Vue du site du Puigmal (dans la ouate) depuis le col de Fontalba, 2000 m |
Lorsque j'ai pris la piste de 11 km , dans la nuit encore noire , j'ai su de suite que la montée au Puigmal et ses 2910 m était fort compromise. La sagesse aurait voulu que je fasse demi tour pour aller marcher sur la solution de repli : "Le chemin des ingénieurs" qui conduit au sanctuaire de Nuria .Bien sûr toute cette scène se passe côté espagnol.
Mais...la sagesse et moi...
Terminus avant le lever du soleil |
Je me souvenais de ma première ascension de ce Puigmal, en 2014 : le vent était si violent que randonner en crêtes était difficile, dangereux , sans parler du sommet où il fallait se cramponner. Mais il y avait peu de neige et l'ascension était restée possible. Bien que périlleuse par endroits.
Ce matin, crêtes et sommets, dans le jour qui pointait étaient inabordables, noyés dans l'enfer blanc du "Torb" le vent de la mort. (cf un article - clic- que je lui ai consacré)
Donc au bout de la piste, sous abri, juste en dessous du parking au col de Fontalba (Alt 2000 m) inaccessible car verglacé, le vent est nul et la température, sans vent, de zéro degré. Altitude 1980 m environ.
lever du soleil glacé |
Tenue grand froid |
En prévision du vent, j'adopte la tenue grand froid que je n'utilise jamais : 2 pulls, 2 pantalons dont un coupe vent, 2 paires de chaussettes, la parka, la cagoule (que je doublerai plus tard d'un bonnet) et les gants; ainsi harnachée, semblable à un yéti pataud, je démarre et le vent me saute au visage, mordant et enragé. Nous sommes 5 à oser l'aventure. Au parking tout le monde cramponne, je fais l'opération sous abri ce qui me vaut d'être plus rapide et la première à partir.
Aller au sommet était inenvisageable dans pareil océan de vent, je me donnai un objectif, un des derniers pins à crochet, altitude 2200m environ. Soit la porte à côté!
Au télé mon objectif, l'arbre tourmenté |
Deux heures d'un "cirque" pas possible ! Une lutte contre la tourmente. Du pur régal. Si je suis allée plus loin que les deux autres c'est juste que j'ai pris un chemin en courbe de niveau , sous la crête donc relativement plus abrité qui m'a permis de rallier "mon" arbre lequel avait grise mine et triste figure, soumis depuis des décennies à pareil traitement.
Tout rabougri et nu côté vent |
Je marchais (si cela s'appelle marcher !) sur un terrain peu enneigé , pas gelé, qui ne nécessitait les crampons qu'en guise de frein à pied.
Ma marche était celle d'un ivrogne au lendemain d'orgie sous un soleil blanc.
Soleil noir pour la Madeloc dimanche dernier, soleil blanc ce dimanche.
Je n'ai pas froid bien au contraire, je me dévêtirais si c'était possible. Gymnastique inenvisageable!
Du vacarme plein les oreilles; c'est fou ce qu'une tempête pareille peut faire du bruit! ça siffle, ça vrombit, ça hurle. sans trêve...Ah les Iles Kerguélen...
Avancer avec le vent de face était faire trois pas en avant, deux en arrière, le corps plié en deux comme ces vieilles gens cassés de rhumatismes. Quant au vent de dos...il sera pour la descente.
Quelque part, tout là haut, le Puigmal, 2910 m |
Plein sud |
Plein nord, le massif du Puigmal caché sous le "Torb" et une ébauche d'arc en ciel |
La femme masquée |
Oeil de verre d'une mare et vue vers l'Est, vallée du Freser |
J'ai, si je ferme les yeux, l'impression d'être à la vigne et d'entendre passer sur la proche LGV des TGV sans arrêt !
Le paysage est magnifique je resterais des heures à le contempler.
Les yeux de verre de la glace |
Vers le haut, aucun sommet n'est visible ni ne le deviendra, juste un léger arc en ciel sur tout ce blanc.
En face les vallées de Nuria et du Freser, que je connais,couloirs d'ombre où coulent des rivières.
Vallée de Nuria balayée par des rafales de neige arrachée aux sommets, et là dedans, derrière les rocs, le chemin des ingénieurs |
Deux autres marcheurs à la démarche incertaine se heurtent aux mêmes difficultés, s'obstinent; plus tard je les verrai redescendre à leur tour.
Les marcheurs titubants |
Redescendre...Je m'y résous, prenant la pente en tout droit et relativement protégée; la neige y est plus épaisse, entassée en plaques poudreuses où je plonge mais de beaux champs de glace, petits lits de ravins naissants, font des miroirs luisants où mordent mes crampons. Je me repais de cette beauté.
Un peu à l'abri, je profite de cette relative accalmie. Disons que le vent y a pris la vitesse de croisière 90 km/h
Et dire qu'hier sous un temps printanier, ils ont été nombreux à gravir le Puigmal !
Descente (appareil photo en mode déclencheur posé dans la neige) |
Vallée de Nuria en face et du Freser à droite |
Puis je rejoins le chemin d'accès au parking ,au col, et c'est la valse ! A mille temps et à un seul vent.
