La lecture du cadastre de 1831 nous dit qu'à la place de ce paysage boisé se trouvaient des terres, des champs, des pâtures, un paysage ouvert. Les bois ne prenaient possession de la nature, encombrés de rochers, quebeaucoup plus haut, à l'étage des cortals et donc des estives.
Ainsi sur cette image, le mas était bien dégagé et tout en haut de la photo, indécelable, un cortal, celui de Xuri accueillait les bêtes, à 835 m d'altitude, que nous visiterons plus tard. Pour l'heure, nous allons essayer de gagner le cortal dal Pé. Je sais son nom, son altitude (900m), Paul sait un sentier qui s'enfonce vers l'inconnu, à nous l'aventure. La neige est à présent continue et nous marchons dans du feutre. Il ne fait pas froid, je suis en tee shirt, la montée est agréable et douce, toujours sous un épais couvert végétal barré de ci de là de murettes, témoignages du passé agricole. Puis nous décidons de quitter le sentier pour prendre de l'altitude, nos GPS vont nous donner la direction dans cette pleine pente bien sévère mais immaculée. Grand silence dans les bois, pas un oiseau, de toute façon nous savons que pour le cortal, ce sera côté soleil et à l'abri des vents du nord : justement un beau mur nous accueille. Nous avons parcouru 4.5 km.
C'est un bâtiment de belle taille, ouvrant au sud, avec un joli point de vue sur la vallée. Tout près se devinent des murets, une large étendue consacrée aux pâtures et aux cultures : de belles terres bien dégagées que dévoile encore la vue aérienne des années 60.
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Angle des murs |
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Le toit fut de tuiles et s'est effondré |
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Un des piliers intérieurs |
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Tous ces bâtiments de montagne avaient un toit de tuiles qui s'effondra sous le poids des ans ou de la neige |
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Extérieur |
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Intérieur |
Nous quittons le site par un sentier de chasseurs reconnaissable à des points verts mais nous allons vite le perdre et nous enfoncer dans la pente, où nous allons plus d'une fois rectifier la trajectoire à cause de la déclivité et des barres rocheuses : ici il faut jouer la prudence, une glissade et....l'au delà nous attendrait sans vergogne.
On navigue avec aisance dans ce paradis blanc et le sentier (842 m 4.83 km) recueille deux explorateurs sains et saufs. On va donc s'accorder une pause casse croûte, de préférence au soleil, au sec, en belvédère, soyons exigeants ! Et, ma foi, cela valait le coup. La journée est d'une luminosité parfaite, la vue porte loin, sur les pentes de la rive droite, des ravins, des mas, des sous bois épais et les crêtes que caresse la neige.
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La vallée de la Lentilla et la D13. Le mas Fanfaïna (zoom ci dessous) |
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Je crois qu'ion n'a pas tout vu |
A présent, direction le Cortal Xuri. Celui ci a un sentier bien tracé, bien enneigé et, ma foi, escarpé, 150 m de dénivelé et nous atteignons une ruine...bien ruinée ! (835 m, 5.92 km). Celui ci a été construit avec beaucoup moins de soin que les autres, le résultat est flagrant. mais comme ailleurs, des tas de tuiles bien rangées semblent dire "on vous attend".
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Mur extérieur |
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Adossé à un rocher |
Nous, on n'attend pas, à présent le retour s'impose et je me laisse toujours guider avec délices : pour une fois je ne dois pas réfléchir, prendre de décision, côtoyer l'inquiétude, être attentive sans cesse, comme dans mes randos solo. Je savoure, j'apprécie, je deviendrais vite paresseuse, de cette manière là !
Nous suivons encore un moment un sentier bien enneigé quoique tracé, car nous grimpons sévèrement jusqu'à dépasser les 900 m et nous sommes à présent en RTT (Rando Tout Terrain). Il faut faire sa trace dans un espace vierge mais non dépourvu d'embûches, taillis, ronces et autres délices, pour rejoindre le long et confortable sentier balisé qui nous ramènera .
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En mode RTT |
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Et le sentier, balisé de jaune
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Ce sentier sera plutôt long mais comme je les aime, tantôt en balcon, tantôt en pierriers ou en corniche, avec de belles déclivités, des passages escarpés, des points de vue éblouissants, un silence sépulcral et de belles surprises à la clé.
