Le temps y est la plupart du temps majestueux, et le rendu des couleurs, donc, aussi. Ce fut le cas hier. L'été y côtoie....l'été presque toute l'année, du moins dans sa partie sud où la tramontane est peut être moins présente.
La balade à moto entre copains signait hier la fin de la saison 19. Ils sont un petit groupe, j'y participe rarement, mais j'avais demandé à mon frère de m'inviter à une sortie. Je crains en général d'être un "poids gênant" en tant que passagère. Juste parce que mon enthousiasme côtoie la peur.
Nous démarrons près de la frontière, par la route du Perthus : première mise en jambes, je me dois d'éclipser la peur. Parce que 300 km nous attendent. La peur, quand il y a longtemps qu'on n'a pas fait de moto, est présente, et j'en ai besoin pour apprécier la sortie. Donc jusqu'au Perthus je ne vois rien, j'ai les yeux clos, je "sens"...j'écoute, je m'imprègne. La route est glissante, une de mes phobies en voiture aussi. Mon frère m'avoue "je n'y vois pas grand chose, j'ai le soleil dans les yeux..." . Bon, si le pilote "y voit rien.." mais il a le pied sûr le pilote. En lui j'ai une confiance infinie, c'est déjà ça.
Après le Perthus, c'est l'Espagne ..euh..la Catalogne qui commence : plein soleil, plein ciel bleu, route sèche. Je me détends, les virages serrés sont restés en France. Alors si je ferme les yeux c'est pour mieux percevoir. Il n'y a hélas en ce jour d'hiver aucun parfum, juste les odeurs d'échappement, de pneumatiques surchauffés lorsqu'on frôle l'autoroute et une odeur corsée d'élevage porcin qui met un coup de peps, une fumée d'automne qui enveloppe Figueras, nuancée par celle du pneu qui aida le feu, les fumées industrielles de Girona et un éphémère parfum de sous bois délavé ! Car je roule toujours visière levée. A la belle saison c'est l'herbe, les arbres, la terre. Mais...Les terres sont belles, vertes, grasses, glaiseuses, inodores, glacées, et la montagne, au loin, enneigée fait une frange blanche.
Paysage de l'Ampourdan près de Figueras (photo du soir) |
Une étape chocolat chaud dans un de ces bars "pompeux" du temps où seule existait la route et où l'Espagne entière était la championne des transports routiers. Ce style de cafeteria est omniprésent dans le pays. J'ai connu cette époque bruissante de vie, on n'aurait pas trouvé une table libre pour loger les casques!
Style Castillo |
Une table pour nous, une pour les casques |
La Costa Brava s'étend sur 255 km de relief déchiqueté de la frontière française, entre Cerbère et Port Bou, jusqu'à Blanes et l'embouchure du fleuve Tordera, au nord de Barcelone. 165 km par la route.
C'est un paradis touristique, nul ne l'ignore et un paradis paysager merveilleux.
La seule que j'ai pu prendre en roulant |
A nous désormais la façade méditerranéenne revisitée façon béton, je crois que personne ne s'attendait à cette invasion du béton. Qui ira, au long du parcours, avec dos d'ânes, ralentisseurs, stops à profusion, dédales de rues à la signalisation peu loquace et secousses dans les bras, les lombaires et autres parties du corps! On y est on y reste ! On attend par ailleurs un bon morceau de route qui sera "sportif" ...s'il n'a pas été bétonné!
Des km de "béton" |
Plus loin d'ailleurs la police fera cueillette...
La route, ici est un ruban sinueux à souhait, courant dans d'escarpées pinèdes, ouvrant sur des vues sur mer imprenables, magiques! Entre Tossa et San Féliu de Guíxols, c'est paradisiaque. Pour la vue et pour le pilotage.
Là c'est plus du béton mais style motard plein pot |
On roule, on double, on croise, des motos, des cyclistes furieux ou effarés, des automobilistes qui se demandent si....et se poussent prestement! Dans un vrombissement de chevaux endiablés des 6 motos. Les pilotes s'éclatent et moi ? Quand même aussi, car je savais ce qui m'attendait! Au fond de moi je me dis que tant que mon frère n'est pas en tête...je suis rassurée !Juju qui a piloté sur circuit est un cas à part!
Sa jeunesse, 30 ans,fait le reste.
"ça balance pas mal, aujourd'hui" chantait France Gall jadis... |
Arrêt repas pique nique dans le village côtier, désert en cette saison de Canyet. Site magnifique: village ancien et urbanisations modernes et luxueuses sur les raides escarpements alentours, dans les pinèdes, maisons sous surveillance, donc nous aussi ?
On a choisi une table étonnante et on savoure. Les 20 ° ambiants en font partie.
Canyet |
En images
Urbanisation |
Chêne liège les pieds dans l'eau salée |
La hauteur des falaises |
Le plus petit port du monde ! |
Chemin plongeant |
La roche d'ici : granit rouge |
La roche dans tous ses états |
Pour mon frère c'est une réussite depuis l'enfance, la moto. Notre père avait une moto comme beaucoup de jeunes des années 50. Alors remettre en service un vieux modèle et le faire crapahuter fut pour le gamin un jeu d'enfant. Plus âgée que lui, je tâtai de l'engin mais mon amoureux, me voyant juchée là dessus, tourna les talons à bride abattue ! Quant à la famille, "une fille ne fait pas ces choses-là" !Je lâchai la moto et gardai l'amoureux...Des décennies plus tard, sur un coup de rébellion, je m'inscrivis à moto école et passai un début de permis. Envers et contre tous. Je ne poursuivis pas. Lorsque la vie à deux me lâcha, il était trop tard pour la moto, encore assez tôt pour la montagne. Et me voilà donc passagère occasionnelle.
Honda 1800 cc et 6 cylindres et son pilote |
La balade continue entre béton, villes parées pour Noël et rares points de vue sur la mer.
Dernière halte à la plage de Sa Riera qui dort tant que pour boire un café ce sera moyens du bord : ils sont organisés, ces nomades-là !
Iles Medes depuis Sa Riera |
En bleu Canyet, en vert, Sa Riera, en rouge les Iles Medes |
Pause café |
Au fond montagnes enneigées du Massif du Canigou |
Coucher de soleil ampourdan |
Oui la fin d'une belle journée où tout fait un peu mal, dos, cuisses et nuque mais finalement ce ne sera qu'éphémère. Cette fois je n'ai pas poussé sur des bâtons mais des poignées de moto! Un peu pareil, non ?
Quoique...en plus rapide et sans bouger.
En chiffres : 300 km
Route splendide en voiture mais à moto le plaisir des cinq sens. Merci pour ce film qui traduit bien le ressenti.
RépondreSupprimerVotre commentaire me plait :pari réussi, savourer et transmettre mes sensations.
SupprimerVoilà une balade qui décoiffe ;-)
RépondreSupprimerMDR, mais le casque même visière relevée tient en place...los pelos
SupprimerLe plaisir l’emporte sur la peur, un beau texte, on sent que tu te régales de parcourir ce lieu paradisiaque.
RépondreSupprimerEt oui, tu as raison et puis avec tous ces garçons c'est tellement sympa, comment ne pas apprécier
SupprimerSuperbe balade. Tu m'étonneras toujours
RépondreSupprimerPuissé-je encore t'étonner..s'il reste quelques cordes à mon arc...mais je crois que j'ai fait le tour. Pour la spéléo, c'est pas gagné !!
Supprimerv
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