Aucune carte ne lui donne un nom, comme si elle ne le méritait pas. Et elle se mérite, pourtant, cette arête escarpée. Alors au terme de mon escapade sur son dos mince, je la nomme du site qu'elle surplombe, le bac de la Boulzane. Bac = ubac, soit exposé nord, à l'inverse de l'adret. Digression géographique. La Boulzane est une rivière affluent de l'Agly.
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L'arête vue de la route de Lesquerde |
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En vue aérienne. En couleur mon trajet (jaune le retour) |
J'ai fini par trouver, sur le Bulletin de la Société Languedocienne de Géographie -1884- un nom : chaîne de Peyralade . Du nom d'un hameau situé près de la route dans la vallée.
Cette arête court entre St Paul de Fenouillet et Caudiès de Fenouillèdes, doublée par une autre plus basse qui était celle où je perdais toujours mon regard en conduisant (d'un oeil quand même).
Elle m'attirait depuis longtemps et c'est sa grande soeur que je vais parcourir, sans le savoir.
Je suis allée en reconnaissance dimanche dernier, sous une tramontane qui excluait la moindre grimpe sur le moindre caillou!
Cet après midi c'est l'été. Je pars l'après midi, c'est impensable !
Au départ de la rando, je rencontre un promeneur solitaire qui me donne une indication précieuse ; en haut il y a un oppidum et des vestiges de tour à signaux. Et la curiosité part au galop !
Je repère un point haut de l'arête, ce pourrait être là.
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Sentier le long du ruisseau Il conduit à St Martin de Fenollet |
Je marche sur le sentier quelques 400 m puis je fonce dans le maquis, bref passage et tout de suite j'attaque le pierrier, bref aussi, la muraille est là. Alors on y va ! Directissime ! Et je grimpe, aisance des pieds et des mains, les prises sont nombreuses et sûres, les évitements de points ardus aussi. Ardu ce l'est, je sue dans cette chaleur estivale, mais que c'est beau, l'arête dans mon dos diminue à vue d'oeil et déjà je vois le dessus de cette molaire. Mais que vois je surtout ? Des tessons de brique ou tuiles!
Ah je la tiens ma tour...
En images, la montée:
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Trouver son chemin dans ce mur |
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Et je le trouve |
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La grande molaire, future rando |
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J'aurais pu monter par là |
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Je préfère ça |
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La chaleur est étouffante |
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Formation de lapiaz |
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De beaux murs lisses qui se grimpent bien |
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Quelques belvédères |
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Prise de hauteur, vallée du ruisseau sans nom |
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Il émerge : Sieur canigou |
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Comme le petit poucet |
Me voilà en 30 minutes 160 m plus haut, à un petit col où l'appel d'air est un ventilateur bienvenu.
Et le paysage grandiose.
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Au col : alt 583 m St Paul de Fenouillet
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St Paul de Fenouillet |
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Magnifique vue vers l'Ouest : vallée de la Boulzane, Castel Fizel, et Caudies en fond |
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Au col, je profite du ventilateur |
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Pech de Bugarach |
Mais le sommet de l'arête, "l'oppidum" présumé , inaccessible. C'est de la pure escalade et il ne me reste qu'à trouver un passage. Côté sud, il s'impose, aventureux mais possible grâce aux prises, et ça y est, j'y suis, et là...une plate forme incongrue où gisent des tessons mais point de vestiges. Un nouvel escalier calcaire et voici une murette de pierres taillées, de forme rectangulaire, j'ignore encore à ce moment là que les tours à signaux des Fenouillèdes sont toutes à plan rectangulaire. On dirait que je trouve le Trésor de Rackham le Rouge !! Je savoure ce trésor sans valeur si ce n'est celle de l'escalade musclée.
