En 1831, un chemin montait de Villerach, un autre de Clara, un troisième d'Estoher, tous se rejoignaient au Col del Forn, 700 m, (tiens, un four ? et où ?), comme le font aujourd'hui les pistes qui les ont remplacés, mais en 1831 tout diffère d'avec aujourd'hui.
Les 3 chemins fusionnant ne faisaient plus qu'un, passant devant un cortal que je n'ai d'abord pas su retrouver, le Cortal Romeu puis se scindaient en deux, l'un se dirigeant vers Baillestavy par la forge du Llech (article précédent) et l'autre plongeant dans la pente qui descendait, aride et brutale sur le canyon du Llech. En rouge sur la carte ci dessous.
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En rouge le chemin que j'ai cherché et retrouvé |
Ce chemin, je l'ai cherché, dans cette direction là, mais la construction de la piste en 1961 a changé la donne. Donc, dans ce cas, je fais toujours le chemin à l'envers. Avec Lydia, dévorée de vertige, je remonte la piste, elle frôlant les falaises à droite, moi jonglant avec le vide à gauche.
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La piste dans son décor |
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A l'aller, elle rasait les murs |
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Marcher côté vide est un peu plus facile au retour ! |
Elle se rassure, je me grise de vide et d'à pics en ce jour de découverte. Mais je suis "pédago" et je compte bien l'amener où elle n'aurait osé se risquer. J'ai étudié la carte IGN et le nouveau tracé pour accéder au Mas Llech. Un sentier facile, une pente équilibrée, aucun vide, une forêt dorée de l'or automnal, (qui oserait dire "C'est pas Versailles, ici !") et nous voilà au Mas Llech (ex Mas Jaubert).
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25 novembre, les ors du Mas Llech |
Léonie Deshayes en fait un intéressant descriptif; un ancien village aurait été dans ces parages , cité en l'an 848, avec son église San Salvador. Il reste, bien visibles, les ruines d'un grand mas de belles proportions et de belle architecture : pierres, couverture de tuiles, four à pain et entrée du mas en marbre rose de Villefranche de Conflent.
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Le Mas Llech (ou Mas del Llec) |
Que verrons nous ? De très belles ruines, hautes, aux murs en pierre de schiste. Les emplacements des étages, les poutres démolies, la toiture en pièces détachées, des placards inclus dans les murs, et une âme à coup sûr...Malgré les ronces rébarbatives.
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Etagères |
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Pilier central |
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Des ronces et folles herbes |
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L'en,trée principale en haut de l'escalier Marbre de Villefranche |
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Le four |
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Intérieur du four |
On quittera le mas par l'ancien chemin que l'on suivra jusqu'à la rivière le Llech, bien plus loin, après un sombre parcours avec quelques passages vertigineux que Lydia oubliera. Notre chemin frôlera un minier marqué sur le cadastre dont on verra le chemin y conduisant, mais en 1831, il n'allait pas si loin. Il s'arrêtait au cortal Peroÿ .
Aujourd'hui il va jusqu'à Baillestavy par le col de la Gallina.
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Il file vers l'amont |
Nous on stoppera à la rivière où gisent 3 wagonnets datant de quand la mine fonctionnait.
On reviendra par un autre chemin, en boucle, récent, conduisant au Mas Maler (ancien Mas Pons).
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Je reviendrai seule, le 2 décembre, pour chercher le tronçon manquant, celui qui figure sur le cadastre, orné de mes pointillés rouges et doit naître à un endroit bien précis de la piste et qui, malgré ma recherche assidue, est invisible.
Je sais pourquoi : la piste lors de sa construction l'a recouvert de ses déblais.
Pour trouver, c'est simple, il me faut repartir du Mas Llech. Des chasseurs m'ont dit "Ah oui ? il existe mais il est détruit, on l'appelait "le chemin des chèvres". C'est tout dire : j'ai étudié le relief, ce ne sont qu'aiguilles rocheuses ! Le chemin évoluait là dedans, et je vais essayer de le retrouver.
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Le Mas Maler, ex Mas Pons (propriétaire de la Forge du Llech) |
Je descends seule au Mas Llech, au pas de course. Versailles a perdu ses ors, les arbres se dénudent.
Face au Mas, je vire à gauche dans un roncier qui, une fois franchi, ouvre sur une avenue ! oui, une avenue, rectiligne, entre ses murs.
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La grande avenue en partant du mas; partout en amont et en aval sont des terrasses cultivées jadis |
Mais au bout de l'avenue, le ton change : le chemin perd de sa superbe, devient sentier, puis, à tour de rôle , éboulis, effondrement, chemin, fouillis végétal, passage de ravin, passage en falaises, vertige ou enfouissement, en surplomb, en chaos végétal, en chaos rocheux, mais malgré tous ces états, lisible.
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Fouillis |
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Complètement obstrué |
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Ou très net |
1 km de parcours tour à tour exaltant, angoissant, captivant surtout. J'aboutis, alors que sur la piste au dessus roulent les 4x4 des chasseurs, sur un immense éboulis peu engageant.
Une idée du parcours qui n'a rien de touristique et où très peu de gens iront poser leurs pieds :
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Collé contre la falaise |
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La rambarde en mode ancien |
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Entre falaise et vide |
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C'est dans ce site que passe le chemin...pas facile. |
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Relativement propre |
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A peine encombré |
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Enseveli |
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Pas très loin de la piste |
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Dans une pente redoutable |
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Bien étayé par un mur |
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Vue impressionnante sur vide et sur canyon |
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Dans le rétroviseur, c'est pas mal non plus |
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Un visage très sage |
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Et un visage disparu |
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Tournez à gauche disaient les chasseurs |
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Parce que tout droit c'est ça |
Une bifurcation se devine, anciennes traces peintes par les chasseurs, qui m'invite à rejoindre la piste en escaladant un éboulis
C'est bien mais me laisse sur ma faim. Il me manque la fin Je vais donc surprendre le chemin à l'envers, ma technique éprouvée, et je commence à descendre le sentier du canyoning. Je rencontre rapidement une calade et le grand éboulis que je traverse cette fois, retrouvant mon point d'arrêt.
