vendredi 10 janvier 2025

Villefranche de Conflent, mille nuances de gris

 J'ai prévu une randonnée que j'ai déjà manquée deux fois, la première pour cause de...grisaille.

La seule couleur du jour 

Cette 3 eme fois sera t'elle la bonne ?  Hélas, au réveil, à Villefranche, le gris rase les murs, estompe les falaises, mouille le paysage du ciel au sol et cache le Roc Campagna (1134 m) qui affiche d'habitude des superbes teintes ocrées sous un ciel bleu. C'est du calcaire, ce calcaire de Villefranche qui sait si bien voisiner avec le marbre rose "fleur de pêcher" comme avec le marbre  rouge "griotte". 


Le Roc Campagna, 1134 m, par temps clair


Le "griotte"



Le "fleur de pêcher"










On est bien loin du gris. Ce gris qui ce matin fait l'unanimité du sol au plafond. Très bas le plafond.



Christophe me rejoint, attiré par le Campagna, mais la météo n'est pas sereine.

Nous, davantage. On part comme si...de toute façon les chemins ne manquent pas dans le secteur. Cependant ils vivent par la beauté du paysage, et les points de vue superbes que l'on découvre depuis ces sentiers en balcon.

On modifie les plans et on s'élance sur le vieux chemin montant à Notre Dame de Vie, lieu prisé, perché comme un nid d'aigle au coeur des falaises.


ND de Vie et son cadre par temps lumineux


Le chemin se noie dans la brume, nous on disparaît entre rail, route, bruyants mais invisibles et falaises tout aussi invisibles.

Le décor ambiant

Alors quand il n'y a rien à voir au loin, des tas de détails se remarquent dans l'environnement réduit  à sa plus proche expression : ainsi je remarque des murettes qui, déjà, me lancent un appel muet. La montagne a envie d'être bavarde, je le sens.

Dans tout ce gris quelques éclats de marbre rouge et des gros bouquets de globulaires buissonnantes bleues donnent une touche colorée.

Les globulaires

La brume ne s'estompe pas, reste aussi dense sinon plus, alors on commence à ourdir quelques projets.

D'abord ND de Vie et la grotte. ND de Vie, datée du 17 eme S est close et le grand Christ a été ôté après vandalisme. C'est affligeant. Nous montons jusqu'à la grotte, même le câble qui assure le passage escarpé est poisseux d'humidité. L'ouverture donne sur un gris uniforme alors que la vue y est magnifique sur la vallée de la Rotja.


Gravé dans le marbre

                                                                                               

ND de Vie


La grotte fut un ancien lit de la Têt, voilà 5 Millions d'années. Toutes les falaises sont percées de grottes qui ont donné aux archéologues des tas de renseignements et de dates. Une thèse a même été rédigée. Cette grotte se trouve à 200 m au dessus du niveau du fleuve, lequel en cet endroit est affecté par une résurgence, gageons que dans des millions d'années une nouvelle grotte s'ouvrira au jour.

La grotte de ND de Vie



Le point de vue du jour

Le point de vue des beaux jours

A présent, se pose la question : qu'allons nous faire? 

En aval de la grotte, un sentier part en direction des hautes falaises puis va rejoindre le sentier de randonnée montant à St Etienne. J'avais parcouru ce sentier deux fois, la 2nde fois je l'avais trouvé nettement amélioré car il avait été un peu entretenu; mon 1er passage tenait du parcours du combattant, et ce n'est pas un vain mot car c'est un ancien chemin militaire. 

En quelques images :






Les murs ont aussi fonction de pare éboulis






Et ils les arrêtent bien les éboulis



La couleur omniprésente, gris habillé de taches bleues

Cette montagne est emplie de vestiges de chemins et de sites de garde et d'observation : le verrou de Villefranche fut un site extrêmement fortifié, initié dès la fin du 11 eme siècle.

Nous montons le long de ce sentier, j'ai juste envie de vérifier l'existence d'un hypothétique embranchement. On chercherait en vain ces chemins sur la carte IGN alors qu'un étage plus haut il en existe un autre presque totalement désaffecté lors de mon passage en 2021.

On bavarde tout en grimpant, car le chemin est sportif. Mon regard se cantonne à mon plus proche paysage soit les chênes roux et les murs gris. 


Triste décor

Ah ces murs, anciens ouvrages militaires à la facture si particulière : pierres bien équarries, posées dans un agencement rigoureux, les interstices comblés de petites pierres permettant le passage des eaux de ruissellement ou d'infiltration, murs retenant les éboulis ou formant l'assise du chemin dans une pente impressionnante. Ils sont la curiosité du jour. Des falaises on ne verra que de la ouate, du vide on ne verra rien mais on le sait, et des arbres sur fond gris, accrochés aux falaises on ne verra que des estampes japonaises.

Falaise avec petits cours d'eau devenus abris pour oiseaux




Accrochés à la falaise en mode estampes



Mur avec décrochement, pour solidité ? 

Le chemin militaire était étroit mais solide













Cette balade dans la brume avec un horizon réduit à quelques dizaines de mètres a une certaine féérie. C'est un autre regard, en connaissant ce qui se cache derrière l'écran gris.

On rejoint alors un autre chemin militaire, celui qui va du Fort Libéria vers le Pla d' Auça ou la chapelle de St Etienne de Campilles, seul vestige d'un village mort. Nous redescendons simplement sur Fort Libéria, sans point de vue et dans une humidité constante, il n'y a pas d'attrait particulier.

Chemin militaire, 19 eme S, celui ci, et ses plate formes d'angles (une dizaine au total)


Vue de dessus




L'angle vu du bas



La beauté et l'ordonnance magnifique des rocs taillés
(la carrière est proche)


J'en profite pour montrer à Christophe des vestiges de chemins, l'emplacement de cultures de vignes, les canalisations brisées amenant l'eau à Libéria ou le chemin de débardage conduisant le bois des forêts Royales puis Impériales jusqu'à Villefranche . Tous ces chemins dans les taillis revêches que j'ai parcourus voilà deux ou trois ans. Tous mes souvenirs remontent et l'envie de reprendre mes explorations aussi.

Voici que qu'on aurait du voir....



Ainsi, une troisième fois le Campagna m'aura fait faux bond : bon sang, ce n'est pourtant pas le Nanga Parbat et ses 8125 m !!

De retour à Villefranche, finalement on n'aura parcouru que du sentier militaire et on n'y aura vu que du gris.

C'est promis, on y reviendra.

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