Un jour, j'ai croisé le regard de cette montagne et je fus conquise. C'était sans mimosas, il y a quelques années et je quittai l'autovía pour voir... Une petite route m'accueillit, serpentant dans les bois puis la hêtraie. C'était en d'autres temps et en une autre saison. Le temps a passé et me voici. Ce n'est guère qu'à 140 km de chez moi, quasi tout par autoroute et autovía ce qui est pareil (sauf le prix). J'ai donc le temps de faire du tourisme, en face, pour mieux admirer. Dessin, écriture, repas, contemplation, découverte d'un territoire, tant qu'à faire . San Hilario Sacalm, ses eaux "Fontvella" et ses pépinières de conifères en tous genres, sur des terrasses qui ont tranché les collines, face au
Montseny, exposées plein sud.
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Vu d'en face: le piton se nomme Agudes, 1705 m |
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Pépinières |
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Face à...demain (voir fin de blog) |
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Là où je vais ce sera plein nord, donc sérieusement ombragé. Une belle route m'y conduit, dans la hêtraie, un peu de tourisme encore et je m'installe sur un petit parking surpeuplé. Gloria est passée par là et a dévasté bien des choses.
Il est près de 17 h et...je pars en rando! Ce Montseny m'attire tant que je veux aller voir. Tout de suite! La neige est là et bien que fondante, elle rend la progression peu commode. Je croise les derniers marcheurs et je visite la forêt. Une étrange forêt de hêtres où pas un végétal ne pousse. 1300 m d'altitude et rien ! Pas une mousse, pas un lichen, pas une plante de sous bois, tout est nu et lisse. Donc bien sûr pas un animal : est ce l'influence de la proche Méditerranée ? Je la vois à travers les arbres, bleu-gris, et le couchant lance des dorures sur la côte. Le sentier zigzague allègrement, enneigé et glissant, d'anciennes places charbonnières émaillent le sous bois en petites terrasses noires, et je monte. 1500 m, ce sera mon terminus, la moitié du chemin. Le paysage s'ouvre sur les sommets coiffés d'une brume qui file et se dissout. Je crois qu'avec une frontale, je serais arrivée en haut. Tant c'est beau et silencieux.
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Balisage parfait |
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La hêtraie nue et une des charbonnières |
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Dans la brume du soir |
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Alt 1500, de la neige épaisse |
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Mon lit...et |
Me revoici au parking où je vais rester seule, une nuit de long sommeil, bercée par le torrent. Les étoiles semblent des lumignons accrochés aux branches, je m'éveille pour les regarder et respirer le souffle du torrent échevelé. Il ne fait pas froid malgré les 1220 m .
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...Mon voisin de lit |
8 h du matin : 12 heures de sommeil en poche, je pars dans la forêt déserte et silencieuse. Il y a deux chemins, je reprends le même, le second fera la boucle de retour. Je vais donc voir s'éveiller la forêt, c'est à dire, à part le soleil qui jongle avec les troncs, autant de silence qu'au soir et pas un humain en prime. La neige n'a pas gelé, les crampons, pris par sécurité, seront un poids mort.
Je dépasse la côte 1500. La hêtraie est omniprésente, j'ai juste traversé
" l'avetosa" une petite sapinière aux grands arbres.
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Lever de soleil dans la hêtraie |
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Derrière moi tout flamboie |
A présent c'en est fini des lacets. Le sentier, en lacets, dès le départ est bien balisé car des ébauches de pistes partent en tous sens : anciens chemins d'exploitation du bois peut être... Le vent m'accompagne, léger et frais. Je ne verrai pas le soleil jusqu'en haut, on est versant nord.
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Mon terminus, là bas, les Agudes |
Mon chemin va croiser un énorme puits à neige,
el Pou del Comte, (9 m diamètre, 8 m de profondeur) inaccessible car un versant de neige y conduit et je n'ai pas envie d'un roulé boulé mais un petit ruisseau libre de neige vient à point nommé me convier et j'y accède ainsi aisément. Restauré en 2013 ce "pou de glaç" du 16 eme siècle est le plus grand du parc. Il fonctionna jusqu'au 19 eme (ce qui explique le chemin bien aisé sans doute). Ainsi la nuit, les ouvriers allaient extraire la glace formée dans le puits et les "traginers" avec leurs mulets descendaient à toute vitesse les blocs qui alimentaient Barcelone (assez proche).
Arrivée au dessus des Rocs Cremats (brûlés) je m'offre un en cas, je suis à jeun hormis deux dattes. Je marche depuis 1 h 1/2, et je contemple le paysage ouvert, les hêtres sont épars. Quelle vue, déjà ! Un vent froid balaye la place, que sera-ce sur les sommets ?
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Je suis en haut : plus de forêts, paysage ouvert |
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Bleus à l'infini |
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Bleu encore, tout là haut |
Je repars pour la dernière ligne droite, pentue, et me voilà au
Col Pregon (1653 m) qui ouvre sur le versant sud/ouest : quelle vue !! Une table d'orientation est bon guide. C'est grandiose : des vallées, des pentes boisées, des fermes, Montserrat...waouhh !
Si le Turó de l'Home est proche je vais voir un premier pic nommé
Sesolles, 1667 m, habité par une tour de communications qui enregistra le 19 décembre dernier du vent à 181 km/h. D'ici on voit la mer, Barcelone, ce sera mon décor dorénavant. Quel belvédère. Une caserne militaire y fut construite en 1974 puis rasée en 2001.