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Puig dels Moros 1211 m |
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C'est là dedans que l'on va se glisser |
Je vais le savourer, malgré des passages glissants qui requièrent l'attention : le corps commence à s'ankyloser, à cause du froid. Je suis toujours en T shirt mais, insidieux, le froid de la neige remonte depuis mes pieds et grippe mes articulations. J'y prête une attention légère, le lendemain sera une autre chanson ! Les passages de ravins sont une glacière et j'encaisse de jolis chocs thermiques sans broncher.
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El Rocatas |
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Vers l'amont |
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Ou glacé |
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En corniche |
Une belle succession de ravins brutaux se jetant dans le vide plaisent à mon regard.
Une ruine se dore au soleil, celle de Can Tosseire . Malgré le relief très escarpé, en 1831 le mas était cerné de terres cultivées et complètement dégagé de ce fouillis végétal qui l'enserre.
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La 4 eme ruine du jour : Can Tosseire |
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Au zoom |
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Vu du ciel |
Nous atteignons la ruine que je visite avec plaisir: elle respire encore un peu de vie avec sa cheminée, ses étagères sous plafond béant, ses poutres hérissées de pointes ayant cloué les planchers; on croirait presque voir des rideaux aux fenêtres, ce ne sont que des grillages.
La ruine, flanquée d'enclos à bestiaux, voire d'un poulailler ou d'une soue à cochons est imposante et belle, à 697 m d'altitude. (8.64 km)
Toute proche est la fontaine quasi tarie.
Notre descente sera désormais faite de passages très inconfortables car glissants : feuilles, boue ou neige se relaient sans pitié.
Jusqu'au premier vrai cours d'eau, la Coume, qui croise notre chemin, encombré de barres métalliques parlant d'une débâcle de la mine de la Coume. Sitôt passé le ravin glacé, deux ruines vont nous faire cadeau de leur présence, une sans nom, la suivante, plus importante, flanquée d'un vaste cabanon : c'est la Comassa (600 m) que jouxte un petit enclos à bétail sans toiture, un corral. 6 eme ruine.
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La coume |
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Toujours étranges ces murs, hauts et brefs |
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Le roc dels Moros coiffe le maquis Celui là j'irai un jour le coiffer ! |
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Ruines du petit mas de la Comassa |
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Très ruiné et encombré |
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Son orri, vaste à l'intérieur |
Nous amorçons alors la dernière descente, celle qui va nous mener en quelques instants au GR 36 parcouru le matin, dans l'haleine glacée de la rivière, sous le regard placide de nos vaches, un beau périple qui s'achève, merci Paul pour ces belles découvertes et cette clef offerte vers de nouveaux chemins.
Encore une belle rando, quoique rendue assez délicate au vu des conditions saisonnières ! Mais de belles récompenses que ces ruines, vestiges de temps où des familles pouvaient vivre (ou survivre) en autarcie ! Si les murs pouvaient parler (...) ! Je me muerais bien en vieux hibou nocturne pour essayer de capter quelques secrets cachés en ces lieux mystérieux ! en fin de printemps ou début d'été, on y bivouaquerai bien (bonne idée, tiens) ! Merci à vous deux pour ce singulier périple agrémenté de belles photos et de descriptifs incitatifs !
RépondreSupprimerTu as bien saisi l'âme qui rôde encore autour de ces ruines. Elles me murmurent des choses aux oreilles parfois et je sais entendre quelques secrets...mais je les garde bien secrets. Elles pourraient se venger !
SupprimerMagnifiques mas et cortals, on imagine comme la vie devait être rude en ce temps là. Tes recherches sont toujours fructueuses, merci pour ce reportage, bises Josy.
RépondreSupprimerC'est un régal pour moi de revisiter le passé, pourtant dans la vie je me tourne plutôt vers le futur...euh un peu plus proche vu l'âge ! Je vais continuer à fouiller le secteur mais trop de neige pour le moment. Bises
SupprimerTu as bien du faire le sanglier dans cet environnement !
RépondreSupprimertoujours aussi agréable à lire tes découvertes. amitiés
Non, justement tout est en sentiers, très peu en mode sanglier par contre les sentiers ne sont pas marqués sur la carte; souvent sentiers de chasseurs. Amitiés
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