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Escalade facile pour le sommet, mais exposée au vide |
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Pendant l'escalade, paysage vers l'est et Lesquerde |
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Le trésor : la base de la tour à signaux (environs 10 eme S) de plan rectangulaire comme toutes celles des Fenouillèdes |
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J'imagine que la plate forme a été taillée par les hommes Mais quel travail ! Les murs sont faits de pierres taillées aussi |
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Au sommet : 609 m |
A présent faut pas rêver l'arête s'étire, belle, un peu sinueuse, affûtée, élégante, effilée et tentante. Elle a la saveur des choses presque vierges. Et surtout mystérieuses, inutile de partir en sachant quelque chose sur elle, c'est l'Aventure et ça me va.
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Ma promenade aérienne commence là |
L'arête est faite d'un beau calcaire, bordée à ma gauche d'un grand vide et à ma droite de pierriers et arbres mêlés, pistachiers lentisques, chênes verts et vénérables genévriers au tronc tourmenté. La belle vallée de la Boulzane, close par St Paul de Fenouillet est mon décor. Ses voitures, ses vignes et le petit train rouge touristique qui siffle en bas...Canigou, Bugarach complètent le tableau ainsi que l'arête de St Paul, puis de Lesquerde, suite de la mienne.
L'arête de St Paul est équipée en Via Ferrata libre d'accès et superbe.
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Tout en bas, le petit train des Fenouillèdes |
Ici je suis le fil ce qui n'est pas difficile, on y marche bien, il est parfois très étroit style "salto del caballo". Quelques petits contournements côté nord en général, exposés, mais tout est exposé au vide ici. Soudain se présente ce que je redoutais, un haute et fine brèche. Avec des jambes de 20 ans j'aurais peut être sauté...quoique...50 ans de plus m'invitent à la désescalade. Aléatoire, j'ai un peu peur alors je descends à la corde et on n'en parle plus d'autant que, si je dois remonter, je le peux sans corde.
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La brèche et une grotte Descente à la corde sur le côté |
Et je continue. C'est 1 km d'arête sublime ...Un salto del caballo plus fin sans prise à droite ou à gauche me donne l'occasion nouvelle d'avancer en traction à la force des bras, c'est amusant à souhait.
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Du vide, côté nord ! |
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D'où je viens : le soleil est dans l'axe Gênant pour les photos |
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Petit repos |
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C'est aussi cela : escalades ou désescalades |
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Vallée de la Boulzane |
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Passages effilés et vertigineux nommées "salto del caballo" |
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Cela se franchit assis à cheval sur le fil |
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Salto del caballo |
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Celui là est plutôt effilé ! |
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Celui ci , il rigole pas !! |
Est-il nécessaire de préciser que je ne trouve nulle trace de passage humain, pas le moindre petit objet oublié, ou un cairn, ou une branche élaguée ? Qui s'aventure à parcourir cette crête pourtant pleine d'intérêt ? Si je rencontrais quelqu'un je serais bien étonnée et pourtant...elle en vaudrait bien la peine ...
Parfois un ou autre arbre envahit et il faut franchir, soit contourner, soit traverser. Le genévrier est solide mais une branche de chêne casse dans ma main, je me rattrape à la suivante, j'ai oublié le parachute !
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Un bosquet au sommet ! |
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Chêne vert |
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Pistachier lentisque |
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Vue plongeante sur la vallée au nord |
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Et le même lieu vu d'en bas, envers du décor |
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Vue plongeante au zoom sur ma voiture 200 m plus bas |
Ma voiture me sert de repère, je suis presque à sa verticale et là je sais l'arête très compliquée, je l'ai assez contemplée d'en bas. En fait j'arrive à une portion infranchissable, je vais devoir descendre et je contourne dans un maquis épais qui, lui même, surplombe un mur de falaise démesuré, c'est dangereux, ici et je ne passerai pas davantage, une succession de brèches m'attend, il faut donc redescendre. Un joli pierrier de gros blocs est une invite facile mais il est inaccessible, je suis cernée d'à pics démesurés : face, gauche, droite. Vais je devoir descendre ce maquis où j'ai vu quelques chèvres s'enfuir à ma vue ? Et entendu les rocs dégringoler sous leurs pattes agiles?
