Les Gorges du Briant, Minerve, Hérault

Me voilà hésitant entre montagne qui me manque et Minerve qui me tente car j'ai encore quelques investigations à faire avant le printemps.
Et puis il y a ces Gorges du Briant dont m'avait éloignée la météo.

La cité de Minerve et les Gorges du Briant

C'est vrai que j'ai eu 2 week ends épouvantables là bas, question météo.
Mais comme on ne change rien, sitôt arrivée à Minerve,il pleut ! Et bien j'irai quand même!
Minerve est à 130 km de chez moi mais bien roulants ces km.
Le Briant est un affluent de la Cesse, long de 15 km, naissant à 793 m d'altitude et rejoignant la Cesse à Minerve après avoir reçu 8 affluents.

A la confluence Cesse et Briant

Après 2 faux départs, sous une météo sereine,  me voilà en route, maugréant malgré moi : en effet, le trajet balisé ne correspond pas du tout à la carte. Je peste même contre le commerçant qui m'a envoyée sur ce chemin balisé .

Le chemin balisé, GR et en jaune aussi

 Et puis mon optimisme prend le dessus, je me dis que ce peut être sympa de voir le Briant et ses gorges d'en haut plutôt que d'en bas, et que je ferai le retour là où il se doit: en bas.

C'est en face que devrait passer mon chemin ! Au fond la vallée du Briant

Je comprendrai tout au retour : le GR a changé de place pour cause de danger d'effondrement, il est interdit, tout simplement...ça alors...
 Bon, je marche sur un plateau: à ma droite des vignes, à ma gauche la saignée du Briant qui entame le plateau vert foncé à perte de vue.

Vue aérienne 1955; Minerve et le canyon du Briant

Il y a quelques belles vues  sur les gorges et ma déception refait surface en voyant le petit pont et les restes d'un moulin, tout en bas. Mais ce sera pour le retour n'est ce pas...
Alors je marche sur le plateau, peu chargée, d'un bon pas, tenue plutôt estivale. C'est un peu long et monotone, on ne voit rien du Briant. Quand enfin j'arrive à m'approcher de la corniche, il y a bien un sentier en dessous de moi, je n'arriverai pas à en voir le début.

Tiens un sentier ! 

J'en ai plus qu'assez de cette piste quand enfin je m'éclaire de l'intérieur, le sentier débute dans le maquis et prend vite une belle pente entre les corniches. Dans la pierre.

Le sentier

Le sentier, enfin ! Autre aspect

Une ébauche de sentier part en corniche sur ma gauche, ce sera finalement celui qui vient du moulin.Je le saurai au retour, vu de la rive opposée. Là bas, il faudrait d'abord un survol aérien pour se repérer !!
Je descends dans du calcaire, il n'y a que ça ! En murs, en blocs, en petites pierres, en éboulis et même en cavernes.

Le sentier et ses environs immédiats
J'ai une grosse lampe mais je n'ose pas entrer

Le Briant bruisse tout en bas, il y a une piste, un bâtiment (station de pompage) et même deux voitures. J'ai quitté le calcaire pour le schiste ce qui constitue aussi le socle du Causse. Ils se partagent, ainsi dans les rivières on peut admirer bien propre et poli un socle vert ou lie de vin, schisteux voisinant avec du marbre blanc.

Vu d'en haut, le paysage dans lequel j'évolue : ici c'est schisteux
Station de pompage en bas

Me voici, après une belle descente, arrivée près du Briant bien bruyant, ma destination est le Pont de Daniel : que vient donc faire un pont là où il n'y a ni chemin, ni moulin ni rien ...ce n'est pas anodin.
Surtout que lorsqu'enfin on le voit, la surprise est totale. Qu'il est haut, imposant !

Le Pont de Daniel

C'était un pont canal

Mais la surprise est encore plus grande quand on y est dessus, c'est un béal, c'est indiqué sur un panneau mais un béal, ça se voit à l'oeil nu. Et c'est étroit .

 Alors ce Pont de Daniel était un chemin d'eau. Quelle était son utilité et dans quel sens coulait-il ? Je l'imagine coulant en rive droite car je devine, entre le ruisseau et la falaise des murs de soutènement.

En jaune le trajet de l'eau pour le moulin
empruntant le pont de Daniel
 mais jusqu'où ??
(La rivière coule dans le sens des flèches jaunes)

Alors que sur la rive opposée, rien vers l'aval d'où je viens. A la maison des recherches poussées me donneront la réponse: il prenait l'eau en amont et la conduisait après une traversée de la rivière sur ce pont à un ancien moulin aujourd'hui disparu. Les cartes anciennes ne le mentionnent pas.

Murs de soutènement de l'ancien canal

En tous les cas, au vu de ces colossaux ouvrages d'art, il devait avoir une sacrée importante ce moulin!


Quoiqu'il en soit si le pont m'a impressionnée, la rivière m'impressionne encore plus, mince, profonde, coulant dans un marbre blanc du plus bel effet.

De marbre blanc

A présent, je me dirige vers un autre type de moulin, la station de pompage toute proche et je pense, à fortiori, que le moulin s'y tenait car il y a de la place pour cela.
Les stations de pompage ont une place très importante dans le Causse. C'est l'eau qui avait tué Minerve au temps des Cathares; l'eau du puits St Rustique dans le Briant avait été empoisonnée et les assiégés avaient du se rendre. Enfin ils avaient préféré le bûcher.







