lundi 22 mars 2021

Vallespir : la piste du Molí Serrador (1ère)


 Préambule :un Molí Serrador est un moulin de sciage, en catalan. Sciage du bois. Ce type de moulin qui existe depuis la nuit des temps, surtout le moyen âge, fonctionnait avec la puissance de l'eau. Celui qui m'attire, en Vallespir est en ruine, certes, n'est pas en bord de l'eau, donc l'eau devait y être amenée, et des questions se posent, auxquelles je trouverai -peut être- réponse sur site.  Je sais simplement qu'on peut encore y voir une scie. J'ai hâte d'y être...

Tout est né d'un chemin. Une voie pavée, style voie romaine, à Amélie les bains, fonçant dans les montagnes au rythme de ses fondrières, de ses pavés, de ses lacets, de ses superbes vestiges. Qui ont éveillé ma curiosité. Les cartes anciennes, état major (1821 - 1866), montrent cette voie allant directement à un moulin de sciage, loin dans les montagnes.

Alors en ce matin lumineux, j'entraîne mes amis dans ces montagnes du Vallespir qui pourtant ne sont pas chères à mon coeur! Ma curiosité est le moteur.


Il va falloir gérer le temps et la distance, couvre feu oblige, départ avec déjà la contrainte en bagages!

8 h 39, on démarre. La voie pavée déroule ses lacets, ravages et portions magnifiques sous le couvert des arbres, rares sont les ouvertures, c'est le menu du jour, ce que je n'aime pas en Vallespir, vallée du Tech.

Départ Amélie, contre l'hôpital militaire


Je connais cette voie, la découverte n'est pas au RDV, mais le plaisir de la revoir, oui.

En images: sur un peu plus de 1 km.








                                                                                       

Assise du virage sur un gros rocher


Le sentier relaye la voie pavée, nous allons le suivre sur plus de 4 km. En Vallespir, mes repères sont tous faussés, je ne sais pourquoi, j'ai l'impression de beaucoup plus de trajet qu'il n'existe dans la réalité : est ce ce couvert végétal intense qui m'étouffe tant ?

A présent, sur le chemin, non pavé




De magnifiques sous bois


Nous marchons tranquillement, nous nous arrêtons souvent pour "visiter" : un muret, un point de vue, une bribe de paysage, denrée rare, ou pour observer la végétation, enfin on ne se donne pas pour objectif d'arriver au bout. Ni marcher à fond de train.


Massif du Canigou et Fort les Bains



Amélie les Bains


Ancien pont du chemin de fer
A présent pont routier



Mon but était de voir ce sentier qui avait une telle valeur autrefois : c'est par lui que descendaient les troncs d'arbres, ou les billots destinés à l'industrie et au travail du fer. Je peux au moins me rendre compte qu'il n'était pas pavé, ni large, et que certains passages étaient fort étroits et accidentés. Pourtant les cartes sont preuve formelle: nous sommes bien sur ce chemin là.

Rares places pavées
Le chemin et ses murettes

















Très étroit : lissé par les passages 
ou par les billots ?


Les forêts de chênes verts, quoique denses, sont belles. Et propres. Sans doute furent elles exploitées en charbonnières mais on n'en voit que une ou autre trace. Elles s'accompagnent d'autres végétaux, bruyères, houx et cèdent parfois le pas aux châtaigneraies.  Un ou autre départ de sente se découvre.  Le vent est compagnon de route mais il mugit assez loin et n'est pas gênant, en bas il est à 100 km/h. Il fait quand même frais, le temps n'a rien de printanier même si des violettes frémissent sur le chemin.




On bavarde, on rit, oui nous sommes des randonneurs gais. Cela donne une bonne ambiance qui m'est chère. Moi, l'habituée des randos solos, j'aime aussi la rando/groupe réduit, entre amis, cela a une valeur que je sais apprécier. Le petit chien qui nous accompagne ne dépare pas!


Ph Ch Lamine


Ph Ch Lamine
Ph C Calvet

De longues murailles longent le chemin. Mais au-dessus du chemin comme en dessous, des étages impressionnants de murs de soutènement indiquent combien ces sombres forêts furent aérées et exploitées en cultures. Les photos aériennes des années 60 montrent encore ce quadrillage aujourd'hui enfoui .Paysage fascinant, je marche sur le chemin, large, confortable, quelquefois pavé, sur lequel devaient descendre les charrois, les grumiers d'antan. Dans la forêt silencieuse où le vent et les oiseaux brisent le silence, où la vie n'est que végétale, il suffit juste un peu d'imagination pour entendre, voir, faire revivre, ce passé de quelques siècles. Presque on s'écarterait au passage des mules tractant les billots de bois ! Tandis que les terrasses seraient couvertes de promesses de récolte. Difficile de concevoir cette mort lente qui fit souffrir les gens d'ici.

Des murs partout, jusque très haut (ou très bas) dans les pentes


Murs reptiliens le long du chemin


Photo Christelle 



Sur un escalier de schiste
ph C Calvet
                                                                                        
Un vénérable défunt















Un chêne qui fut terriblement foudroyé (à gauche)


Aujourd'hui le sentier est de randonnée et la foule ne se presse pas, nous ne rencontrerons personne.



Le Saint Sauveur dévoile ses reliefs


Can Felix, 779 m:
on sent l'approche de ce grand mas, qui est devenu un gîte clôturé, quelque peu no man's land. Le sentier le contourne, seule la cloche de la chapelle nous salue.