Dont je n'ose évaluer la vitesse tant elle est grande. Bousculée, emportée, fouettée, j'ai toutes les peines du monde à revenir; cette fois le vent a forci, et modèle sa direction selon son fantasque désir. Tantôt je suis déportée latéralement comme fétu de paille, tantôt, si je l'ai de face, je recule inexorablement sans pouvoir m'arrêter : merci les crampons. J'enrage, je peste à haute voix, c'est impressionnant et, pour terminer, arrivée au parking, je pique un sprint sur le miroir de glace, poussée par le vent de dos, incapable de m'arrêter. Merci encore les crampons qui m'évitent la chute ridicule . Mais qui l'eut vue ?
Le paysage ne varie pas au fil du temps Mais le vent oui : il forcit !! |
Je titube: trois heures de lutte de forçat contre les éléments et ce calme soudain ! Je me demande si je n'ai pas rêvé...
Alors après avoir retrouvé mon camion, une boisson chaude, un en cas, je repars, en pull et en jean revoir ce col et le vent me saute au visage, violent, mordant, glacé . Non je n'avais pas rêvé...
le mordant de Nina |
Il n'y a pas que le vent du Puigmal qui a du mordant !
La piste (photographiée la veille, au grand calme) |
Allez, je reprends la piste vers d'autres parcours moins dangereux, puisque j'ai le temps.
"Route de montagne avec courbes périlleuses et rétrécissements Circulez avec précaution" |
Large la route !! |
A bientôt sur d'autres chemins, peut être cette extraordinaire petite route enfouie dans un coin de montagne, là bas, vers les anciennes mines d' arsenic.
Oui, d'arsenic !
la nature est rude.
RépondreSupprimerQuel courage de l'affronter.
bisous
Oui elle est rude et extrêmement changeante en montagne. Bisous
SupprimerHou quelle bagarre cette promenade, enfin promenade ne me semble pas vraiment le bon terme ! Un corps à corps, une envolée plutôt ! En lisant j'ai eu l'impression d'entendre le vent et je crois bien que j'ai courbé les épaules pour lutter contre lui et soufflé en arrivant au parking !
RépondreSupprimerEt puis bravo pour les photos, elles sont superbes,celles avec le gel, j'adore ! Bises et caresses aux matous
J'ai ressenti cette aventure au plus profond de moi, un corps à corps avec le vent; il en est parfois ainsi "en bas " où je vis. Il me reste à aller m'y frotter en bord de mer mais c'est plus dangereux parce qu'il y a des falaises. Bisous
SupprimerBonsoir ... Houla ! tu m'as fait peur ... sans rire !!!
RépondreSupprimerJe t'admire ... je pense que le risque était quand même calculé... et puis à te lire, j'ai l'impression d'être avec toi au milieu de la tourmente ... C'est vraiment impressionnant.
Les photos sont magnifiques.
Douce soirée avec tes Félins, BISOUS et CÂLINS
Aucun risque sinon le rhume lol. Mais cette année je suis vaccinée ! Non c'était venté mais aucune difficulté et puis c'était un choix, aucune obligation de me trouver là dedans. Bisous
SupprimerAmédine Amédine est ce Bien Raisonnable un Magnifique Périple mais Périple quand même en Solitaire :) Quel est Votre Secret pour accomplir de Telles Prouesses :) Je ne sais plus si Je Vous L ai dit mais à Mes Yeux Vous êtes Une Héroïne Oui Bon Soyez Prudente comme dirait Mon Papa :) Calinous aux Minous Bisous à Vous Pensées pour Lison :)
RépondreSupprimerOui, raisonnable car il n'y avait aucune difficulté sinon de lutter contre le vent et de prendre la décision de stopper. Je me suis régalée c'était juste un jeu. Bisous de nous
SupprimerBrrrr... J'ai froid pour toi. Mais les photos sont extraordinaires !
RépondreSupprimerAtmosphère...atmosphère...là oui j'ai une gueule d'atmosphère !! lol Et en plus j'ai chaud !
SupprimerEncore une moment exceptionnel. Voir +++
RépondreSupprimerProfite bien de tout cela, c'est magique.
Bisous
Chantaloup
Ah j'ai profité et je profiterai encore car y en aura d'autres !!
SupprimerBisounettes bien réchauffées
Pas raisonnable sans aucun doute, mais
RépondreSupprimertellement fantastique comme aventure.
En regardant tes reportages, j'en ai
des frissons. Bises les plus chaleureuses
pour cette nouvelle année. ELZA
Très belle année à toi Elza, une bonne santé surtout. Je t'embrasse
SupprimerBonne Fête à La Petite Nina :) Bisous à Vous Amédine Calinous aux Minous Pensées pour Lison :)
RépondreSupprimerEt oui, je ne savais pas !!! Merci. Oh oui je pense toujours à Lison, je la cherche encore...
SupprimerQuelle intrépide, va ! (sourire) Tu braves tous les obstacles, rien ne t'arrête, rien ne te fait peur ! Même si je trouve cela remarquable, sois prudente tout de même, Amédine. :-)
RépondreSupprimerJe te souhaite une très belle année 2017, je crois que je ne l'ai pas encore fait. La santé, et encore plein de magnifiques randonnées !
Gros bisous.