Le Pech de Bugarach, s'il n'est pas le point culminant de l' Aude, est un sommet mythique, oscillant entre légendes et réalité, pouvant offrir à la fois des rêves et des peurs, mais en aucun cas de l'indifférence. D'où qu'on le regarde, il offre un visage particulier : une face abrupte striée de couloirs, ou un aspect de grosse molaire, ou un petit air de lointain volcan. Ne faisant partie d'aucune chaîne de montagne, c'est un petit massif isolé comme surgi de nulle part, mais au relief calcaire tourmenté, boursouflé, hérissé, labouré de sillons. Son heure de célébrité a sonné en 2012 quand la fin du monde fut annoncée, Bugarach devait être le seul site au monde épargné...on attend encore...
Divers visages du Bugarach:
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Face est |
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Face est |
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Vu au zoom depuis mon village à 50 km à vol d'oiseaui |
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Face nord, sur place |
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Face sud /ouest route de St Louis |
Bugarach a une particularité géologique, c'est une "montagne inversée" c'est à dire que lors de la formation des Pyrénées, les couches géologiques les plus anciennes se trouvèrent en haut et les plus récentes enfouies. 50 cavités percent le massif mais l'une d'entre elles, le Bufo Fret, qui souffle de l'air froid à 9°, est un réseau de plus de 5000 m de galeries qui traversent le massif en nombreuses ramifications. Il y a même un cours d'eau qui rejaillit en façade et en cascade, quand les conditions sont requises.
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Face ouest |
Après une nuit au village de Bugarach, je retrouve Pierrick et Emilie pour monter au sommet par la voie dite" de la fenêtre". La journée est étincelante, un temps estival est annoncé.
Le sommet peut compter sur 3 trajets : celui, classique du col de Linas, long sentier en lacets, celui de la fenêtre qualifié de "difficile" et enfin l'arête sud /est, moins classique.
Nous démarrons dans l'ombre, près de la rivière, sous la gelée blanche qui donne l'onglée. Matin glacé. 2 °. Direction la fenêtre . Mais avant elle il faut longer La Blanque , la traverser à gué, patauger dans la gadoue, veiller à son équilibre et éviter "la gamelle" qui guette, aux aguets! On gère bien.
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Traversée de la Blanque |
La cascade des Mathieux vaut le détour, escarpé et glissant, cascades et vasques superposées. Plus bas, la rivière disparaît sur la carte. Faudra voir ça de plus près un jour.
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Cascade des Mathieux |
On louvoie dans la gadoue, on retraverse le ruisseau et on arrive à la route, rien n'a commencé, je suis usée jusqu'aux genoux depuis trois jours déjà, ça promet. On a parcouru 3.82 km et rien n'a commencé.
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Encore une traversée de la Blanque |
Nous voici à la route, le sentier commence là, je me souviens d'août 2010, mon passage ici. je me souviens d'une montée pas facile mais j'étais ...jeune, 11 ans de moins.
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Emilie dans les buis |
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646 m : "la prairie" |
Là je lutte contre la fatigue brutale et coriace, elle est toute jeune, 3 ou 4 jours, elle est puissante.
On monte...c'est beau, c'est ardu, c'est plaisant, puissant et épuisant. Je ne souffle pas, je souffre. Mes jeunes amis sont attentifs et moi je m'en veux. Je gâche ma journée et sans doute la leur.
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Massif du Canigou |
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Massif du Madres |
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Dans les buis dévastés |
L'air est nimbé d'un voile de brume, le ciel bleu et le soleil rayonnent, la verdure est omniprésente en bas et les oiseaux dépècent le silence.
On monte, je note les km, les altitudes, je respire et je bois le paysage. Il est immobile, il s'élève, ou s'abaisse, c'est selon, c'est tout. Je me rappelle de tout mais en plus court, en pointillés, je souffrais moins, aujourd'hui chaque tronçon se grave en moi et j'aime ça, intégrer un parcours dans mon corps, fatigue ou pas, c'est de l'ancrage corporel.
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Aout 2010 |
Altitude 1025, 5 km, on arrive au bas de la muraille, la roche me booste habituellement. J'ai espoir.
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Une randonneuse et le chameau |
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Pierrick |
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Les festivités commencent |
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Tout le bestiaire à imaginer |
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Comme des gradins naturels |
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Murailles et clochetons |
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Un petit pas |
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Un grand toit |
On entre dans l'antre du calcaire : pitons, dents, aiguilles, crocs, molaires et tourelles nous entourent; le chemin style marches d'escalier n'a rien de difficile, ni de vertigineux, mes doigts caressent le calcaire, la puissance de la roche gagne mon corps.
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ph Emilie |
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ça grimpe dur mais c'est facile |
La fenêtre est là, je croyais le pas difficile derrière, il est devant, alors je ne pousse pas la machine et je succède à Emilie dans l'ouverture. Avec moins de grâce assurément!
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C'est l'été !! |
Incroyable, il y a une semaine à peine...la fenêtre,1100 m , photo Ludo
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C'était hier...l'hiver... |
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"Une femme à sa fenêtre" |
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Dans la fenêtre s'encadre le Canigou |
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La fenêtre : très belle photo d' Emilie |
Nous laissons la fenêtre ouverte, on aurait du la fermer peut être, trop tard, on est déjà dans la pente terminale et quelle pente !! Ce sera le coup de grâce pour moi, je me fais l'effet d'un poisson pris dans une nasse, étouffé par le filet, cherchant la goulée d'air, je suis proche du malaise. Est ce possible de peiner bien plus qu'à ma montée aux plus de 3000 m du Bésiberri nord ??
