samedi 27 décembre 2014

La montagne de Montserrat

La Sierra de Montserrat, près de Barcelone est indissociable de la religion, de son  monastère et des nombreux ermitages qui l'habitent; 
 je consacrerai un billet de mon 2nd blog à cet aspect. Qui mérite le voyage.



Du sommet de la Pedraforca, nov 2013


 Du haut de la plupart des sommets que j'ai gravis, je voyais "flotter" cette majestueuse montagne, comme une île en mer.
L'extraordinaire, c'est que cette sensation d'île ne m'a pas quittée même en train d'arpenter cette montagne absolument magique.
Cette montagne c'est la sierra de Montserrat, proche de Barcelone.
240 km me conduisent en son sein, au pied du monastère.


Le poudingue


Un peu de géologie : il y a des millions d'années la mer occupait cette région de Catalogne et des fleuves assez torrentueux se déversaient dans cette mer, apportant des quantités de graviers roulés qui se cimentèrent entre eux avec les sédiments lorsque la mer s'assécha. On appelle, en géologie, cette formation : "le poudingue".
Il est d'une redoutable solidité.
Toute la sierra est faite de ce matériau.




Arriver au pied de cette montagne que je connaissais à peine est une sensation exaltante.J'en fais presque le tour pour m'en remplir le regard, avant d'y entrer.

Lison est du voyage .
Route autour de la sierra



Antonio Gaudi s'inspira de cette montagne, de ses formes et même des orifices dans sa conception architecturale à Barcelone; cela se ressent indubitablement.
Château ? Ile ? Forteresse ? 
 Je grimpe sur la route qui s'enroule, sans quitter des yeux ces mystérieuses murailles : un seul oeil sur la route quasi déserte, c'est un accès secondaire.







Et puis me voilà sur le parking gardé et payant au pied du monastère : altitude 700 m.

Lové dans cet extraordinaire relief, déjà gagné par l'ombre, je pourrai tout à loisir, puisque j'aurai la permission de dormir sur le parking, de le voir sous d'autres atours.(Vous le verrez sur mon 2nd blog).
Je consacre un long moment à la visite des lieux empreints de solennité malgré la foule qui se presse en cette fin de dimanche du solstice . Un symbole.
Lison et moi nous partirons plus tard dans la montagne à la tombée de la nuit voir s'allumer les lumières de Barcelone et du monastère, en compagnie de deux chattes surgies des taillis.
Barcelone et sa banlieue

Vu depuis la croix de St Michel

Le lieu est paisible, je discute avec un couple catalan tandis que la fillette joue avec Lison qui va démonter son nouveau sac :
bricolage en perspective !
Nous revenons toutes deux dans la nuit quasi noire sous le couvert des arbres sombres.





C'est un fabuleux matin qui s'offre à moi : la muraille ne s'est pas effondrée sur mon lit mais le paysage est ...divin. Je flotte avec "mon île" sur une mer mouvante de nuages dorés.

Comme un tsunami, les flots roulent
dans la vallée

Je suis prête pour partir à la découverte .
Ce sera une bien étonnante randonnée.
D'abord mon imaginaire m'a dit que je grimperais très rapidement le sentier ardu qui débouche sur la crête et qu'ensuite je parcourrai un plateau tabulaire comme j'ai l'habitude dans le Causse.

Alors je traverse le monastère endormi qui flotte sur "la mer" et je grimpe un drôle de sentier. Il suit un ravin très raide qui semble résonner des violentes crues qui savent dévaler à fond de train mais ce n'est pas vraiment un sentier.
C'est un escalier maçonné.

ça m'agace un peu ces marches. Je n'ai pas tout vu !

Le monastère flottant
Surtout que je n'arrive jamais sur la crête...et pour cause...il n'y a ni crêtes, ni plateau, ni vue dégagée, ni vraiment de sentier. Je commence à "désespérer" (mais avec bonheur) sous ce couvert végétal désert : ifs, pins, chênes verts, buis, fragon, lauriers tin. A perte de vue. Avec des trouées sur ces étranges reliefs qui m'entourent. Et des escaliers !!!! Parfois un passage en terre, ou bien un sentier qui emprunte le lit du ravin que je longe, ou bien un passage dans le "poudingue"...Je trouve dingue et fascinant ce parcours car je n'arrive jamais . Le silence est intense.
Cependant, malgré mon rhume les parfums des buis m'assaillent.Et l'humidité du sol fouillé par les sangliers.

Sentier en roc

Sentier dans les buis

Sentier en "poudingue"
Sentier parfois dégagé


Je comprendrai mieux au retour : mon trajet a suivi le fond de cette vallée, sous le couvert végétal; il a suivi le ravin en s'élevant progressivement et ce n'est qu'au dernier moment qu'il s'élève brutalement , dégageant des vues fabuleuses : le dessert après le désert.


Mon chemin du matin, là au fond

Des vues sur la plaine qui entoure la montagne, sur les autres vallées et sur ces étranges reliefs qui recèlent 5000 voies d'escalade. Des reliefs qui cachent des grottes, des avens...ah j'en ai des perspectives d'avenir/découverte ici...


