le suivre !!

Mais la grande surprise du jour, ce sera devant mon ordinateur que je la ferai : ce canal n'est autre que celui que j'ai envie de suivre depuis longtemps et qui prend son départ à Py, dont j'ai parcouru un jour le départ, que je suis parfois du regard dans la montagne de roches, un canal en courbe de niveau de 8 km de long, alimentant au passage une petite centrale électrique : ah il attise bien ma curiosité celui ci !






Donc arrivée au bout de mon petit canal qui arrose une prairie en de nombreuses prises, juste au dessus du col de Fins, le demi tour s'impose, je suis prise au piège de clôtures électrifiées et je n'ai pas envie de m'y frotter même pour me réchauffer.

La grande prairie terminale


Distribution de l'eau : des dalles d'ardoise

ou la traditionnelle tempe
Le retour se fait exactement par le même chemin, mon âne m'attend, il partagerait bien un bon café mais le fil électrifié nous dissuade sans peine.


Alors je quitte Thorrent, et pars à la rencontre des environs, petite balade découverte d'un des rares secteurs de mon département que je ne connais pas : Aytua, Escaro, quelques pas dans des rues gelées qui achèvent de me frigorifier, c'est décidé je regagne ma cheminée !






2 commentaires:

  1. Une belle découverte, je ne connaissais pas du tout ce coin. Très beau château avec sa chapelle, canal toujours en état, tempe en ardoise magnifique, c’est calme et reposant. Le Canigou s’est éclipsé pour se faire encore plus désirer. Tu trouves toujours des petits trésors, bone nit, bises.

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    1. ça ne méritait pas vraiment un article mais j'ai tellement aimé ce moment d'intimité avec cette nature pétrifiée que je l'ai tenté

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