mardi 12 juillet 2016

Danser sur les crêtes...à plus de 2700m de hauteur

S'il est des histoires étonnantes, dans la vie, celle de ce lieu l'est . Certes c'est l'histoire d'un coup de foudre de moi à lui. Mais c'est aussi une autre histoire, plus troublante.... Un jour, voilà deux ans, j'allai "visiter" un sommet espagnol à plus de 2900 m d'altitude et je découvris un panorama somptueux de montagnes, côté France. Dix jours plus tard je décidai d'aller à la rencontre de ce somptueux site. Mais voilà, peu de jours avant, une solide contrariété me rendit si vulnérable que maladroitement je chutai, sur le parking de montagne et me retrouvai un peu plus tard, à l'hôpital, nantie de trois points de suture à la tête. Cela ne m'empêcha pas de partir le lendemain en randonnée, mais le pied moins ferme et la tête brinquebalante, je revis mon trajet à la baisse. Il demeura costaud toutefois au vu de mon état. ( Pic de la Mine, 2683 m , clic ici)

Ce projet revint me visiter l'autre jour et je décidai de le réaliser enfin. C'était sans compter avec une même contrariété, sur le même motif ! Je redoublai de prudence et c'est avec un brin de superstition que je "m'envolai" pour aller "danser sur les crêtes". Entre 2700 et 2814 m d'altitude. Dans un site grandiose.

Il est , aux confins des Pyrénées Orientales, Ariège et Andorre, un site nommé le Puymorens : un col d'altitude, une station de ski et de grandioses montagnes, que je commence à bien connaître.

La randonnée du jour, en solo, promettait de beaux horizons mais aussi une bonne condition sportive.


Le but du voyage ? Parcourir ces fortifications crénelées

Hélas, comme pour ma précédente randonnée, je me traînai dès le départ, malgré toute ma bonne volonté et mon envie : rien! Le pas lent et lourd d'un boeuf, le souffle coupé, des vertiges, je n'avançai qu'à moitié de mon rythme normal. Un rien oppressée, superstition oblige, tentée par le demi tour, j'avançai.



Lever de soleil derrière les 2547 m du Tossal Mercader
Ni le soleil qui vint me saluer, ni la perspective d'un décor somptueux n'arrivaient à me faire avancer. Seule la volonté...Dans ce désert de roches et de rhododendrons quelques marmottes joufflues émettaient de longs sifflements, seule trace de vie. Et j'avançais...Hors sentier, longeant la moraine latérale de ce vaste cirque glaciaire encombré de rocs, barré d'une lointaine moraine frontale que je rencontrerai plus tard, un pas après l'autre, le regard perdu dans ce décor un rien sinistre, mais envoûtant, je montais.

La moraine latérale, rive gauche
Joli sentier


Un chaos rocheux impressionnant et pourtant on peut le traverser

Un troupeau de chevaux sympathiques et chaleureux m'encouragea et, chemin faisant, déviant mes pensées vers des sujets motivants, je parvins à la Basse de la Vignole, l'objectif minimum était atteint.



C'est un petit lac vert, peu profond, le seul élément liquide dans un univers tout minéral, donc apprécié d'autant. Je m'aperçus alors que mon énergie était revenue . J'étudiai un moment le terrain : deux sentiers étaient possibles . Le premier, long et facile, permettait d'arriver au col par un grand détour sans surprise. Le second fort aléatoire poursuivait jusqu'au fond du cirque et là ?


Basse de l'orri de la Vignole : 2494 m
En bleu le trajet normal, en rouge, le mien


"Piste de cirque"


Mystère...J'optai pour le sentier du fond du cirque, qui n'existait peut être pas et serait donc à..inventer. Pourquoi pas ? Rien ne me semblait impossible. Et la pente semblait accessible à mon niveau.
Effectivement quelques cairns sans grande cohérence m'invitèrent à me débrouiller et j'attaquai 200 m de pente raide, sur un sol d'éboulis instables à souhait. Je m'approchai au plus près de la paroi, posant mes pieds sur l'herbe plus stable; j'enfournai mes bâtons dans mon sac, les mains étant plus utiles qu'eux et, toute énergie revenue dans cet exercice que j'aime , m'accrochant de ci delà à la paroi, Je grimpai sans effort, me retournant pour voir rapetisser le cirque et je me retrouvai étonnée au sommet. .