Au bas de la dernière ligne droite, celle qui s'élève vers le ciel et le sommet (Sant Jeroni, 1236 m) deux catalans m'offrent des fruits secs et un moment de convivialité. Comme savent le faire les Catalans.

Enfin, j'arrive, là haut, là où la montagne a cessé un jour de surgir du sol, a cessé d'être érodée, sculptée, travaillée en dentelles , là où un belvédère m'invite à découvrir tous "mes " sommets, même le Besiberri, (mon rendez vous manqué d'août), la mer, la vraie et  celle de nuages. Non je ne verrai pas l'île de Majorque noyée de brume, mais je verrai l'ombre des griffes de la montagne enserrer les collines comme les bois d'un cerf, je verrai ces reliefs coiffés de randonneurs ou d'escaladeurs.
Je saurai aussi que j'ai gravi plus de 1200 marches  !

 Alors faisons une pause, pendant qu'un jeune catalan me donne un vrai cours de géographie mais surtout une superbe invitation à la découverte pour de futures balades.



Voies d'escalade



Ombres portées et la route d'hier


Sommets lointains des Pyrénées

Tenue estivale
Je laisse couler indéfiniment le temps avant de m'élancer dans les marches vers le retour. Un autre chemin, une boucle : cette fois ce sera en corniche et non en fond de vallée (el cami nou).


Les escaliers vers l'infini




Chemin en corniche



Etrange rencontre : la vierge haut perchée
Au sommet de ce piton.

Etranges alpinistes : les chèvres sauvages d'ici
Prouesse d'équilibre
Ces chèvres à la verticale, elles sont vertigineuses, je suis subjuguée. Elles se partagent le territoire avec les sangliers, moins sportifs assurément !


Au terme de mon périple je prends le funiculaire, juste par curiosité : en ayant vu d'en bas l'énorme déclivité j'imagine que ce sera très impressionnant : alors je me mets aux premières loges, derrière la conductrice. Et bien non, plus impressionnant vu de l'extérieur. C'est quant même vertigineux !









Je retrouve ma petite vagabonde : mais qu'est ce qu'elle a à ouvrir ces yeux là ?
Ah bon ? Il y a un chat sur le parking : et alors, Lison ?





Allez, on file, Lison, on a encore 240 km de route !
                 T'en fais une tête !!!




En chiffres 
Route: 480 km
Rando: 11 km environ
Dénivelé cumulé : 700 m environ



(A bientôt sur mon 2nd blog pour Montserrat la Catholique) (clic)

Parmi mes blogs amis, un blog de mon village natal :



mercredi 24 décembre 2014

Heureux Noël 2014








Je souhaite à tous mes amis, à mes nombreux lecteurs, dont certains du bout du monde, un heureux Noël que ce soit sous la neige, dans les montagnes, dans les îles
 ou tout simplement chez eux.

Que ces fêtes vous soient douces et nous fassent oublier  à tous pendant un moment les difficultés 
ou les peines de la vie.

Je suis  touchée par le nombre de visites sur mon blog, par vos commentaires et j'aime à aller visiter vos blogs, parfois avec du retard mais je ne saurais m'en passer : 
c'est riche, varié et vivant.

J'ai aussi une page Facebook sous le nom de Amédine


Joyeuses Fêtes



mardi 23 décembre 2014

La liqueur de Génépi

Tout a commencé là, un matin de ce mois d'août dernier.



Nous étions avec Camille à 2500 m d'altitude, et il m'a montré une plante en me disant : 
" C'est du génépi".
Il m'a expliqué -puisqu'il est botaniste - ce qu'était le Génépi, son lieu de vie, ce qu'on en faisait et surtout comment il était, en Savoie, une espèce protégée.
Dans la foulée il m'a indiqué la recette de la liqueur et j'ai donc cueilli les 40 brins nécessaires à sa fabrication.Il n'était pas encore fleuri bien qu'il fleurisse en août.

Revenue sur le plancher - non pas des vaches car elles étaient à 2000 m- mais de ma maison, j'ai enfermé le Génépi au congélateur et je viens de l'exhumer pour faire la liqueur.

Le Génépi est une variété d' Armoise : Artemisia. Il en existe plusieurs mais celui ci est le "Génépi laineux" (Artemisia eriantha) que l'on trouve sur sols granitiques et siliceux. 
Pas protégé dans les Pyrénées.
Une des variétés d' Artemisia est l' absinthe.

Genepi laineux : Photo web
Fabriquons donc la fameuse liqueur.

Sont nécessaires :
 40 brins de génépi (terminaisons florales)
1/2 litre d'alcool à 90°
1/2 litre d'eau
40 morceaux de sucre.










Et c'est parti pour de longs mois de repos....