 Le sentier est incertain, l'heure tourne, on s'installe sur la prairie pour "casser la croûte" au soleil, on est bien. Le demi tour étant programmé, on a le temps. 



Ainsi tout le monde est là

Le retour sera différent, on plonge vers Montalba, sentier peu entretenu, et pour cause ! Mais on n'en tient pas compte, on est vite à la piste forestière qui conduit au mas Félix, et dont des bifurcations s'enfoncent dans les montagnes sauvages.


Il est interdit, il est beau




                                                                                                      

Pont de Montalba sur le Mondony
Presque arrivés au village


Montalba se dévoile, petit village presque désert, discret, comme oublié. Depuis 1962, il est rattaché à Amélie les Bains - Palalda et a la particularité de n'avoir pas de monument aux morts. Montalba existe depuis le 12 eme siècle, il était autrefois situé plus en altitude avec le château du Mont Dony (Castello Monte Donno), il y avait même une chapelle, mais le hameau se déplaça plus bas. Montalba actuel eut aussi un château dont on ne voit plus rien.

Nous faisons, non pas le tour du hameau car c'est impossible, mais une petite incursion jusqu'à l'église qui regarde Santa Engracia.


Carte postale de Montalba



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A présent, le long retour nous attend, 6.42 km, en trois parties.

D'abord un très joli parcours, un ancien chemin qui rejoint la rivière que l'on va traverser à pied sec, ou pas, et de là, le sentier, pavé par places, longe le Mondony. Il y a des fleurs, de l'herbe, des insectes et un pavage qui a résisté à toutes les crues ! Mais aussi le Mondony, en vasques et cascades, superbe, enfoui dans la végétation, impossible de photographier; cependant des petites sentes escarpées conduisent au bord de l'eau . Son affluent le rejoint en cascade. La Ribera del Terme, riche des eaux de nombreuses cascades. C'est une très longue rivière qui vient de la frontière, quelque part entre Falguerona et Nantilla, bien plus longue que le Mondony; pourtant c'est le nom de Mondony qui a prévalu : de nos jours les féministes hurleraient ! 

Vallée du Mondony


Ancien moulin sur le Mondony

Araignées d'eau


En suivant la rivière

La végétation qui m'angoisse



Malgré les crues il a résisté
depuis toujours

2 km plus tard, nous franchissons le Pont de Riubanys, 375 m, (la rivière des bains), avant d'aller rejoindre le long et fatigant sentier, 2.5 km, qui va nous conduire à la voie pavée. 


Pont de Ruibanys


La fatigue va se faire sentir, ce sentier ne cesse, en dents de scie, de monter jusqu'à plus de 500 m d'altitude. Le paysage ne change guère, toujours cette végétation, ce qui nous fait apprécier les rares ouvertures. Le Canigou grisaille, comme le ciel, le vent est présent et froid, nous marchons d'un bon pas, Roxane stupéfie par sa vitalité!


Forêts impeccables

Le puits à neige'

Claude et Josy



On s'extirpe...

Intra muros



Etroit, le chemin

Etroit, le Mondony


De temps en temps elle rassemble le troupeau (nous) quand on s'égaye devant une galerie de mine ou dans l'antre du puits à neige; lorsqu'enfin nous retrouvons la voie pavée, dernier tiers du parcours, 1.3 km. Roxane, pressée de rentrer va choisir de suivre un jeune couple plus rapide que nous et lui emboîte le pas, c'est nous cette fois qui avons du mal à la ramener à nous. Les seuls promeneurs du jour, elle n'a pas eu le choix !

Dans la grisaille on finit notre parcours


Retour au parking, ouf, on est dans les temps! 16.2 km et 720 m de dénivelé, on a bien marché .

Les cloches d' Amélie nous accueillent comme le fit celle de Can Félix, c'est sympathique !

Il ne me reste plus, pour mon moulin de sciage, qu'à reprendre le chemin à l'envers, à partir de Montalba, ce sera bien plus court, j'espère bien pouvoir vous le présenter rapidement!

                                                                                                                           A suivre....


En chiffres

Distance : 16.2 km

Dénivelé positif cumulé : 720 m



Le tracé par Christelle


Le profil par Claude




6 commentaires:

  1. De superbes photos pour une superbe journée. Merci pour toute cette bonne humeur.

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    1. oui une belle journée entre amis. On réitérera, peut être un peu plus à l'air libre, il y a tant à voir.

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  2. Nous venons de te lire, merci pour cette agréable leçon d’histoire et de géographie, beau reportage d’une belle journée. La bonne humeur ne nous a pas quitté tout au long de cette rando, des moments précieux que tu racontes si bien. Roxanne remercie ses sympathiques taties qui ont la même pêche qu’elle. Bises, Claude et Josy.

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    1. Franchement, je me suis régalée! Pas seulement de raconter mais surtout de vivre cette journée. On a encore fort à faire dans ce Vallespir. A bientôt

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  3. Superbe parcours, bravo à tous.
    J'aime beaucoup la mise en page.
    Tu imagines que Louis saute du pont de Riubanys !
    Pour info, sous le pont, il y a un gouffre de 7 mètres de profondeur.

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    1. Les Peytavi décidément sont "fous" ! Hihi. On fait le Bugarach en mode Sibérie, on fait des couloirs impossibles, des trails et la relève est bien assurée. Grand mère crapahuteuse malgré elle a bien ouvert la voie

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