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Voilà où il faudrait descendre et suivre le long pierrier mais la barre (rocheuse) est très haute ! |
J'amorce le demi tour en évitant l'arête et entamant la descente, sait on jamais, un passage risque de s'y loger. Et là je sais que je ne vais pas me régaler ! IL est là, une sorte de ravin croulant à souhait; des blocs énormes dévalent sous mes pieds je fais plus de tapage qu'un régiment de chèvres, elles doivent bien se marrer...Moi non...je commence à balafrer mes bras et jambes nus, le sang coule mais une rage m'empoigne, envers et contre tout, je descendrai!
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Même si.... |
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Là encore c'est carrossable |
Pourvu qu'aucune barre rocheuse....Mais le ravin m'en protège, justement en voilà une de barre rocheuse, bien haute et infranchissable, mon petit ravin vaillant, croulant et encombré l'a franchie et me conduit cahin caha vers le bas. J'ai quand même une corde qui me rassure, et parfois je fausse compagnie à mon ravin pour descendre un petit pierrier bienvenu. Car en dehors d'eux, c'est un immonde maquis...
En images la descente
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Mon vaillant petit ravin |
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La barre rocheuse : un grand saut |
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Délices du pierrier, j'apprécie |
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La maquis j'apprécie moins , je dois passer dessous, courbée en deux |
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Je vois la fin, je viens de là haut, 200m au dessus, et c'est plus pentu |
J'ai de la chance je parviens à un tout petit sentier, celui des chèvres qui vont boire au ruisseau. En effet, tout en bas, près du sentier, il y a un ruisseau, sans nom lui aussi ! Et j'y parviens, il y a des flaques, des grands rochers polis, mais plus polis soient ils je préfère remonter une vingtaine de mètres et trouver LE SENTIER !!
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Arrivée au ruisseau dernière pente puis petite remontée dans le maquis pour le sentier
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Point d'eau dans le ruisseau |
Bien aimé sentier...Ma voiture est toute proche, je me hâte de laver toutes ces traînées sanglantes avant le passage d'une voiture, j'ai l'air d'un zèbre...Bon c'est superficiel et je n'en garderai aucune trace, juste de petits traits de rasoir.
Mais je suis ravie de mon périple, aussi original que farfelu, aussi beau que difficile, aussi musclé que gratifiant.
"Vous êtes barje" m'a dit le promeneur solitaire à l'énoncé de mon projet, et pour une fois je crois que je ne peux qu'adhérer à cette assertion...
En chiffres :
Longueur parcourue d' arête : env 1 km
Dénivelé positif cumulé : 350 m env
La route : 110 km A/R
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A droite, le morceau manquant, peut être ma curiosité m'y invitera ? Mais il paraît bien compliqué sur place.... |
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L'envers du décor, vu depuis la face nord |
Il n'est parfois pas utile de prendre énormément de hauteur pour s'offrir un très joli panorama, cette sortie le prouve. C'est magnifique. Bises
RépondreSupprimeret tu vas en profiter car je compte bien te la faire faire cette arête ! Là tu vas peaufiner ton apprentissage, sachant que le demi tour est toujours possible et que surtout on le fera puisque je ne te ferai pas descendre par où je suis passée. Alain sera le bienvenu, il fait partie du Trio de Fous. Bises
SupprimerMagnifiques ces roches blanches tourmentées, tu es une vrai chèvre pour parcourir une crête aussi "puncharode" et un maquis aussi touffu. Ça devait être plein de serpents... très belles photos pour une rando un peu "Boge", il n’y a que toi pour explorer un tel parcours. Bravo l’artiste !
RépondreSupprimerJ'ai pensé aux serpents surtout quand je rentrais mes doigts dans une fissure qui servait de prise ! Mais je me disais que ...avec un peu de chance... ce n'était plus leur saison ! Et oui j'adore l'insolite j'ai été servie... Bises, les semi marins !
SupprimerSemi parce que votre coeur est partagé entre mer et montagne !
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