Je me propose d'écrire 3 articles sur les gorges :
1 er : Les gorges en général, vues d'en bas et d'en haut
2eme : particularités et visites en rive gauche
3eme : particularités et visites en rive droite
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Corsavy dominant l'entrée des gorges côté Canigou |
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Même lieu |
Donc, ce premier volet va vous conduire en un site des plus originaux puisque ces gorges ont la particularité d'être
"les plus étroites du monde". 80 cm entre les deux rives en un certain passage, qui dit mieux !
Qu'on se rassure ou qu'on se désole, on ne pourra plus en juger, hélas...un effondrement de plusieurs centaines de m3 de roches a mis à mal le circuit, en 2018, sa reconstruction atteint un coût prohibitif et l'épée de Damoclès qui pèserait sur les têtes des gestionnaires du site aurait de quoi refroidir n'importe quel humain...Imaginez un visiteur blessé ...les procédures. Donc le site va revenir à sa physionomie d'avant 1953, les ferrailles et les filets des aménagements en cadeau d'adieu.
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Image de l'éboulement, source: "Entente Spéléologique du Roussillon" |
Alors comment étaient ces gorges ? Avant le tourisme.
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Les gorges, sillon bref et impressionnant |
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Le sillon des gorges en vue aérienne (Géoportail) |
A 2 km d'Arles sur Tech réputée pour son abbaye, ses "rousquilles" savoureuses, ses anciennes installations de la mine de fer de Batère, ses reliques des Sts Abdon et Sennen, deux frères martyrs et chrétiens dont le tombeau s'emplit régulièrement d'une eau miraculeuse (démystifiée en 1961 par des hydrologues)...ce qui nous arrangerait en ces mois de pénurie d'eau, allez savoir ...se trouvent les Gorges de la Fou. Ce Canyon a été creusé par un petit ruisseau sans envergure, de 8.8 km de long, qui a entamé un relief calcaire sur une profondeur de 250 m et 1.7 km de longueur et surtout une largeur de moins de 1 m par endroits .
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et à la sortie. Bon en cette année de sécheresse d'exception |
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La rivière avant d'entrer dans les gorges |
Evidemment on imagine que des légendes jaillirent de ce noir sillon de 1739 m de long nommé la Fou non pas par folie mais parce que Fou, en catalan, signifie ravin, précipice ou passage étroit.
Les légendes, je les oublie, je préfère la réalité : ce sillon haut et étroit fut dans les temps anciens le terrain de jeu, avant l'alpinisme et l'escalade, de rares autochtones chassant l'aigle; des fous courageux à plus d'un titre.
Au 19 eme siècle (1830 / 1850), les "gonflés" bandits de grands chemins locaux, les Trabucayres, s'y cachaient pour échapper à la justice des Miquelets.
Il fallut attendre un siècle plus tard, en 1928, lorsque 5 habitants du secteur entamèrent et réussirent l'exploration de ce goulet, en descente ou remontée, je l'ignore. Mais quand on a vu une fois le site, on réalise que quel que fut le sens, c'est un vrai exploit.
En 1953, des passerelles en bois furent mises en place pour permettre aux touristes et autres de parcourir ce site. Ces passerelles arrivaient sans doute à la porte d'entrée amont des gorges, aujourd'hui on peut voir des vestiges tordus de celles qui leur ont succédé, en métal. Plus tard, le site aménagé de façon moderne et sécurisée fut raccourci de plus de 200 m. Aujourd'hui, l'abandon a pris possession du parcours, on ne peut plus s'en approcher, juste lancer un regard navré à travers le grillage du portail cadenassé et nourrir des tonnes de regrets.
Tout est venu d'un souvenir, non pas la visite des gorges que je fis dans ma prime jeunesse, mais une autre visite dont je me souviens très peu : l'accès des gorges "à l'envers". En fait, y étions nous descendus ou étions nous allés les regarder de haut ? A présent, après mes balades, c'est ce que je privilégie.
Plus tard, après 2013, je voulus y retourner, je laissai glisser le temps, c'est le glissement de terrain qui m'en empêcha. Je n'ai pas anticipé, à présent c'est fini.
