On n'y trouve même rien puisqu'il est muré à chacune de ses extrémités.
Il a une histoire qui ne rejoint pas l' Histoire, il n'a que un siècle et demi d'existence puisqu'il date de la seconde moitié du 19 eme siècle.
En ce temps là.... c'était une histoire d'eau.
Mon village à plus de 100m d'altitude, est bâti sur une colline qui est un véritable réservoir d'eau.Une épaisse nappe phréatique située à seulement 7 m de profondeur dans le haut du village a toujours donné une eau claire et abondante , ce qui a permis au village de s'édifier vers le 10 ème siècle .
Au fil des siècles l'eau a été captée en de nombreux puits , dont certains perdurent, notamment dans les anciens chais puisqu'il y a une grande tradition viticole. Non pas pour mettre de l'eau dans son vin, mais les chais étaient faits de foudres et tonneaux en bois, les comportes étaient en bois et il fallait de l'eau non seulement pour nettoyer mais aussi étanchéiser les récipients vides depuis un certain temps.
Tout en haut du village existait un grand puits que mon grand oncle, né en 1890, décrit minutieusement dans ses mémoires. Comblé depuis longtemps on pourrait le refaire à l'identique au vu de cette description.
100 mètres plus bas, près du presbytère, fut creusé, à vingt mètres d'un puits existant, le "Puits Neuf" afin de recevoir l'excédent d'eau du Puits d'en Haut, trop abondamment fourni. Une galerie souterraine reliant les deux puits fut creusée de mains d'hommes pour ce faire : le fameux souterrain.
Ce souterrain, nommé "Lluvia" (mais plus vraisemblablement "lludia", endroit sombre), d'une longueur d'une centaine de mètres est creusé dans l'argile jaune et dure du pays. Haut de moins de 1.80 m et large de 1m, ce conduit sombre et humide était le terrain de jeux des copains de mon grand oncle dans les années 1900 et avait un accès au rez de chaussée d'une maison : en effet le propriétaire avait ouvert une trappe pour mettre son vin au frais dans le courant d'eau froide !
Aujourd'hui plus personne n'accède à ce souterrain tombé dans l'oubli.
Pourtant l'autre jour, une petite poignée d'intrépides dont je fus, eut le rare privilège d'arpenter la galerie à la lueur des torches.
Alors, on y va ?
D'abord, il faut descendre dans le souterrain dont la partie basse est emplie d'eau : les bottes sont de rigueur !
Le passage est particulièrement étroit, nos ancêtres étaient minces !
Suivez moi donc ....
Dans la cave , on ne s'ennuie pas : la dernière récolte du propriétaire décédé nous est gentiment laissée à la dégustation . Daniel opère de façon ancestrale pour soutirer le vin.
Pendant ce temps "les gens d'en bas" commencent leur périple dans le "trou d'ombre" où résonnent les voix dans une chaleur épaisse.
Sur les murs on peut lire les coups de pics donnés par les hommes qui ont creusé l'ouvrage dans l'argile dense
Le plafond d'argile |
Le sol dallé |
Je suis en tête de parcours , un peu impressionnée quand même.
Des pierres jonchent le sol, détachées du plafond qui par endroits en est bien pourvu.
A certains endroits des infiltrations calcaires ont revêtu les parois soit de blanc soit de couleurs et même de minuscules stalactites commencent à se former.
Une ancienne canalisation abondamment rouillée doit déverser les eaux de pluie dans le tunnel.
Le mur du puits et le passage de la source. |
Tout au bout du parcours l'accès au puits est muré, d'ailleurs le puits n'existe plus depuis longtemps mais une source continue d'alimenter la galerie et donc la fontaine située à son autre extrémité.
C'est sûr que d'un grand moment l'eau ne sera pas buvable !
Le tunnel résonne de voix joyeuses et d'exclamations : il n'avait connu pareille liesse depuis des décennies.
A présent il nous reste à faire le chemin à l'envers : le petit groupe s'essaie au demi tour et aux croisements afin que les derniers puissent arriver au pied du mur : exercice laborieux !
Tout au fond brille la lueur qui annonce l'échelle : sera ce facile de remonter ? c'est tellement étroit...
L'échelle et son reflet |
A présent il ne nous reste plus qu'à déguster tranquillement le bon grenache de Jean qui doit bien rire , tout "là haut". Merci à Marie, sa fille. Merci à tous ceux sans qui ce périple n'eut pas été possible. Ils se reconnaîtront...
Mon grand oncle raconte que....
En ce lointain temps du 19 eme siècle finissant, le jour où les hommes mirent en service le souterrain, qu'ils donnèrent les derniers coups de pioche pour libérer l'eau du puits d'en haut, une vague brune déferla dans le tunnel , les hommes se ruèrent vers la sortie poursuivis par le torrent furieux qui alla se perdre dans les vignes. Quant au Puits d'en Haut, furieux lui aussi d'avoir été malmené, jamais plus il ne fonctionna normalement. Un abreuvoir fut construit à son extrémité, en plus du "Puits Neuf", en vain. Alors les hommes murèrent le souterrain, détruisirent l'abreuvoir, et le puits reprit ses bons offices....
