dimanche 15 août 2021

Ariège : les étangs de la Gardelle et autres joyaux

 

Une nuit étoilée. Même les étoiles sont bousculées par le vent du sud. La brume, chassée, n’a pas eu son mot à dire. Je dors…je m’éveille…j’ai hâte…par la porte entr’ouverte, je guette les étoiles, je guette le jour. Il est là, calme et serein, le soleil dore les cimes et j’ai hâte de voir ce qu’il y a après « la rampe ». Je vais donner des noms à la montagne.

Etangs de la Gardelle

Un pic trompeur : son sommet est finalement une plate forme 


Lundi 9 août, 7 h 40, 1644 m, je démarre, j’imagine un sentier escarpé au début car je le vois et de tout repos ensuite car je le rêve…

"La rampe" : sur 648 m de long, cette déclivité de 133 m me conduit à la vue sur le torrent de la Gardelle. Belle vue et souffle froid qui suit l’axe du torrent en cascades. Je traverse.

Torrent de la Gardelle

Vers l'aval , barrage de Soulcem

Vers l'amont


Vue générale au retour


Une montée douce est un leurre, elle précède une pente raide que je vais affubler de « couloir », 102 m bien tassés , souffle court et jambes plombées. Oui j’ai 1300 D+ de la veille dans les pattes.


Le soleil jette un oeil furtif, c'est bon la voie est libre


ça grimpe bien !

Des fleurs, le bruit de la cascade, mon coeur qui cogne,  c’est rude.


Une des cascades du Gardelle


Une halte sur une dalle pour un rapide casse dalle et c’est reparti. Un groupe de retraités me rejoint : « Vous verrez quand vous aurez notre âge ! »…oups, j’y suis en plein, dans leur âge ! 2104 m, 460 D+, 1 h de marche.

Le sommet trompeur avec son toit plat

Et son arme posée à mi course!



A présent c’est la fête et le repos : un long faux plat permet de visiter du regard le paysage, escarpé à 360 °, au fond coule la future cascade, en fond, un cirque minéral clôture la scène. Dans mon dos, c’est couleurs bleues pour un relief. La féérie, enfin…

Je vais la bas tout au fond

Ainsi j’arrive à un groupe d’orris, ancienne estive reconvertie en nouvelle estive, un orri, porte métallique close. Le reste à tous vents, et une chambre qui me fait rêver avec source à son chevet et vue imprenable. Altitude 2160, je n’en ai pas fini, il me reste …300 m, une broutille ?

Ancienne estive

Dans l'orri

Dans l'orri : vue imprenable

 Je quitte vallée large, fond plat et ruisseau en méandres serpentins, ciel bleu et prairies vertes, le mur de roche rouge est devant moi, où vais-je passer ? Un crochet à droite c’est « l’escabeau », une courte et sèche grimpette, plus impressionnante que pénible et j’arrive au pied du mur, sur « la petite prairie », dernier plat herbu et mouillé. 

Vers l'aval, d'où je viens

Vers l'amont où je vais


 Je prends le temps de rêver à du grand n’importe quoi et donner du relief à mes rêves…si je monte par là, en bifurquant ici et contournant cette barre rocheuse…ah oui mais faut pas se tromper…il peut y avoir un étang, voyons la carte…et ça y va sur l’hypothétique et le peu probable. La tête y est, les jambes…Bon pour l’heure c’est pas le chemin. Le chemin je le suis à la trace par le groupe de retraités penchés et lents, bon sang quelle « échelle ». Barreau après barreau, je la franchis, bien balancée au final, et à 2331 m, après un petit 100 D+, je guette les eaux du premier lac de la Gardelle. Ils sont quatre, le premier m’accueille, frissonnant, il y a près de 2 h de marche, 3.64 km et 726 m que je grimpe. Le reste sera bonus, j’ai « fini » la sacrée bavante.


J'habille mes rêves de roche, eau et herbe, je remonte en pensée ce torrent



La "petite prairie"

Rude grimpette dans "l 'échelle"

Comme un air d' Escobes ce cylindre














Ils sont quatre lacs, le premier est flanqué d’un îlot mais comme c’est marée haute il est inaccessible à pied sec.


Vu sous un autre angle

Août 2008, une couleur verte et des névés encore


Couleur 2008 et la petite île à marée haute 

Couleur 2021


Le second sur la droite, un petit étage de 21 m au-dessus, est une mare, et le 3eme, le plus beau , 2420 m, est une beauté frémissante sous le vent glacé, entouré de murailles noires et éboulis ocres, il est le plus fascinant.


Le tout petit

Plus tard, à mon retour, en regardant d’anciennes photos, je découvrirai avec stupéfaction qu’il y a 14 ans jour pour jour, j’étais là, me baignant dans « un étang bleu marine, très glacé, où un gros névé baignait ses pieds », après un bain dans le premier lac, le silence étant si impressionnant que le moindre bruissement d’insecte « était un bruit d’autoroute ». « Le silence, le silence, est la lumière de la montagne » écrivais-je alors. « Il n’est pas implacable, étouffant, comme celui qui peut envahir une nuit, non, il est léger, il est chanson, il est musique, il est plénitude, il est repos, il est une denrée non pas rare, mais exceptionnelle »…En cette année 2008,  je découvrais à peine la montagne. Les souvenirs, pourtant vivaces en moi, ont occulté cette journée là. Mon carnet est un témoin imparable, qui raconte.

Le plus haut 2420 m


Août 2008...il y a bien du changement climatique

Le silence n’est pas garanti, il y a du monde partout, des chiens, que fais je donc en ce boulevard ?