En compagnie des bouteilles bleues de ma collection....



dimanche 21 décembre 2014

Mon village : son architecture

Mon village a une histoire comme tous les villages. Il existe depuis le Moyen Age, est mentionné vers le 10 ème siècle mais la page la plus brûlante de son histoire s'écrivit pendant la guerre. Ni la 1ere Guerre Mondiale, ni la seconde. On était trop au sud pour cela.
Non, en 1793/1794, lors des Guerres de la Convention juste après la Révolution Française. Mon village était français depuis 1659, donc depuis 134 ans et une guerre farouche opposa les Français et les Espagnols, je vous en reparlerai dans un 3 eme volet.
Le village fut incendié par les Espagnols, des traces subsistent dans les vieilles maisons de quartier  18 eme siècle.

C'aurait pu être ainsi le 4 avril 1794...
Mais le clocher n'était pas construit....

Précédemment le village était enroulé autour de l'église et on suppose qu'il y avait une "cellera", périmètre de sécurité inviolable pour protéger les récoltes.




Autour de l'église, dissimulées entre des murs, dans un étroit passage, des arches de brique se succèdent, personne ne sait ce que c'était : les écuries des Rois de Majorque qui avaient leur résidence d'été ici ? Leur Palais d'été ? Elles sont inaccessibles mais leur configuration, parfois au ras du sol, montre que des comblements de terrain ont eu lieu depuis, une restructuration de l'espace qui devait être très en pente alors.

Un mur d'enceinte, daté du 14 eme siècle, fait en pierres de la garrigue, enserrait un périmètre dont on ne sait à quoi il servait : protéger les récoltes ? Il a été démoli au gré des constructions au fil des siècles, il en reste une petite partie mais sa construction est particulièrement harmonieuse.


Le village doit son unité architecturale aux fin 19 eme et début 20 eme. de nouvelles techniques de construction apparaissent ; avec de nouveaux moyens financiers dus à l'expansion de la vigne et du vin.


Le matériau est local :
Le même


L'art de l'arrondi en coin de rue pour
le passage des charrois



La brique occupe une place importante dans la façade : on la nomme "cayrou" (44 cm x 22 cm)


 Elle est grandement utilisée en chaînes d'angles (angles droits, obtus ou aigus et même ...en quadrature du cercle )





Encadrement de fenêtre en cayrous et chaîne d'angle


Corne de sorcière en faîtière




Chéneaux en terre cuite vernissée



Maison restaurée
Le luxe, à l'époque , était de crépir les façades.
Le luxe, de nos jours, est de les décrépir...ce luxe a un prix...J'avais présenté cela dans mon blog (clic)

Une grande cave à vin début 20 eme
Souvent, entre les pierres, scellés dans le mortier on incrustait des tessons : les rouges sont des fragments de cayroux en brique, les noirs sont des scories de forges catalanes . Cela a un joli côté décoratif, certes mais le but était de tirer l'humidité des murs. Car le village est bâti sur une nappe d'eau à faible profondeur.


Les ouvertures sont cernées de brique décorative.





Certaines demeures ayant un petit jardin se voyaient nanties d'un petit portail fort sympathique et élégant.




Quant aux toits, des corniches décoratives les habillaient avec plus ou moins d'emphase; cela reste un élément fort de l'architecture pour qui sait lever les yeux !


Je vous passe plein de détails ; il y en a à chaque coin de rue : heurtoirs de porte, dates, niches avec ou sans Saint Patron.Cornes de sorcières ou "peu de gall" (pied de coq) nommées aussi "espanta bruixas" (effraie sorcières).





Cependant je ne saurais taire les fenêtres et surtout leurs volets typiques 19 eme siècle : la face intérieure aux planches verticales et la face extérieure horizontales.

 La région, jadis, était infestée de moustiques à cause des lagunes littorales, des ruisseaux et autres eaux dormantes des étangs assez éloignés. La moustiquaire n'était pas un luxe. Chaque ouverture avait la sienne, répondant à des normes de construction.







Je ne vous présenterai pas les balcons en fer forgé, industriel ou fait main, mais une mention est faite pour les chénaux d'écoulement des eaux en terre vernissée, qui se fabriquent toujours, sont onéreux et durent le temps d'une rose...leur partie basse est volée avec régularité !


Je conclurai en disant que le village est bâti sur une colline elle même posée sur une nappe phréatique . Il y avait une demi douzaine de puits collectifs dont un seul subsiste et presque chaque maison avait son puits personnel, les caves à vin ayant cet appareil de façon indispensable...pas pour mettre de l'eau dans son vin !
J'en avais présenté un : mon puits (clic)
C'était le secret de mon jardin.


Et puis s'il y a plein de secrets dans mon village, comme "le souterrain" que peu ont eu l'honneur de parcourir, il y a aussi quelques mystères dont celui des ouvertures murées depuis la construction des maisons au 19 eme siècle.


C'est quoi le mystère ???

Allez, je vous le livre : les impôts étaient calculés au nombre d'ouvertures...alors , en attendant 
des jours meilleurs, on les construisait mais on les murait.
Cette maison construite au milieu du 19 eme a vu ses fenêtres enfin ouvertes fin 20 eme...

Vous avez bien parcouru les rues de mon village, virtuellement.
Un jour peut être vous viendrez à Tresserre, dans le département des Pyrénées Orientales,
tout au fond de la France, là où la montagne épouse la mer...

Il vous suffira juste de lever les yeux...