Préambule: près de
Castres, dans le sud est du département du
Tarn,
le Sidobre est une région extraordinaire. Un massif de granit vieux de 800 millions d'années, d'une superficie de 500 km2, rongé par l'érosion en surface, offre dans d'immenses forêts très escarpées, un panel de roches aux formes étonnantes; quelques circuits pédestres permettent de les découvrir, les autres garderont leur mystère... L'exploitation du granit en nombreuses carrières fait de ce site le 1er producteur d'Europe.
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Cache cache dans le Sidobre |
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Pour saisir l'âme du Sidobre, entre légendes et réalité, il faut prendre le temps de le sillonner en tous sens et de l'écouter, car il a une voix.....
Je vous y emmène, c'est à 250 km de chez moi et je ne le découvre pas, je le re découvre.
Juillet 2015 m'y avait conduite après une fracture d'orteil, je l'avais sillonné nu pieds, c'est confortablement chaussée cette fois que j'y promène une jambe blessée.
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Il y a peu de touristes en cet août 2020, cela me permettra d'entendre le Sidobre. Et je serai gâtée : la chanson du vent dans les immenses futaies de hêtres, chênes, pins et châtaigniers, la chanson de l'averse là haut sur la cime des arbres, dont les gouttes ne parviendront même pas jusqu'à moi, le silence du brouillard épais qui masque le toit de verdure, ou le grondement sourd d'un torrent enfoui sous des tonnes de rochers, répercuté comme s'il se fut agi d'immenses chutes d'eau.
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Au fond d'un "puits" dans la Rivière de rocs |
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La Rivière de Rocs |
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Cachée sous les rochers au fond du puits |
Je lis en ce moment sur l'Amazonie, j'y retrouve une atmosphère. Sans le bestiaire amazonien, sinon celui fantastique, de certaines formations rocheuses : l'oie, l'éléphant, et ceux que ma propre imagination crée. Les serpents ne sont que racines et branches ou troncs tordus afin d'éviter un rocher gênant...les arbres ne réfléchissent pas toujours !!
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L'oie |
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L'éléphant |
Quelques aboiements et cris d'enfants sont intempestifs et corrosifs dans ce royaume hors du monde. Les bois sont parfois pour moi seule.
Une lumière verte, glauque, danse sur le Sidobre, enfermée dans le mur végétal du sol au plafond. On monte, on descend, sur un sol parfois glissant (j'en ferai les frais en m'étalant), glissant par la décomposition du granit en sables , par les racines entremêlées et la forte déclivité.
Le paysage est réduit, le mur végétal est un épais rideau.
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Né dans la roche |
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On épouse la roche |
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Extraordinaire parallélisme |
Cela confère davantage une part de mystère. C'est beau tout simplement. le schiste, ami et voisin du granit ne se fait pas oublier, en falaises feuilletées ou en dalles de sol des ruisseaux, quand le granit a bien voulu rouler ailleurs. Alors ce schiste noir, austère , strié parfois de couleurs plus vives en lanières et rubans paraît intrus. Pas commode si on l'emprunte pour remonter un cours d'eau. Le granit est grenu, hérissé de grattons de quartz, on pourrait l'escalader sans souci sur des prises minuscules . Erodé ou vif, il reste grenu.
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Petit personnage |
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Couverture végétale |
Les rocs sont couverts de mousses où, parfois, Dame Nature a installé son propre imaginaire. Un petit personnage m'a fait un clin d'oeil au passage, je lui souris et l'emporte dans mes images. Sa vie est éphémère.
Je n'ai parcouru qu'une infime partie du Sidobre à pied (mais une bonne quinzaine de km par petits tronçons) et j'ai rencontré quelques personnes évoluant là dedans, pas incertains, chaussures de plage, s'appuyant sur un bâton de fortune ou sur autrui, chancelantes...il faut un pied de randonneur.
Et de solides épaules !!