Evidemment, mon premier soin est de chercher le sentier de la rive droite qui rejoint Minerve: là aussi je "fais chou blanc", donc je suis le balisage jaune qui va me ramener sur le Causse, en rive droite. Je ne peste plus. A présent je sais où il est, je l'ai vu, élégamment barré d'une croix jaune.

Je monte sur le Causse, c'est très long, mais ce sera plein de surprises , en sous bois et en chemin d'eau : celui qui conduit l'eau sur le Causse et les hameaux et puis il y a un ruisseau qui chantonne en m'accompagnant. Soudain, silence ! Il a cessé de chanter et son lit est sec. Je redescends de quelques pas et, en franchissant des buissons, je le trouve sortant de sous les roches, frais et sautillant, commençant sa chanson. Je lui emprunte un peu d'eau savoureuse, nouvelle née.

Le petit ruisseau qui chantonne

Sur ce chemin je vais trouver un wagonnet , il y avait ici une petite voie métrique avec des wagonnets tractés par un treuil, sans doute pour construire ce réseau de pompage.

Le wagonnet , 4 roues

Longue montée sur le Causse

Me voilà enfin sur le Causse, en plein vent, avec des averses qui pointent le nez à l'horizon, immense, ouvert, d'ombre et de lumières. la vie qui revient ; la route, un peu plus loin, quelques vignes, quelques masets.

Le Causse de Minerve

Depuis un moment, je vois, entre les arbres, sur la rive opposée, un habitat troglodyte, dans une caune ou grotte qui fut fermée par un mur joliment édifié. Demeure de berger ? Habitat plus ancien ? Je peste une peu d'y être passée à côté sans le voir, mais dans ces paysages là on ne voit bien que de loin. La morphologie des sites dans le calcaire est ainsi.

J'aime beaucoup le Causse et chaque fois que je le peux je m'approche du vide pour observer. De nombreux oiseaux, qui ressemblent aux hirondelles des murailles, tournoient dans le vide.
Il ne fait pas chaud, je suis en T shirt et mon pas est vif. J'ai fait un immense détour, le chemin nouveau est ainsi fait. J'emprunte la route goudronnée, pour gagner du temps car il me reste quelque chose à voir. La pluie menace, le vent forcit, mais j'irai quand même : le moulin et son joli pont.

Là au fond coule le Briant  et tout près de moi, on devine le sentier marron devenu interdit,
l'ancien GR

Minerve perché sur ce chaos

Après avoir rencontré vraiment très peu de monde sur ma rando (7 personnes), j'arrive à la civilisation de Minerve (et à l'entrée du sentier interdit, ça y est je l'ai enfin!): touristes endimanchés , encapuchonnés, manteaux , écharpes, bonnets. Avec mon tee shirt, mon bâton et mes cheveux embroussaillés, je fais un peu figure de sauvage du coin. Je fausse compagnie à la foule en plongeant dans la falaise, un sentier pavé y est tracé, qui me conduit rapidement à la rivière: je vois défiler des strates, des éboulements impressionnants, un chemin muletier taillé dans le roc

Sentier en corniche

Le temps l'a malmené quelque peu

 Et  la silhouette élégante d'un vieux pont qui a perdu son tablier, ses murets, malmené par la Cesse qui l'a submergé et cogné au fil des décennies.
 Mais il est là, vaillant ainsi que le moulin, sa meule, sa chambre d'eau, son bief, tout y est ! Abîmé mais encore debout.

Il est vrai qu'ici la rivière est tourmentée et les crues violentes

Vue prise en 1910, le moulin est encore intact

Du moulin il reste encore un fier bâtiment de belle facture, un moulin "chic" dira t'on !

Les meules cerclées de fer
(nous ne sommes qu'à quelques km des meulières)

          Le bief : à gauche, l'eau plongeait dans l'antre du moulin pour faire tourner la meule

                         à droite, le bief dans son parcours à la rivière

Je remonte le bief jusqu'à la prise d'eau, rien n'est démoli, les petits ponts, les vannes, un patrimoine qui a l'air de subir une restauration, patrimoine privé je pense. C'est de ce moulin que part le sentier qui remonte les gorges, non interdit et non balisé et qui passe au pied de la grotte murée...évidemment que j'y retournerai ! Au printemps.

A la prise d'eau: sol de schistes verts et polis

Et marbres blancs

Je regagne Minerve, un passage obligé et je termine mon beau périple par la librairie salon de thé : la chance est doublement avec moi, le thé est délicieux et le propriétaire des lieux est randonneur et connait les gorges de la Cesse comme sa poche : passage obligé chez lui, rendez vous est pris...au printemps...

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Car à peine arrivai-je au camion, la pluie fine et drue se mit à tomber, cela dura toute la nuit.
Les Dieux du Briant et de la Cesse, cachés dans les grottes m'avaient accompagnée !

Ils vivent là et ailleurs

En chiffres : 
Temps de marche : 2 h 45
Distance :10.5 km
Dénivelé positif cumulé: 350 m environ

Ma balade