Emilie me requinque avec des abricots secs et ça y est je respire calmement l'air du sommet, je bois le paysage en bas, les prairies vertes avec des maisons posées comme des papillons, des vides impressionnants et, en tournant sur soi, c'est du 360° que rien n'entrave. Des reliefs tourmentés, du vert en bas, des fermes, des forêts, la montagne enfin! Même à si faible altitude.
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La Pique Grosse telle un oiseau de proie |
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Un aperçu de la pente |
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Montée vers le sommet |
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Le sommet à deux pas, les plus durs ! |
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Le sommet sous nos pieds |
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Au sommet; hameau de Linas en bas |
Je revis, je me régénère, je redescendrais presque pour remonter ! Non, c'est du bluff...Parce que je sais qu'à présent je ne vais faire que DESCENDRE ! Ne jouons pas les gros bras que je ne suis pas...Pas fière de ma faiblesse devant des jeunes.
Il y a une semaine à peine, ici à 1230 m c'était "sibérien"...Photo Ludo
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Photo Ludo |
Il a juste oublié de déneiger un débris....
Cependant un bon repas loin de la foule me régénère. Parlons de la foule ! En ce jour brillant, il y a du monde et la particularité des gens, c'est la gaieté. Y a d'la joie, partout, dans les voix, les saluts, les sourires et même les souffrances. La montagne n'est que joie, du sol au toit, alors que la menace plane et gronde, virus oblige, la joie transpire dans les bois, sur les rocs, sur la cime. Quel bonheur...on le recevrait les yeux fermés.
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Repas au balcon |
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L'envoutante Pique Grosse |
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Bugarach |
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Et l'inverse, la veille
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"mon " parking chambre |
Allez on descend: je me souviens, voilà dix ans, de m'être dit "qu'est ce que je n'aimerais pas monter par là....!". Alors je suis attentive et mon idée perdure. Certes les buis sont décharnés par l'insecte dévoreur donc plus aérés, mais le sentier est ingrat, glissant, difficile . Les habitants du crû seraient ils venus cirer et huiler les marches cette nuit ? Les buis sont de solides appuis et les randonneurs qui montent péniblement suent par tous les pores. Un amer parfum de buis enveloppe le paysage, insistant, ne laissant place à aucun autre parfum. Le buis est tenace, dans sa vie comme dans ses effluves.
La descente est longue, brutale et enfin, en bas, non ! C'est pire ! la gadoue partout, on glisse, s'enlise, s'embourbe, on louvoie au jugé, parcours du combattant, jusqu'au Col de Linas.
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On va en bas là bas |
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Jardins suspendus
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Relief tourmenté et grandiose, Canigou en fond |
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Petit col on bascule du sud au nord, 1123 m |
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La muraille nord |
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On va s'enfoncer dans la forêt |
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Promenons nous dans les buis |
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Mousses et repousse de buis |
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Dans la gadoue, LA GADOUE
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Le retour est longue distance en jolis sous bois: 4 km de chemins et sentiers remplacent 4 km d'asphalte...En mode automatique, on avance vers les toits de Bugarach qui vibrent dans l'air chaud.
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Vénérable châtaignier |
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Bugarach sous le soleil |
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Le clin d'oeil d' Emilie (ph Emilie) |
En chiffres
Distance : 14 km
Dénivelé : 900m
Temps effectif de marche : 4 h 38. (le trajet est donné pour 4 h 35, donc je n'ai pas trop traîné).
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Source : image internet, IGN Rando Capture d'écran |
Très beau voyage en votre compagnie. Ce Pech souffle le chaud et le froid mais nous ne sommes jamais indifférents. J'ai déjà hâte d'y retourner !
RépondreSupprimerEt moi tellement que j'y retourne demain !
Supprimerj'y suis allé par le col de Llinas. Un agréable souvenir assez bizarre parmi des non français (avec toutes ces affaires de racisme, xénophobie... je ne sais même plus comment dire; Marre de ça aussi!) juste avant la "fin du monde". Mes débuts dans la randonnée. J'y retournerai mais j'éviterai définitivement la fenêtre au vu de tes commentaires dans le blog et ailleurs. Bravo Amedine, Emilie et Ludo
RépondreSupprimeroui (ceci à la 1ere partie de ton com') quant à la montée par la fenêtre, elle n'a rien de compliqué, ni de vertigineux et le "difficile" affiché est, à mon avis, une façon de se protéger car c 'est fréquenté. Non Guy, ne l'évite pas, tu es à temps toujours de faire demi tour, mais cette montée est magnifique, c'est le must du Bugarach. Bises
SupprimerBravo l'équipe c'est une superbe sortie
RépondreSupprimerOui et à faire ensemble quand la belle saison sera là, à cause du bivouac.
SupprimerCe commentaire a été supprimé par un administrateur du blog.
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RépondreSupprimerC’est vraiment très beau, une fenêtre que l’on a envie de franchir ! Bugarach autrement c’est enthousiasmant.
RépondreSupprimerBravo !