dimanche 20 septembre 2020

Tempétueuse rando dans la Vallée de l'Orri (66)

Préambule : la présentation de Blogger ayant changé, je ne maîtrise pas l'outil, donc il risque d'y avoir des "errances".  (Il n'est pas permis de perturber à ce point les personnes âgées!)

 Les paysages de montagne ne valent, en général, que par la couleur, la lumière, le soleil, le ciel bleu, à la rigueur quelques nuages qui enrichissent et magnifient le décor, mais certes pas sous la grisaille, la brume, le crachin ou, au pire, la pluie.


D'ombres et de lumière



C'est pourtant ce que je vais chercher ce matin. Cela s'est invité depuis hier sur le décor, avec averses éparses : le temps est au sud, c'est de saison. Je savais le temps médiocre mais une "fenêtre météo" devait me permettre ce matin de terminer le Serrat dels Llosers où j'avais butté dimanche. Et comme je suis autant passionnée qu'obstinée....

Mais si tout était au rendez vous, l'arête, moi, et la montagne, le météo boudait.

Le Serrat dels Llosers  et la vallée de Planès


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Réveillée très tôt je partis à la noire nuit pour mettre les chances de mon côté. La tempête avait furieusement secoué mon lit avant que de céder la place à une nuit sereine et étoilée merveilleusement. Je partis donc sous les étoiles, avec Mars qui me faisait un joli sourire et je dus attendre d'avoir fait un bout de chemin à la frontale avant de voir le cirque de montagnes : ce serait lui ma meilleure météo. Ce fut vite vu ! Une chape de plomb grise et épaisse écrasait le sommet du Rodó, à plus de 2400m...je compris que c'en était fini de mon projet. 2831 m : même pas la peine d'y penser...




Vue prise vers le refuge de l'Orri au lever du jour


Mars !


Fini du projet mais pas de la rando ! 

Qu'allais je bien pouvoir faire ?  Eviter la roche trop glissante. Je m'interdis la varappe.

Mais j'allais braver la tempête, j'ai toujours aimé affronter les éléments, à pied ou en voiture.

J'avançais sur le sentier, prenant quelques notes sur cet ancien "Chemin de Nuria", le sanctuaire de l'autre côté de la frontière. Le ciel s'était couvert sitôt les dernières étoiles évanouies, mais quelques déchirures de grand bleu ouvraient le décor à la caresse du soleil et c'était beau car fugace et mouvant.


Sur l'ancien chemin de Nuria existe encore du pavage


Rares déchirures ensoleillées

Le fort vent du sud me faisait face, sous le couvert des arbres, il n'était pas entrave, juste un grondement couvrant presque le bruit du torrent. On eut dit que les cimes s'ébrouaient pour chasser la poisse. Quelques vaches imperturbables y allaient de leurs sonnailles, elles me disaient que l'orage n'était pas prévu. Dans ce cas les vaches "descendent".

Couloir ouest du Rodó

Les canals de la Grimalda



Par moments la brume désertait les sommets proches, pour mieux revenir s'y enrouler, s'y installer, mais là bas, tout en fond, c'était très sombre. Cela ne m'empêchait pas de faire mes choix : pourquoi pas ce piton qui m'intrigue depuis longtemps ? Ou alors plutôt remonter la coma d'Enfer et aller observer mon accès pour les Llosers? On a l'embarras du choix en montagne même quand l'horizon se rétrécit. Toutefois, il ne sert à rien de s'aventurer sur des cimes avec pour seul objectif fendre la brume : je veux des paysages, un décor, après tout j'ai mes exigences !!
Le piton que j'aimerais aller saluer (au fond)


Je quittai la forêt vers 2100 m et le vaste cirque s'ouvrit devant moi. Et il s'accompagna d'un vent que plus rien ne freinait , qui m'assaillit me faisant reculer, faisant par là même reculer mes projets : pour respirer il me fallait marcher à reculons !


