Je voulais de la marche, j'ai eu de la marche, pas autant que prévu.
Je voulais de la haute montagne et des sommets, j'ai eu des sentiers et de la moyenne montagne. A cause de cette fichue météo qui a sabordé l'automne et ne lâche rien, pas une miette.
Je voulais de la solitude, j'ai eu de la Solitude.
Je voulais de la nouveauté et j'en ai eu, belle de surcroît.
Je voulais du beau temps, il était prévu quelques heures, j'ai eu l'hiver en automne.
Finalement, il ne faut rien vouloir et savourer ce qui nous est donné, c'est encore meilleur...
Je n'étais pas partie pour philosopher et cela a occupé la moitié de mon trajet. Mais c'est une autre histoire.
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Je suis arrivée au parking de la Carança sous la tourmente, ciel noir, vent violent, pluie imminente et je me suis dit que pluie ou pas, demain j'irai marcher. La varappe c'est bien mais il y manque la marche.
Une nuit étoilée, un petit matin embroussaillé de nuages noirs et de lueurs blafardes, je pars, vêtue d'automne, soit...peu.
Mon sentier sera grandement de la nouveauté : partir par le Mas Baret, direction un autre sentier à découvrir pour le Pla de Campilles, c'est le dernier volet de mes recherches là bas. Je compte bien boucler la boucle .
L'eau de la Carança et l'usine de Thuès |
Le sentier du Mas Baret se détache de celui de Fontpédrouse, l'air a l'immobilité d'avant la pluie, silence figé, le versant où trône Llar est noyé d'un rideau pâle...
Vers l'aval de la vallée de la Têt |
Llar |
1221 m : depuis un moment le ciel crache des postillons de neige fine qui crépitent sur mon sac et sur les végétaux. Un cerf brâme au loin, semble t'il. C'est l'hiver qui s'installe, on croit encore être dans l'automne d'en bas, fut il maussade et on s'éveille sous un hiver qui crépite en bulles blanches. Les voitures pressées qui roulent vers l'Andorre passent sans le voir à côté d'un instant magique. Ils roulent vers leur bonheur, je marche en silence au milieu du mien.
Noyé de neige légère |
Les yeux tournés vers une montagne grise, nue, escarpée, où des rais de lumière orangée parlent d'un automne frileux.
Rochers "connectés" prévention pour la ligne du Train Jaune |
1342 m j'arrive aux premières pâtures du Mas Baret.
Pâtures envahies de broussailles |
Et cernées de chênes |
Traces de vie saisonnière |
En l'an 952, ce Mas Baret, ou Albaret, existait déjà, à 700m et plus de 3.5 km au dessus des premiers villages et de la vallée, loin de tout, perché sur un promontoire dominant la vallée. Plusieurs familles y vivaient, il était peut être alors de plus modeste taille que l'immense ruine que découvre mon regard stupéfait. Est ce un mas ? Un village ? en fait c'était une possession de l'Abbaye de St Michel de Cuxa, comme les bâtiments de Campilles et l'ensemble fut ruiné aux 12 eme et 13 eme Siècles, par la peste dit on. Il est d'une étonnante facture ! Je pense qu'il a été réhabilité au cours des siècles pour être aussi vaste car en 1950 15 personnes vivaient encore dans ce mas de 800m2 en totale autarcie. Y entrer est interdit mais une association est en voie de réhabiliter (en partie) la ruine. .
Remaniements d'architecture |
Belvédère sur la vallée de la Têt et Fontpédrouse |
Je fais une singulière trouvaille : une roche gravée .
Roche gravée |
Le sentier balisé continue je sais qu'il va rejoindre le Cami Ramader de Campilles même si la carte ne le porte pas.
Je n'ai plus qu'à suivre les cairns et balises jaunes, l'un d'eux, mal positionné va m'envoyer par deux fois dans une mauvaise direction. Je m'en rends compte très vite mais je poursuis par curiosité, ainsi j'arrive à la source captée non loin du ravin de la Sourde, source qui conduit l'eau au mas.