Montée très raide

Un aperçu de la pente et de mon chemin dans l'herbe, contre les rochers

En chemin : faut rien lâcher, tout dégringolerait 
Altitude 2722. Un vaste panorama s'ouvrait devant moi, et je fus accueillie par un immense troupeau qui pressé de me saluer, se jeta "comme un seul homme" sur la clôture électrifiée m'apportant ainsi une réponse..."Comme un seul homme" le troupeau s'enfuit en bêlant.


Au col : 2722 m . Vallée de Campcardos en fond
Et je restai seule sur les crêtes déchiquetées, ouvrant comme de grosses mâchoires aux dents noirâtres sur une bouche grise dans laquelle luisait un bonbon à la menthe : le Cirque de la Vignole, où je marchais il y a peu, petit point perdu dans un océan de rocs. J'étais arrivée ! Au sommet de mon rêve.

Basse de l'Orri de la Vignole surmontée par le Pic de la Mine : 2683 m
J'avais devant moi un avenir de découverte et de bonheur : je pouvais danser sur les crêtes ! Nulle vie, sinon des moutons partout , un lointain berger et son chien. le grand espace pour moi seule et qui fait que j'aime la montagne en solo. Regrettant parfois un partenaire qui me rendrait la progression plus reposante!

Danser sur les crêtes


Car randonner seul (e) demande de l'énergie, de la vigilance, une bonne lecture du paysage, de la carte , des nuages, une prudence accrue et une prise de décision qui exclut la tergiversation. Oui c'est une école, un défi. Davantage à mon âge.

Par chance, ma famille indifférente à mes activités de montagne donc ignorante de mes promenades ne s'inquiète pas : c'est déjà ça de gagné !



Alors pendant un moment je vais sillonner les crêtes, hors sentier, au plus près de la succession de sommets et d'éboulis, de grands rocs à franchir ou de petits bouts de pelouse ouvrant sur des abîmes, bref, j'en emplissais mes yeux. Et je vous invite en ce périple...Vertige s'abstenir !


Le trajet en crêtes et en pics, à l'écart du sentier


Je cheminais, oubliant le soleil brûlant, la faim et la soif. Quant à la fatigue elle s'était faite légère. C'est mieux pour danser, non , à la musique vive des sonnailles, sous les sunlights du ciel ?
La vue portait loin : l' Ariège, les 3000 m, espagnols ou français, les proches pics d' Andorre, et les vallées creusées d'ombre...c'était beau. Il suffisait juste de se laisser porter sur ces crêtes faciles, sans danger, même si des abîmes s'ouvraient, bouches d'ombres, dalles immenses sur lesquelles de petits coussins de fleurs roses semblaient une aberration !

Un couloir plongeant vers la mer de rocs
Au fond vallée d'Ax les Thermes (09)


Pic de les Valletes : 2814 m

Je viens d'en haut et j'ai dansé sur les crêtes
Je n'ai pas valsé dans l'abîme.




Un peu de couleur et de douceur
La roche omniprésente



Pic de les Valletes, (2814 ), le lac et le pic de la Mine (2683)

Ce fut presque une déception d'arriver à ce pic de Font Frède dont j'avais entendu parler. Déception qu'il fît le dos rond sans caractère aucun, et qu'il clôturât ainsi ce décor.

Pic de Font Freda 2738 m
 Il semblait évident que le retour serait en pente aussi douce. Les randonneurs catalans que je rencontrai me firent vite déchanter ! Car j'étais fatiguée. Et le retour, au vu du parking minuscule tout en bas là bas ...et oui, 900 mètres, une plongée abrupte dans une cascade de rocs . Ah oui j'aime la roche et bien je serai servie ! Et si je me lançai sans détour, j'eus vite l'impression d'être un mille pattes tant les genoux et les pieds commençaient à souffrir.

Un aperçu du trajet, mon camion est tout au fond, au bout du petit chemin 

Nous étions cinq dans cette descente brutale, la moins fraîche c'était moi mais je ne voulais pas les perdre, cela me facilitait la tâche de n'avoir pas à chercher le chemin; lorsque je les perdais de vue, tout devenait plus difficile. Je crois que le jeune catalan l'avait compris. Arrivée dans ce fond de vallée je vis un sentier bien tracé qui conduisait là haut. Il eut été bien plus reposant. Car j'avais un sacré périple à mon actif, contrairement aux autres!