Panoramique du grand cirque
Quelques rais de soleil filent à toute vitesse


Et quel froid ! J'étais en short et petit pull. Je posai mon sac et enfilai tout ce que j'y avais logé au dernier moment, c'est à dire pas grand chose. Un collant fin mais chaud , une seconde paire de chaussettes d'été et des gants de soie. Mon fin et efficace coupe vent peaufina le magasin de mode et je rabattis sur ma tête le capuchon que j'amarrai: ainsi au vacarme de la tempête s'ajoutèrent des claquements de voile à mes oreilles. J'avais davantage l'air d'un clochard des montagnes que d'une randonneuse pressée, surtout avec ma marche d'ivrognesse! 

Les vaches me lançaient un drôle de regard : que faisait cet humain ici par un temps pareil ?


Tenue hétéroclite 

La pluie arrive à grand train

 

Mes projets se rétrécirent comme peau de chagrin. Incapable de lutter contre le vent, inutile de grimper le piton qui garderait son mystère et son arête escarpée, quant à la Coma d'Enfer, inutile d'y doubler l'enfer en s'y traînant.

Tiens, si j'allais voir ça ? On dirait une grotte . Ou est ce une tâche sur la falaise? L'accès n'est pas compliqué. J'y vais...enfin...j'espère...


Grotte ? Ou pas grotte ?

La prairie est émaillée de blocs de quartz que le pluie sublime et fait luire, réfléchissant la lumière ténue, la magnifiant, c'est la montagne qui étincelle.




Un cairn prend l'allure d'un oiseau de proie
sur le bord du sentier



Même la grotte gardera son mystère , il pleut trop.

Pourtant je me régale. Là où beaucoup ne verraient que contretemps et médiocrité, je ne vois que l' opportunité de profiter de la magie des lieux, de la tempête et son bruit de forge, de la violence des arbres secoués comme chevelures au vent mauvais, des vaches impassibles et de la mouvance de la lumière qui passe par toutes les nuances de gris. La montagne n'est que clameur, le vent a viré au sud / est et avec lui arrive, avec une soudaineté impressionnante, la pluie fine qui cingle et ajoute à ma capuche la gifle des grains océans. Mais que c'est beau....Je suis à 2200 m au milieu d'un désert noyé d'eau qui estompe le décor et j'ai encore envie d'en découdre...


Dans le grand désert mouillé

C'est mon appareil photo qui va me rappeler à la raison! J'en ai tellement maltraités, voire noyés que celui-ci se rappelle à moi, déjà trempé!

Et puis j'ai le retour, 5.5 km sous la pluie, cela donne encore le loisir d'en profiter!

Je tourne le dos à la pluie, cette fois ci ce sont cartes et carnets qui supplient: ils vont filer dans le sac. 

Soudain alors que je vais entrer dans la forêt, deux coups de feu éclatent, tout près et c'est le sauve qui peut ! Mourir percée de chevrotines ne m'agrée guère, crier est inutile dans ce vacarme et je cherche déjà des yeux le roc sous lequel m'enfouir, fut il dans la rivière ! A un train d'enfer (et oui je l'ai ma Coma d'Enfer !) je rentre dans la forêt et le fusil se tait. Et bien dans ce désert, je n'étais pas seule !


Impassibilité bovine

Nuances de gris


Le Rodó




Les crêtes du Malaza s'embrasent

A présent, le décor se déroule à l'envers; c'est une autre chanson, une autre lumière, la pluie change tout, pourtant je suis à l'abri, et pas que de la pluie.

C'est sans encombre que je regagne le parking sous la pluie et avec moi arrive...le Soleil !! 


Moquerie météorologique !


Je n'ai plus rien de sec sur moi ni dans le sac...mais mon hôtel recèle des merveilles. Je vais pouvoir repartir ! Où ?  En rando...voyons !

En chiffres 

Dénivelé: 559 m

Distance : 11.05 km

Temps d'absence : 4 h 36

Temps effectif de marche :3h21




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