Ma plus belle promenade ? Celle, déserte, sous la pluie et la bruine, le long du
Lézert enfoui sous des tonnes de rocs, une rivière de roches, sous laquelle coule une rivière d'eau avec un grondement de caverne et de début du monde. Une rivière à laquelle on accède avec difficulté mais, cachée entre les rocs, lorsqu'elle veut bien venir respirer un instant en surface, quel bain on y prend! Quelle délectation. On se rhabille toute mouillée et cette fraîcheur accompagne la marche et les sauts de roche en roche, que je m'autorise encore !
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Et au dessous coule une rivière |
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Etrange photo sous les rocs, mon image s'évapore...effet du Diable ? Grotte Saint Dominique |
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Il était pourtant au ras du sol le Diable ! Je l'ai rencontré |
Les sous bois ne retentissent plus du bruit des carriers mais portent les stigmates de carrières abandonnées.
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Bloc taillé abandonné |
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Meule abandonnée sur site |
De véritables "usines",en périphérie, exploitent aujourd'hui ce granit expédié dans le monde entier et emploient 1200 personnes. Les trottoirs des Champs Elysées, Le Worl Trade Center de Shangaï, l'aéroport de Francfort, le métro de Singapour en sont une vitrine....
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L'eau est présente, une rare source, un ruisselet égaré, des rivières bondissantes, l'averse qui ne gâte rien, et un lac, celui du
Merle, où, sur des eaux (du Lignon) parfaitement immobiles, les rochers émergés prennent un drôle d'aspect ...est on encore sur terre?
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Lac du Merle créé en 1875 par un propriétaire terrien |
Enfin il y a celui pour qui je suis venue aussi :
l'Agout, la rivière d'ici. J'ai choisi
Roquecourbe pour deux nuits, un lieu tranquille dans le village, avec vue imprenable et discrétion assurée quoique au beau milieu du village de 2000 âmes. Juste contre ce fleuve qui fait, à Roquecourbe un long méandre et finit par se croiser à quelques mètres de lui-même. J'adore les méandres.
Pour le comprendre, il faut s'y pencher avec attention. Et même le regarder du ciel.
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En bleu le trajet du fleuve |
Moi , auprès du joli pont, cachée entre eau et vieilles maisons, je l'écoute deux nuits durant, une petite chute lui donnant sa musique , rythmée par le métronome des cloches proches qui osent s'exprimer la nuit...quel délice....
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Roquecourbe |
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Eau et vin séparés
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Mais...à la table de mon restaurant panoramique
je ne mélange jamais eau et vin !
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Hôtel restaurant , en bord d' Agout |
Burlats, village voisin au joli nom de cerise m'accueille pour une nuit, près d'un joli pont et de l'Agout qui, cette fois, coulera dans l'autre sens par rapport à mon lit.
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Burlats |
Avec une musique puisqu'un petit rapide le bouscule. L'Agout est fait de plans d'eaux molles et de rapides sautillants. Les cloches de Burlats sont muettes la nuit et la zénitude moins belle que sous les tilleuls de Roquecourbe. Par contre le village est magnifique et vaut d'être parcouru en tous sens.
Entre Burlats et Roquecourbe, mes deux hôtels, la route suit scrupuleusement l'Agout et je consacre sur un îlot rocheux un moment au dessin et à l'écriture. Ce petit voyage est censé reposer ma jambe....en lieu et place du joli 3000 m pyrénéen auquel j'ai du renoncer.
Prochain article : de l'eau en cascades
Toujours un plaisir de ressentir tes émotions de voyage
RépondreSupprimerMerci Dom ! La suite c'est Allo ...euh...à l'eau
SupprimerDe jolies images, de jolis villages tout à ton image. Une jolie découverte à travers tes écrits. Tout ce j'aime Le bonheur dans la simplicité. Bises
RépondreSupprimerMerci c'est joliment exprimé et à coup sûr ça te plairait mais c'est pas loin...Bises
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