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Pic de Sesolles avec son antenne Au loin le Turó de l'Home et sa "maison" |
J'arrive peu après au
Turó de l'Home (1705 m, point culminant); un ancien refuge, construit en 1881, est converti en station météo. Une route goudronnée conduit ici. En fait cette modeste montagne eut un riche passé. Et très éclectique.
Je ne m'attarde pas, je descends au
col Sesbasses (1643 m), je vais aux Agudes, à l'extrémité opposée de la crête. Un sentier "aseptisé" y mène mais je vais choisir de suivre le fil de l'arête, pas dangereux mais offrant 1.5 km de belvédère remarquable. Le versant ouest est très abrupt, un à pic de 500 à 600 m, magnifique. Je marche en roches, ou je suis le sentier, et j'évite les névés. Par prudence. Le vent est tombé depuis longtemps, c'est l'été. J'ai les Pyrénées enneigées dans les yeux, un délice !
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Les crêtes à parcourir |
Mes yeux se perdent dans un fouillis de collines, à ma gauche, semées de prairies et de fermes, en mer à ma droite, où le soleil teinte d'or l'immensité marine et où croise un vaste navire. Je crois rêver mais j'en ai la certitude un peu plus tard (chez moi, au gré d'une lecture), c'est bien
les Baléares qui se profilent sur la mer ! Voir à la fois le Canigou et les Baléeares c'est exceptionnel !! Dans mon dos, Barcelone a disparu, Montserrat se débarrasse des brumes.
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Les crêtes |
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Montserrat entre ciel et brume |
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Pyrénées |
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Pyrénées |
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Le Turó de l'Home |
La crête est déchiquetée, elle surplombe
les rocs de glaç (de glace), je franchis les
Turós del Catiu d'Or (1677 m) et de
l'Home Mort (1678 m) et je rejoins la neige avant le
Col de Sacarbassa (1653 m). Depuis un moment je brigue un éperon rocheux haut perché, à droite du chemin, je ne peux passer sans y monter.
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Turó de l'Home Mort |
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L'arête, mieux vaut s'arrêter |
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En mer |
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En l'air |
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Montserrat |
Il me séduit et je quitte le sentier pour le gravir; c'est chose vite faite, un sommet modeste,
Puig Sacarbassa (1681 m), qui mérite le nom de Pic car il est pointu. Par contre pour descendre de l'autre côté c'est de la désescalade que j'étudie, facile me semble t'il mais je vais atterrir en neige, alors je reviens sur le sentier où la neige est damée. Cependant je vais rencontrer la partie la plus dangereuse du trajet : une vaste pente de neige en dévers très incliné, où j'avoue n'être pas à l'aise. Des familles moins rodées que moi à la montagne se lancent sans précautions, sans bâtons....J'en ai fini! Ouf...Oui j'ai peur parfois !
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A gauche, les Agudes, à droite le piton du Pic Sacrabassa |
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Le passage le plus périlleux |
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Belle plongée si on trébuche ! |
Le dernier col,
Collada de Sesagudes (1643 m) est un vrai carrefour : on trouve là le chemin sur St Marçal, côté ouest , celui de retour sur Santa Fé, côté est, et enfin, plein nord, le sommet des Agudes qui fait le charme visuel de cette montagne. Hier je le contemplais d'en face en mangeant, là c'est l'inverse. De grandes dalles rocheuses y conduisent et au sommet, c'est un Carlit miniature, coloré, envahi, bruyant, faut attendre son tour pour la photo avec la grande croix sommitale.
Les tenues sont estivales en ces 1705 m et les caquetages vont bon train. La peau brûle. Je m'installe en proue, et je fais le plein de carburant. Je suis "séchée", je n'ai pas mangé pour les efforts fournis, (8km) cela m'empêchera d'aller explorer les contreforts des Agudes soit les nommés
Esglaons dels Castellets.
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Belvédère sur Pyrénées |
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Face à ...hier (photo 3) |
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Belvédère sur Pyrénées |
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Castell de Farnels |
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Le chemin parcouru en crêtes : 2 km |
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Adéu siau Agudes (Au revoir ; sens littéral, à Dieu soyez...) |
J'amorce le retour (3 km), en faisant la boucle convoitée. Bref parcours en neige glissante et puis tout devient sec, très carrossable, sous le soleil; je marche bon train, la forêt, nue, est superbe quoique abîmée par une tempête passée, l'eau est davantage présente, le torrent envoie son écho et le sentier est très fréquenté. Des grands arbres de houx font leur apparition dans cette forêt incroyablement nue.
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Le retour, balisage parfait |
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Fontaine de Bregançó |
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Aucune végétation, ni animal |
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Un des plus gros, ils ont été tellement exploités! |
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Ce sont des houx : "el boix grévol" en catalan |
En un peu plus d'une heure je suis au parking où les hurlements des habitants et des chiens résonne dans la forêt. Instant de disgrâce. Un plein d'eau à la fontaine de Passavets, un changement de chaussures, j'extirpe mon camion et je file un peu plus loin, au calme, 426 m sous le sommet que je fréquentais peu avant. Et là...je suis bien !
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En dessous des Agudes Quelle tranquillité ! |
En chiffres
Temps de marche : un peu plus de 4 h hors arrêts
Temps d'absence : 5 h 40
Distance : 11 km
Dénivelé positif cumulé 650 m
Trajet d'accès : 280 km AR
Trajet total avec tourisme :376 km
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En rouge aller 8 km En bleu retour 3 km |
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