Fabuleux, ton récit! Je mets ton blog en favoris et je le visiterai à nouveau. Bravo!
RépondreSupprimerRaymonde Picamal-Sébastia
Merci !! Qu'ajouter ?
Supprimerun petit verre bien mérité à la sortie.
RépondreSupprimerj'aime bien la photo de l'image et son reflet,
bisous
Oui c'est de loin ma préférée...Bisous
SupprimerSuper ! je mets un lien sur mon blog.
RépondreSupprimerMichelle
Ah sympa ton initiative ...Tiens c'est dans ton village la chèvre en or... tu le savais ? oui je pense...
SupprimerSuperbe récit très détaillé. J'aurais bien aimé le visiter ! A Cerbère nous avons deux grands tunnels construits lors de la création de la gare SNCF internationale....mais pour l'un, celui qui dessert la gare voyageur et descend vers le front de mer, utilisé par beaucoup de piétons il n'offre pas grand intérêt si ce n'est le désagrément d'y croiser, surtout la nuit, de beaux spécimens de rat d'égout...Quant à l'autre aussi imposant créé pour détourner le lit du torrent Ribéral débouche sur village et campagne. En son centre une ancienne station de pompage qui alimentait en eau potable le village. Ne sert plus depuis des décennies. Encore merci pour ce "voyage au centre de la terre catalane" !!! ASP
RépondreSupprimerJe voulais l'appeler "voyage au centre de la terre"...mais tel qu'il est juste sous la coûte terrestre (quelques dizaines de centimètres) je n'ai pas osé. Merci pour le voyage à Cerbère !
SupprimerEncore une belle aventure et ton récit passionnant intéressant. Vibrant ....j'ai entendu vos voix .vos rires dans ce souterrain..j'ai adoré " mettre l'eau dans son vin"....merci pour nous avoir partagée ces histoires de ton village. ..et à votre santé. ..Jolie couleur le vin ...bises..
RépondreSupprimerEncore une belle aventure et ton récit passionnant intéressant. Vibrant ....j'ai entendu vos voix .vos rires dans ce souterrain..j'ai adoré " mettre l'eau dans son vin"....merci pour nous avoir partagée ces histoires de ton village. ..et à votre santé. ..Jolie couleur le vin ...bises..
RépondreSupprimerD'habitude, tu nous emmènes vers les hauteurs et la lumière vers lesquelles j'aime te suivre en te lisant car je ne peux le faire et, aujourd'hui c'est dans les profondeurs et l'ombre que tu nous entraînes mais, je ne peux pas te suivre non plus. C'est pas assez large !-:)))))
RépondreSupprimerC'est une histoire passionnante, j'aime beaucoup tout ces petits "secrets" dont nos villages regorgent.
Une belle histoire d'eau qui vous a permis de déguster un bon grenache.
Merci Lison pour toutes ces balades.
Bisous, bisous
Ps : mon mail, c'était juste pour avoir de tes nouvelles..........
Mes nouvelles tu les as sur FB et le blog, on me suit à la trace . Je vais un peu moins bien depuis la perte de Lison mais là je crois que j'ai acquis qu'elle était morte et que je ne la reverrai jamais...Bisous. J'aimerais mieux la trouver morte que rien
SupprimerQuelle histoire passionnante ... MERCI.
RépondreSupprimermerci...jusqu'à la prochaine, elle sera amusante
SupprimerBonjour Lison (Lison, toujours l'esprit de ce blog).
RépondreSupprimerVoilà une histoire intéressante. Je pense que l'on doit trouver ce genre d'oeuvre dans d'autres villages (Jean de Fleurette, Manon des sources). Si j'ai bien compris, finalement ce tunnel n'a jamais fonctionné comme c'était prévu. Par contre étant claustrophobe, je ne vous aurais pas suivi dans ce périple. Pour ma claustrophobie, Tahiti me convient : "Au-dessus de moi le grand toit élevé de feuilles de pandanus, les lézards y demeurant. Je pouvais dans mon sommeil m'imaginer l'espace au-dessus de ma tête, la voûte céleste, aucune prison où l'on étouffe. Ma case c'était l'espace, la liberté." Paul Gauguin.
Oui je garde le nom car je suis aussi Lison : aventurière ou intrépide et n'en faisant qu'à sa tête. je n'aime oas particulièrement les lieux confinés , sous terre et sans accès libre à l'extérieur. Je m'y étais pourtant aventurée seule voilà de nombreuses années. le propriétaire était vivant et m'avais laissé l'accès mais il était tellement inquiet que j'avais rebroussé chemin pour lui. Je n'ai pas fait de spéléo pour l'angoisse de ces étroits boyaux. J'aime beaucoup ta citation, tu as toujours de belles phrases. J'adhère totalement à l'esprit de cette phrase notamment "aucune prison....étouffe". A bientôt
SupprimerMerci pour ce récit très intéressant. Je ne pense pas que j'aurais pu descendre dans ce souterrain, il m'aurait manqué d'air... (sourire)
RépondreSupprimerBelle fin de semaine, Lison. Gros bisous.