Je reviens sur mes pas, je rectifie le cairn, et fais deux découvertes : la seconde est franchement moins plaisante; un énorme taureau bien campé sur ses pattes et attributs me regarde d'un oeil (et même 2) torve(s), alors que ses dames attendent sans bouger. Il est campé devant le cairn du bon sentier et ....je me détourne; c'est un comble! Deux erreurs et lorsque j'ai enfin le sentier, je dois piquer un tout droit dans la pente , le regard en coin, le coeur battant...je ne fais pas le poids !!
La première trouvaille ! Un cèpe |
Enfin je regagne le sentier où deux gros veaux ferment la marche. L'un d'eux marche sur moi, peu amène, mes cheveux se hérissent puis il fait demi tour et passe son chemin. Je comprends pourquoi mes forces sont si usées dans la longue montée qui suit !
Rencontre macabre, il était jeune ses dents sont jeunes |
Je comprends aussi une chose: pour se rendre au Pla de Campilles j'ai pris le plus mauvais chemin, c'est tant escarpé qu'on arrive au sentier jambes usées. Il faut monter, à l'inverse, par le chemin de Campilles via le départ Carança. Non je n'irai pas au Pla; il fait très froid, il continue à tomber des postillons de neige, je suis fatiguée, gelée, j'ai déjà parcouru 6.5 km, le retour sera long...je reviendrai !!
1616 m : la source de Ramonalls est tarie, j'en suis surprise, elle coulait tant, il y a si longtemps, c'était en mai.
La forêt est belle; je commence à m'habituer à ces forêts que je détestais. J'ai pour compagnons des chapelets de champignons, un ou autre oiseau, le vent mauvais qui fait crépiter les feuilles des bouleaux. J'ai pour paysage des futaies vertigineuses, des tapis de mousses sur les rochers et le silence magistral quand tout se fige.La lumière qui vient caresser les percées de forêt est fragile, étincelante et cristalline.
Du merisier |
Chaque feuille, un tableau |
Du sorbier |
Des érables |
Trouée de lumière sur Fontpédrouse |
Les gorges de la Carança |
Je refais le monde, je grelotte, je peste après mon téléphone qui couine et je rencontre la civilisation espagnole d'un WE prolongé, façon ubuesque dans le périmètre des gorges...Je repartirais presque en marche arrière pour éviter le 1.2 km de civilisation "exotique"...
En chiffres
Distance : 12 km
Dénivelé 777 m
Route 140 km AR
Tu es toujours dans ton élément quand tu es seule dans la nature. C'est toujours de très belles sorties. Bises
RépondreSupprimerje ne suis pas tout à fait d'accord avec ton commentaire car les moments que j'ai partagés avec vous ont été des perles de Bonheur qui s'ajoutent à mes perles de Bonheur solo. Et j'espère en rajouter d'autres...Si le ressenti est différent, par force, la qualité est à la hauteur. Bises
SupprimerMais pour moi aussi ces sorties ont été magiques au-delà de tout ce que je pouvais imaginer. Et il me tarde de nous retrouver. Et à côté je comprends tout à fait ce besoin de sorties solo. Je tembrasse
SupprimerCherche déjà Roc Campana, Villefranche de Conflent, par le Mas de Lastourg et préparez vous !!
SupprimerQue de poésie dans la description de cette rando d'automne.
RépondreSupprimerTu as bien ressenti que le Mas Baret était plutôt un retour qu'un aller c'est ainsi que nous l'avons souvent fait, on peut alors flâner pour un retour tranquille...
A mon tour de te conseiller de regarder un peu a coté du Roc Campagna: Le ravin des Horts un très ludique parcours ignoré de tous et si spectaculaire :
https://canromi-randos.blogspot.com/2014/02/ravin-des-horts-en-traversee-depuis.html
Amitiés
en tout cas c'est beau et je pense au printemps aussi. Le Roc Campagna ? c'est un vif projet que je caresse depuis un moment !! merci j'irai voir car je ne veux pas me paumer sur le sentier même si un tout droit dans la pente est bien tentant....
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