Un dernier petit col à monter, juste de quoi couper les jambes et une nouvelle descente dans de la roche revêtue de rhododendrons, un sentier gris, vert et fuschia. Où enfin on entendait de l'eau.Cette eau qui fait cruellement défaut tout au long de ce parcours : la prochaine fois j'emmènerai le double soit 3 litres. Car il y aura une prochaine fois !







D'autres crêtes et sommets m'attendent pour danser, de l'autre côté du cirque, 
aux rivages d' Andorre. 
Là bas, tout au fond...




En chiffres :
Dénivelé environ 1200 à 1250 m
Distance 12 km environ 
Temps de marche : 6 h environ




19 commentaires:

  1. Bravo pour cette belle aventure. Et un vieux catalan pourrait te dire : "Nina ets boige !" Mais je te respecte. Tu nous régales, Amedine ! Merci !

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    1. Es lo que els amics me diuen: ets boja !!Mais je me régale dans cette folie mesurée et prudente. je ne suis pas à l'abri, c'est sûr, même un gros rocher peut être instable je ne l'oublie jamais. A bientôt j'espère te régaler encore.

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  2. Comme toujours des photos à couper le souffle magnifique on en redemande Merci Amedine

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    1. C'est parce que le paysage est beau, Barthélémy...je n'y suis pour rien, sauf peut être un "certain regard"... Bises

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  3. Coucou Amédine Vous Vivez Mes Rêves :) Merci encore de Nous offrir Ce que La Nature a de Plus Beau Juste à Côté de Chez Nous Juste assez haut pour rester préservé :) Douces Pensées pour Lison Calinous aux Minous Bisous à Vous :)

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    1. Merci Claudie, alors je vis vos rêves ? j'espère pouvoir les vivre longtemps ! Aujourd'hui vérification de la machine chez le cardiologue. faut bien commencer un jour pour pouvoir poursuivre nos mêmes rêves. Bisous, à bientôt

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  4. "tu n'y es pour rien c'est le paysage qui est beau" oui mais, faut aller les chercher quand-même les images! c'est impressionnant les défis que tu te lances.
    merci pour les beaux paysages,
    bisous

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    1. Oui c'est vrai mais cela me paraît naturel Tu sais une passion...la montagne...la musique...on ne compte pas. Quant aux défis j'aime ça, je rêvais de courir le monde à l'aventure, exploratrice et bien quelque part je le fais. je t'embrasse fort

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  5. Merci pour ce magnifique reportage, Amédine ! Que tes photos sont belles ! Et ton récit, toujours aussi vivant ! :-)
    Belle fin de journée, bisous.

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  6. Et je salue aussi ton courage et ta détermination, coûte que coûte ! :-)

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    1. Merci Françoise; j'espère que tu vas bien. J'irai revisiter mes blogs amis quelque peu délaissés ces temps derniers. gros gros bisous

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  7. Coucou ... Félicitations ... Superbe reportage ... Magnifiques photos ... Des paysages à couper le souffle ... MERCI de partager ... Je reste admirative de tes exploits montagnards, lol !!!
    Douce soirée, Bisous et Câlins aux Félins

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    1. Mon prochain billet sera , je pense, plutôt félin: un autre univers tout aussi captivant. Ils piaffent de ne plus avoir la parole !! Bisous

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  8. Un périple époustouflant tant ces roches sont impressionnantes avec une inquiétude quant aux risques que tu prends pour assouvir ta passion. Merci de ce partage et pour ces photos superbes et parlantes. Bisous

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    1. Je veux vivre ma passion tant que mes forces ne m'abandonnent pas. Alors je cultive mes forces pour enrichir ma passion et donc partager. Bisous

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  9. Impressionnant ! T'es un peu folle, au fond... Mais quelle jolie folie ! :)

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    1. que c'est joliment dit cette jolie folie ! le 1er commentaire me dit "ets boja" (= tu es folle") hi hi ! j'apprécie. Bisous

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  10. C'est nettement plus joli en cette saison plus fleurie.
    Bravo Amédine car ta montée était bien rude.

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    1. Et surtout mon souci cardiaque n'était pas réglé ce qui m'épuisait ferme heureusement le paysage m'accompagnait somptueusement...

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