jeudi 8 mai 2025

Conflent (66) : deux Fornàs pour "un four" complet !

 Selon certains etymologistes "fornas " signifie grand four. Pour d'autres, c'est fournaise. On a forcément la fournaise dans un four mais point besoin de four pour l'inverse, j'ai pu le vérifier à grande suée.


Face au Fornàs

Sachons quand même que dans mon département quasi tous les lieux cadastraux pourraient alors s'appeler "Fornàs". Et de plus en plus. 

Je cherchais un grand four. Mon estomac eut préféré des petits fours; le grand four ne me nourrit que d'espoirs et de déceptions.

En tout cas mes recherches se soldèrent par un four complet, autrement dit un bel échec.

Echec côté trouvailles car pour le reste, quels moments de pur plaisir sont pour moi ceux des recherches, même en des endroits invraisemblables pour les gens d'aujourd'hui, pas pour ceux d'autrefois.

Et comme la Nature m'aime autant que je l'aime, ces derniers temps elle m'offre des fours (des vrais ), partout, en Hérault, en Espagne, là où je n'en cherche pas.

Revenons à nos Fornàs .

Ils sont deux sur le cadastre, à se regarder, chacun d'un côté de la Têt, rive gauche, c'est Canaveilles, rive droite, c'est Thuès entre Valls, aux portes de la Carança. Celui de Canaveilles semble regarder un peu plus droit dans les yeux celui de Thuès, mais actuellement celui de Thuès, aveuglé par la végétation n'y voit plus rien. Il faut alors se déplacer un peu, ce que ne peut faire que le piéton que je suis.

Ils ont presque un point commun : celui de Canaveilles est dans un secteur de pente sévère. Celui de Thuès dans un secteur de pente abominablement sévère. Mes jambes peuvent en témoigner !


El Fornàs de Canaveilles vu de la corniche


El Fornàs de Thuès vu depuis les hauteurs du Fornàs de Canaveilles
Mon terrain de jeu du jour...un peu escarpé


L'un compte 250 m de dénivelé positif pour 400 mètres linéaires, l'autre 400 m de dénivelé positif pour 500 m linéaires.  Autant dire que j'ai eu le nez dans les fleurs, les mains sur le gispet, que je n'ai pas tout parcouru, et que mon parcours fut en zigzags. Je doublai au moins le trajet.

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En une sortie éclair de ce mardi 6 mai, je prends la route pour 75 km, à refaire en sens inverse si je survis; l'approche sur site est heureusement très brève, et je ne suis même pas sûre de parvenir à grimper ce triangle vert. Car la végétation est une chevelure ruisselante d'un vert tendre. Hêtres et chênes pubescents, on est dans une fournaise orientée au nord, soit l'ubac. C'est pourquoi je ne crois pas à leur fournaise, avec la fraîcheur de la Carança qui mugit tout en bas.


La Carança

La corniche













Les gorges fascinent toujours autant, le chemin en lacets aussi et je me dirige vers la corniche à droite, je tourne le dos au canyon. Sur ma droite le Fornàs plonge sans pitié vers la rivière, sur ma gauche, il monte impitoyablement au ciel. J'avais l'option de gagner le ciel par un sentier et descendre droit dans le Fornàs. J'ai choisi l'inverse car je sais qu'en haut il y a plein de barres rocheuses et je ne savais pas si elles seraient fréquentables.

J'ai fait le bon choix. Mais rien ne m'empêchera à présent d'aller "jeter un coup d'oeil" depuis en haut et, peut être....

Bon, me voici à pied d'oeuvre. Je quitte le sentier, laisse un petit repère au cas où il faudrait venir me récupérer et j'aborde un tendre pierrier à qui je fausse vite compagnie, un sous bois de chênes me tend des bras noueux vêtus de vert tendre, sur un tapis aussi vert qui recouvre des cailloux. 

Abord du sentier : le chemin que je vais prendre, oups, c'est pas tendre

Chaque arbre semble être à l'étage au dessus du précédent, si la couleur est annoncée, la teneur de la pente aussi.


Les arbres en étages

Que dire sur cette montée ? Je zigzague, je cherche un four dont je sais qu'il est improbable, un four  à quoi d'ailleurs ? Un four à bois peut être mais les places charbonnières sont au sentier et même, une fort importante, au dessous, bien abritée par des rochers au bord du vide. Peut être est ce là le mystère du grand four ? 

Le parcours 
Même chose


Pierrier vers l'aval
Vu autrement


Une idée de la pente vertigineuse

Non je monte par pur plaisir. Je visite les pierriers, les barres rocheuses latérales, je m'ancre sur le sol trempé et je caresse parfois du nez des plantes fleuries. Rien n'est hostile, ni les oiseaux qui s'époumonent, ni le sol qui retient mes pas, ni les cailloux qui ne roulent pas, mais lorsqu'un détale, il ne s'arrête plus. Les lieux furent par le passé, à n'en pas douter, théâtre de déforestation pour la fabrication du charbon de bois nécessaire aux forges catalanes; un secteur assez proche se nomme "Solà dels meners", les mines, ou les mineurs. 

le nez dans les fleurs

Mimétisme d'inclinaison




A l'abri du roc



La partie finale est encore très longue et emplie de rochers

Quand les arbres me le permettent les vues sont superbes et, à l'altitude 1270, je choisis le demi tour parce que les barres rocheuses se sont invitées au menu partout sur plus de 100 m encore, et que se faufiler entre elles est peut être possible mais c'est dangereux. Au niveau parcours et au niveau orientation. J'ai bien fait de ne pas descendre depuis les crêtes!


Les hauteurs de Thuès

Un coup d'oeil sur l'autre Fornàs









Thuès entre Valls

Je me retourne et là, instant de doute : "mais comment je vais descendre ça ??". C'est vrai que c'est raide. Mais en zigzagant, en me tenant à un ou autre arbre, en plus de mon bâton, je parviens sans encombre et avec surprise au chemin: déjà ? Parlons des arbres : surtout regarder où on met les mains. La spécialité, c'est le petit tronc mince qui s'arrache : il est mort. Ou celui truffé d'épines qui lacèrent. J'ai même trouvé un vrai tronc d'églantier d'au moins 3 cm de diamètre. On observe la flore malgré soi.


Voilà la pente, vue de la corniche

Sur le chemin je vais faire un brin de trajet en corniche pour le plaisir de la vue, pour celui des couleurs et lumières; un tronçon moins fréquenté que l'autre mais éblouissant.









Vallée de la Carança, vers le Col de la Révolution


La corniche, le petit tunnel et les hauteurs de Thuès que je connais si bien

 Il amène directement au parking mais une idée me vient, et si j'allais un peu visiter "le Fornàs d'en bas " ? C'est à dire en aval du chemin. Je ne vais pas me lancer dans la pente descendante qui fuit vers la rivière sur plus de 100 m de dénivelé, en un vertigineux toboggan.


Le Fornàs d'en bas soit vers la rivière

Puis au fil des virages de la descente, je m'aventure dans cette partie semée d'embûches, des barres rocheuses, des pierriers , j'aime certes, mais à un degré d'usure des jambes, c'est à consommer avec modération. Et même pas engageant comme décor. J'ai oublié depuis longtemps l'improbable four !


les lacets du chemin


Le Fornàs, partie basse vers la Carança



Et vers le haut, c'est très ardu

Arrivée à la rivière toujours mugissante, par le chemin, je vois qu'une solide falaise lisse interdit à quiconque de filer du Fornàs à la baignade sinon par cordes ou vol plané. 


En bas, la rivière : des falaises


Impossible d'accéder à la rivière
Tout en haut de la photo les confins du Fornàs, vers le ciel

 Je croise des randonneurs, à leur question je réponds vaguement que je viens de "hors sentier", si on est un brin folle, ne l'étalons pas ! J'ai d'ailleurs pris soin de me changer en statue de sel dans mes rocs pendant qu'à quelques mètres passaient les insouciants sur le chemin. 

Raconter que je cherche un four ? Qui le croirait ? Un grand four ? Ils sont 9 villages du département, de la mer à la montagne à avoir leur Fornàs, sans compter d'autres dérivés du mot, parfois dotés d'une précision supplémentaire, la nature du four, ça aide. Et puis, il y a la Catalogne de l'autre côté de la frontière qui a son lot, également, de toutes sortes de "Forns", De quoi faire de beaux voyages et de beaux rêves.

Allez, plus prosaïquement, les 75 km du retour se feront bien dans ma voiture, j'ai juste une chute au compteur et des images plein les yeux car je me suis repue de la vue de tous les lieux qui me furent chers ces dernières semaines.


Le trajet et la zone d'investigation














4 commentaires:

  1. Bonjour Lison,
    Je vois avec plaisir que tu ne baisses pas les bras et que ton entousiasme et ta curiosité naturelle te poussent à te dépasser continuellement. Bravo! ne change rien! c'est toujours avec grand plaisir que je prends connaissance de tes aventures et de tes explications. C'est toujours un régal! la madeleine de Proust pour moi! Avec des personnes comme toi, on peut enfin se réconcilier avec le genre humain! respect et admiration!

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    1. Merci notamment pour ta dernière phrase qui m'a amusée ! J'ai la ferme intention de continuer tans que mes jambes auront la ferme intention d'y contribuer. J'aime la curiosité, le plaisir de la découverte, de la nouveauté, que les sentiers balisés ne m'offrent pas bien qu'ils soient le plus souvent bien utiles et savent ouvrir vers une découverte alors je "suis obligée" de leur fausser compagnie. Mes randos sont un jeu de pistes, une course aux mystères sans lesquels je m'ennuierais peut être. Merci Michel. Dans ma plaine, au travail ou en ma maison, je suis en attente de retourner courir les bois.

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  2. Merci beaucou, très intéressant, bisous Lilly

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    1. Merci Lilly, tu me suis fidèlement, c'est sympa

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