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Il git là dessous |
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Et il a été emporté sans pitié |
Je reviens sur mes pas et je retrouve un très beau mur de soutien du chemin, c'est gagné.
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Le dernier mur visible |
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La calade servait à éviter aux bêtes de trait de glisser |
Enfin presque ...parce que le chemin il ne finissait pas là, il allait épouser la piste qui l'avait coupé mais les déblais de la piste ont eu raison des quelques mètres manquants. Ainsi au chemin des chèvres , il manquerait juste...les cornes. Et ça je n'ai pas le pouvoir de les faire repousser !
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Et pourtant...quelques jours plus tard, le 9 décembre, je retourne sur le site et j'observe minutieusement la piste et ses abords; le puzzle se reconstitue au prix de glissades, de ronces agressives, d'équilibre précaire sur des rocs dans une pente sévère, et même d'une grimpette dans un arbre mort pour mieux voir un mur ! Et là je comprends ; je ne suis plus sur le "chemin des chèvres " mais je "me promène" sur l'ancêtre de la piste. Oui avant la piste, un chemin conduisait à Baillestavy, celui que j'ai décrit dans mon précédent article : et bien, avec émotion, je m'aperçois que je retrouve ses origines quelque peu bousculées.
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En pointillés rouges le tronçon retrouvé Cadastre 1831 |
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Même chose en jaune En bleu le cortal |
En dessous de la piste:
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La joie de le retrouver ce chemin !! |
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Une tranche de mur : comment était garni l'intérieur |
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La façade |
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Petite séance d'escalade d'arbre mort pour photographier le mur bâti sur le vide |
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Le même mur vu d'en haur |
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Et le chemin que supportait ce mur |
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Quant au vide sous mes pieds : effarant ! |
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Ici la piste s'est superposée à lui |
Sur la piste : |
Mur du chemin ancien au bord de la piste Témoin du "passé routier" |
Et au dessus de la piste :
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Encombré, étroit |
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Bordé de murs |
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Habité d'arbres |
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Il reste lisible |
Certes, j'ai fait "repousser les cornes " au chemin des chèvres et le livre de lecture s'est éclairé. Et refermé.
Mais j'ai ajouté une page de lecture supplémentaire au terrain, j'ai redonné à la piste actuelle un morceau de son ancêtre, un visage oublié, disparu, qui sommeille. Et je vous ai invités, lecteurs, à y faire avec moi quelques pas hésitants et douloureux. Il a envie de se raconter cet ancêtre à qui la piste a volé la vie.
J'ai eu, sous mes pieds, dans mon regard, les vestiges du chemin originel venu des villages et se rendant au Mas Maler, puis à la forge de Llech et enfin à Baillestavy. La montagne continue à me raconter son histoire façonnée par les hommes venus du fond des âges, bien loin avant le 19 eme Siècle. Et je suis émerveillée parce que, pour moi, c'est Noël avant l'heure. Moi qui déteste Noël.
Ce Noël là m'a offert une petite étoile supplémentaire, ce fameux Cortal Romeu, qui regardait le chemin ancien mais ne voit pas la nouvelle piste; son regard allait plus loin, caressant cette vallée, ces versants abrupts, le Pic de Jocaveil qui lui faisait face et le canyon, tout en bas, chantant sa chanson de cascades.
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Cortal Romeu |
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Le Cortal et son fabuleux décor |
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Roc de Jocaveil |
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Ce jour, 9 décembre, c'est Noël ! |
Lien : par Léonie Deshayes,
le Mas Llech (clic)
Merci,encore une fois Amedine.
RépondreSupprimerMoi,qui suis une piètre marcheuse,je suis vos récits avec toujours autant de plaisir.
Aujourd'hui encore plus,car vous m'avez ramené avec émotion, sur un de ces sentiers ,que je parcourais,il y a fort longtemps,quand avec ma famille Romeu de Clara,nous montions pique niquer, au mas Llech ou au mas Malet
C'était,il y a bien longtemps,j avais moins de dix ans,la piste n 'existait pas encore...
Votre commentaire, chère Françoise, est émouvant car je visualise une petite fille marchant sur ces chemins, comme j'imaginais plein de gens , mais cette petite fille m'écrit aujourd'hui et ça c'est magique que tant d'années après une dame un peu âgée, venue d'en bas, lui fasse revivre ses souvenirs; et si je la voyais elle me raconterait "comment c'était", propre, entretenu, avec des points de vue époustouflants. Et j'adorerais l'écouter...Le cortal Romeu appartenait peut être à votre famille. Merci de ce témoignage Françoise. Je pensais que mon récit n'intéresserait personne.
SupprimerAh tu l'as trouvé ce fameux cortal Romeu !
RépondreSupprimerj'aurais du te dire d'aller voir sur Wikipedra je l'avais localisé en 2020 code 999
et pour la petite histoire mon voisin de terrain à Clara s'appelait Romeu, il m'a fabriqué un manche de hache qui tient encore le coup après 15 ans au moins !
j'irai peut-être sur tes traces de ce chemin presque perdu
Mais bien sûr que tu iras, je n'en doute pas, curieux comme tu es. Et tu vas te régaler
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