Je file un étage plus haut, suivant de gros points jaunes qui m’amènent à 2517 m sur un promontoire rocheux dominant un décor époustouflant. Une cabane de berger nouvelle vague, discrète et élégante, un marcheur des cimes au pas rapide et fiévreux avec qui je discute, il file vers des cimes, au vu de son séjour ariégeois il est grand sportif !




  A la côte 2517, le panorama des lacs est sublime

Trois lacs, trois étages

Le plus haut 2420 m

 A la côte 2517, je retiens mon souffle : je savais qu'un étang était logé dans un site grandiose devant moi mais je n'imaginais pas ce que je découvre. Petit, transparent au possible, lové dans une cuvette, les jeux d'ombre et de lumière l'habillent d'une robe chatoyante. Il s'écoule par un fin ruisseau cascadant  en un grand dénivelé, vers le barrage de Soulcem, grossi au cours de sa route par les étangs de la Gardelle et autres ruisseaux. Sa couleur, il la doit peut être à la couleur rouge et ocre dominante dans le paysage. Bien sûr je m'offre un tout petit bain, l'eau est terriblement glacée, avec un maillot je crois que je l'aurais traversé à la nage !

Et le merveilleux Canalbonne 2500m

Autre lumière



Tenue encore "grand froid"



Et un instant plus tard après le bain 


Les voisins

Le ruisseau de la Gardelle naît ici devant; en fond les étangs



Couleur locale



Je ne m'attarde pas car un groupe de jeunes touristes envahit le site et chasse ma quiétude. 

Retour rapide vers les lacs, le grand lac sombre est balayé à présent par un vent furieux et des vaguelettes hérissent sa surface, Méditerranée miniature. En marchant je me sèche au vent glacé car j'ai commis la bêtise de tomber à l'eau habillée ! Mon séant sera au frais pendant toute ma descente ! 


Il me reste un des quatre La Gardelle à aller saluer. Il y a du monde partout, pourtant la montée est rude. Chacun s'abrite pour pique niquer, le ciel est resplendissant mais pas le vent. Ce lac, je le regarde d'en haut, 2404 m, je ne franchis pas la courte descente pour aller caresser ses reflets, il est plus beau ainsi.


Le dernier des quatre dans mon sens de visite

Ensuite je reprends le chemin à l'envers, descente rapide et ininterrompue, en 1 h 45, 195 km de route m'attendent. Descente qui requiert de l'attention pour des jambes un peu usées. 


Y a plus qu'à ...descendre en bas là bas, au fin fond


Couleurs et matières...le granit, le schiste, l'eau, l'herbe, des fleurs encore, c'est intense. Le barrage de Soulcem qui s'approche dans sa plendeur alanguie, tout de long étiré

Caillou de feu : du fer

Quand le schiste et le granit se fondirent entre eux


Comme un tapis




Comme un cadre

J'aurais pu faire la boucle par Roumazet, attirante aussi, mais le paysage m'a tellement plu que je veux le revoir en sens inverse et je ne serai pas déçue; la lumière plus brutale a changé mais elle sculpte les reliefs et mes yeux se perdent et se délectent dans des détails, des couleurs, des lumières. J'assiste même au combat improbable entre un oiseau de proie et un petit oiseau qui gagnera la partie, moment intense.


Le barrage de Soulcem

En 2008, je n'avais pas emprunté ce sentier à la montée et j'écrivais dans mon livre de bord :"Le sentier est implacablement abrupt, je ne sais si un jour j'aurai le courage de le faire à la montée". Et bien je l'ai fait et avec 14 ans de plus. 

Je peux donc me permettre de nourrir mes prochains objectifs, un projet musclé qui date lui aussi de 2008 !



En chiffres

Distance : 9.71 km
Dénivelé positif  : 950 m
Temps de marche : 4 h 27
La route du retour : 195 km


Le trajet en aller retour





10 commentaires:

  1. Encore une belle randonnée que je découvre ! De là-haut me vient une petite fraîcheur ! Quoique plus on monte plus il fait chaud ! Tu m'épates et tu m'épateras encore Amédine. Bravo pour toute cette énergie dont tu nous fais profiter. ASP

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. En tout vas je suis en pénitence en plaine pour ce WE du 15 août et j'ai rédigé pour me rafraichir. Quina calou ! Je t'embrasse très fort, tant mieux si je t'ai apporté un souffle de frais et de l'évasion

      Supprimer
  2. Un superbe parcours, tu es revenue chargée de belles images, j'y étais en les visionnant. Bises

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. Effectivement et il me tarde de reprendre la rando avec vous, si toutefois vous en avez envie ... Bises

      Supprimer
    2. Mais oui il faut juste qu'Alain teste sa patte sur une longue distance et ce sera reparti ;)

      Supprimer
  3. Que c’est beau ! Tu me donnes envie de découvrir ces lacs même si la montée est rude. Les photos sont splendides et tu racontes très bien ta rando, on a l’impression d’y être, merci. Il me tarde de bivouaquer et de randonner ensemble dans ce lieu magique. Bises, y que baji bé !

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. J'ai une proposition. Connaissant bien le terrain on fera une boucle on montera par Roumazet et on descendra par cet endroit si abrupt, ça nous reposera et rendra la rando bien plus agréable. Je me ferai un plaisir de vous faire découvrir ça. Bises

      Supprimer
  4. C'est OK pour nous et avec grand plaisir aussi.

    RépondreSupprimer
    Réponses
    1. On se concocte ça ! J'ai d'abord un projet fou à partir de Soulcem, un 3000 et ensuite repos en lacs

      Supprimer

Votre commentaire: