Avec de l'eau pour boisson.
Je n'ai pas de GPS mais je possède une cartothèque bien fournie. je suis amoureuse des cartes depuis mon adolescence. Une carte, c'est un livre de lectures, de géographie et beaucoup de rêve.
Une carte, ça se décode avec des symboles, ensuite le paysage se devine, s'imagine, se crée, et la carte devient une invitation. On choisit d'aller ici, ou là, parce qu'il y a tel symbole, tel autre, telle couleur, telle route en lacets, ou un % de pente. Toutes les portes s'ouvrent vers un imaginaire.
Un GPS, c'est impersonnel, cela enlève le charme, la poésie, cela enferme. Je n'en dirai pas plus, je n'en ai pas. Pratique, sans nul doute pour certains.
Donc je vagabonde à la carte.
Ce samedi là, - 12 avril - le but était l' Andorre. La vie en décide parfois autrement, avec ses aléas et ses imprévus.
Mais cette petite incursion en Andorre m'a montré des torrents fougueux, des murs de neige et des montagnes fondantes. Il ne m'en fallait pas plus pour me lancer sur la piste de l'eau.
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Port d' Envalira ( Andorre) 2409 m |
La piste de l'eau, c'était en Espagne que je voulais la parcourir. Dans ma très chère
Sierra du Cadi. En souvenir d'une excursion aux
"Empedrats"(clic) où le bullidor de la Llet était tari.
La Sierra du Cadi, orientée est/ouest, mesure une trentaine de km de long et est un véritable musée botanique et géologique, voire climatique. Elle culmine à plus de 2600m.
Sa face nord (ci-dessous) évoque les Montagnes Rocheuses canadiennes, abrupte, plissée, tranchée d'étroits couloirs et de falaises vertigineuses en un à pic de 600 m; sa face sud est toute en douceur, en déclivité ondulante, est juste "ornée" de la Pedraforca aux pics jumeaux.
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Sierra du cadi, vue aérienne (image internet) |
Un bullidor, je le sais à présent, c'est un lieu où l'eau jaillit en bouillonnant, une source, une exsurgence pourrait on dire.
Là où je n'avais vu que des rocs moussus coule une impétueuse cascade née de la roche à grand fracas.
Un bouillonnement que je vais voir de plus près après une petite escalade sur sentier escarpé. Je ne suis pas au bout de mes surprises. L'eau claire et verte, glacée, jaillit du sol et se jette dans le vide.
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Couleurs et rais de lumière |
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Le bullidor où l'eau jaillit de la roche |
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La " source" avant son grand saut dans le vide |
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Vers l'intérieur du boyau |
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Intérieur du boyau |
Je poursuis mes investigations en voyant de très anciennes traces de rivière là où il n'y a que de la roche et j'arrive à un étroit boyau où je me glisse, la curiosité étant plus forte que la peur. C'est une ancienne exsurgence qui s'enfonce dans les entrailles du roc, mais je ne m'avance que sur quelques mètres que j'éclaire au flash; une caverne avec un trou au plafond, également, une drôle d'odeur et un petit totem de terre cuite complètent le
mystère. Je frissonne de peur et je rejoins l'air libre.
Le petit totem semble être une chouette...
Le bullidor de la Llet ( du lait) se montre dans son aspect le plus laiteux. J'admire, subjuguée. Impressionnante fuite en aval de ce couloir blanc où l'eau s'élève parfois dans les airs.
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13 avril 2014 25 novembre 2013 |
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extraordinaire bouillonnement laiteux |
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Bouillonnement laiteux |
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la cascade de la rivière |
En amont, la rivière paraît tellement paisible.
Je suis tout près de
"ma" Pedraforca et je me laisse aller à goûter à la bière fabriquée ici, à l'eau de source de la Pedraforca. Pas vraiment amatrice de bière, je tiens quand même à essayer : fameuse.
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A l'eau de source de Saldes (Pedraforca) |
La Pedraforca, que j'ai gravie en novembre, superbe souvenir.
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La Pedraforca ( pierre fourchue) |
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Jumelles ? leurs dessins sont jumeaux... |
Nous sommes trois à la dessiner, 2 jeunes filles et moi : c'est amusant, tellement notre technique diffère. Chez elles c'est minutieux et identique! Même technique, on commence doucement par le sommet et ses détails.
Chez moi, c'est à grands traits dans son ensemble d'abord, les détails viennent ensuite.
Avec de l'eau comme boisson? hum...
Mon repas du midi,
au bord d'un canal, ne comporte pas que de l'eau...vous imaginez..
Ce n'est pas qu'une histoire d'eau mon séjour, même si elle est omniprésente !
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Le Sègre |
Plus tard, après un long périple (petites routes grandioses et villages isolés), qui me fait contourner la sierra,
et franchir le Sègre impétueux nourri par la fonte des neiges, j'arrive face Nord du massif, celui là même qui m'attire et me fascine.
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Arséguel et la Sierra |
Dans mes vagabondages, c'est très souvent le feeling qui prime, ainsi sans l'avoir décidé à l'avance, je grimpe vers
Ansovell, village minuscule (8 habitants ) au coeur de la sierra, à 1350 m d'altitude, en dessous des 2569m de la Torreta de Cadi, un des points culminants.
Je vous ferai découvrir ce village dans mon prochain billet, j'ai eu le loisir de le découvrir à souhait.
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Ansovell |
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le soir descend sur la sierra |
Mon but, ici, est une approche de la Sierra en vue de randonnées futures.Je veux "m'attaquer" au monstre.
Sur une indication je me lance en ce 2nd jour à travers la forêt vers le pied de la Sierra et
le bullidor de l'Orri.
Un parcours difficile et beau. Difficile car le sentier est peu tracé, mal cairné (un cairn est un tas de pierres destiné à marquer le chemin en l'absence de marquage). Par 2 fois je rebrousserai chemin pour étudier le terrain, la carte et ne pas me perdre dans la forêt. Je marquerai même mon passage de petits signes afin de retrouver mes traces: Petit Poucet des temps modernes . Je n'ai pas de GPS!
Voici quelques images de mon parcours, excepté les 3 isards que je n'ai pu photographier.
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Monastère La Mare de Deu del Boscal |
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La muraille de la Sierra |
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Géologie |
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Là où naissent les eaux |
La montée est extrêmement raide et, je le sais, en Espagne, point de sentiers en lacets: c'est tout droit !
Un silence ponctué du chant du coucou, pas âme qui vive, le parfum capiteux des pins, mais je me sens tellement bien! Et tellement seule !
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Torrent de l'Orri issu de la muraille ...ou presque |
Enfin je perçois le bruit du torrent de l' Orri, et je suis son cours vers l'amont, jusqu'aux neiges (altitude 1950m) et le fameux bullidor, sorte de marmite liquide jaillissant de terre : étonnant !
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L'Orri |
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La surprenante source ou exsurgence de l' Orri dans un étincelant bouillonnement. |
El bullidor, disent-ils ici.
Et puis, surtout, surtout, il y a cette muraille au pied de laquelle je suis, les pieds dans la neige et la tête dans les rêves ; je suis heureuse d'y être seule, il y a des moments intenses qui ne se partagent pas.
Elle est ardue, enneigée, mais je sais qu'un jour prochain, ici ou ailleurs, je la franchirai.
J'ai appris sur ce site du "bullidor" des choses étonnantes que je vous conterai dans le billet qui suivra.
Alors, on se retrouve à Ansovell, pour une visite hors du temps et du monde, avec Lison ?