Alors, en ce 2023, je me suis offert une dose de visite touristique hors norme, grandiose et frustrante à la fois.
Que je vous offre à travers ces images. Et un petit récit sur mes sensations et émotions.
D'abord l'entrée officielle, à l'aval des gorges, réduite à "un cadavre". Je n'y ai pas accédé par la vraie route, mais par un sentier de chasseurs, droit dans la pente. Autrefois c'étaient des vignes et leurs murettes s'étagent jusqu'à s'appuyer à la falaise des gorges.
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Le site désaffecté |
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L'entrée |
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Vers l'entrée |
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A travers les grilles du portail cadenassé |
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En passant l'appareil photo sous la grille. |
Avec Nicolas, nous avions cherché l'entrée en amont. Nous y sommes parvenus après un parcours urticant dans des bosquets touffus qui remplaçaient les anciennes cultures, dont des fruitiers, ceux ci arrivant aussi à l'entrée des gorges. On cultivait tout aux 19 eme et 20 eme . |
Anciens vergers |
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Devenus jungle |
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Barrière métallique pour limiter les dégâts des crues (filtre) |
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L'entrée amont, où l'on devine la passerelle originelle (1953) |
Arrivés à ce goulet sombre empli d'eau noire stagnante puisque le ruisseau est avalé par le sol pour reparaître plus loin, le mot qui m'est venu est "terrifiant". Bredouilles nous avons repris le chemin à l'envers.
Quelques images du parcours empruntées à Internet, quand il était visitable (80 000 visiteurs / an)
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L'éboulement, image internet |
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Etroitesse : 80 cm, les deux rives |
N'ayant aucune possibilité d'entrer, j'ai parcouru les hauteurs, seule ou avec Nicolas, et le paysage est enchanteur, vertigineux, effrayant parfois, fascinant toujours, mais si nous n'avons pas le vertige, l'appel du vide nous a quand même taraudés. Il a fallu s'accrocher. Cela fait une étrange sensation dans les jambes et chacun regardant l'autre avait une sale impression. Les appels à la prudence allaient bon train devant notre immobilité !
En images :
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L'entrée des gorges côté Canigou avec le village de Corsavy |
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Et l'inverse, vu depuis Corsavy : entrée des gorges |
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Même site vu de plus bas |
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La Grande Falaise de l'entrée me fascine |
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Des grottes y sont incluses |
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Ailleurs, une faille |
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Les falaises; impossible de s'y frayer passage
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D'une rive à l'autre, étroit et sinueux parcours |
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Rive droite |
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Rive droite |
Pour accéder à ces postes d'observation, il a fallu avoir l'intuition du chemin car sous le couvert végétal on ne voit rien, mais ce sera un autre récit dans "Rive Gauche". Toutefois, quand se précisa le but, le jour où j'étais seule face à ce décor, je ne saurais décrire la superposition d'émotions. Il faut avoir la totalité du décor devant ou derrière soi, sentir le vide lorsqu'on revient sur ses pas, et puis entendre, le chant de l'eau qui a réapparu en bas, tantôt tonitruant en cascades, les cris des oiseaux qui tournoient dans le sillon, au dessus de ma tête, le vent dans les chênes verts, et l'on comprend que la photo est bien trop rétrécie et muette pour restituer l'ensemble. Du paysage et des émotions : surprise, stupéfaction, émerveillement, peur, voire un certain envoûtement...
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Le parcours |
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A flanc de falaise |
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Des grottes ? il y en a partout |
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On ne voit que cette portion de rivière |
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Sinon c'est vertigineux et caché sous les arbres |
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Le fond est vraiment arboré |
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Vertigineux |
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Faut pas glisser |
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Eperon franchissable mais ...prudemment |
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Dans cette falaise se trouvent des capteurs pour étudier les mouvements Site semble t'il de l'éboulement |
Dans le prochain épisode j'évoquerai les activités de la rive gauche, car activités il y eut, aussi étonnant que cela paraisse...
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