Ne cherchez nulle part le Cabo Ogoño , c'est un illustre inconnu sauf pour les initiés, je ne connaissais pas son nom avant de l'avoir sous le nez et pourtant je l'avais déjà rencontré trois fois. (1975, 1992, 2006). Nous aurions pu être deux vieilles connaissances.
|
El Cabo de Ogoño sur mer |
|
Reflets du Cabo sur l'eau |
Il prolonge un petit port inoubliable nommé Elanxobe, si minuscule qu'il est impossible presque d'y loger, d'y marcher, d'y faire demi tour. Et pourtant j'y ai dormi. Lui est une vieille connaissance.
|
Elanchove ou Elantxobe |
La côte cantabrique, entre San Sebastian et Bilbao est faite de falaises, très hautes et découpées, austères, creusées de ports miniatures, ourlées de vagues et d'une route sinueuse dans les eucalyptus et les pins, où quelques stationnements sont à présent aménagés pour regarder, boire l'océan jusqu'à l'infini, la mer ici, nommée Cantabrique. Pas l'océan, mais c'est quand même l' Atlantique.
Et c'est aussi un site géologique prisé par les chercheurs du monde entier.
|
Ces formations se nomment flysch (sédiments de la côte basque du crétacé et du tertiaire) Il y eut aussi du volcanisme sous marin |
(Pour en savoir plus, clic ici) ; document sur PDF (internet)
|
Marnes bleues |
|
Basalte volcanique |
A près de 800 km de chez moi, j'ai voulu faire de Elantxobe mon port d'attache éphémère. C'est risqué, tout est à présent interdit, mais je passe outre. Et si je vais faire cette rando ce matin, c'est juste parce que je l'ai trouvée sur Google Maps car rien n'est indiqué sur le port. Je sais, le port c'est la mer. Et là haut, c'est plus de 350 marches d'escalier pour parvenir au départ !
|
Elantxobe de nuit |
|
Ou de jour |
Le Cabo Ogoño c'est cela : vu d'El Antxobe, une molaire boisée tombant dans la mer. Vu sur l'autre face, une incisive acérée rongeant l'océan. Alors ?
|
Vu depuis l'ouest le Cap |
|
Et vu depuis l'est, au loin |
Alors me voilà nageant déjà dans un bain de sueur, l'air est brûlant chaque jour, dépassant les 30° à l'ombre, saturé d'humidité, on s'y habitue. Et dire que j'ai un stock de vêtements de pluie, un parapluie, un poncho...
Bref je souffle et je sue juste au dessus du niveau de la mer, objectif 300 m d'altitude.
Les escaliers se diluent dans le pavé d'une rue, la rue s'écrase sur le mur du cimetière et un chemin cimenté et barré conduit aux maisons chic dominant la mer. Je traque l'ombre, je rase les murs, baisse la tête pour mieux en profiter et j'entre sur le sentier, l'ombre finira par m'y étouffer.
|
Quelques maisons sur les falaises profitent aussi des tempêtes |
La vue est splendide en façade nord ouest, la plage de Laga, les falaises déchiquetées, et au loin, Mundaka et Bermeo, de part et d'autre de la ria, ce long fleuve que l'on nomme fjord en Norvège, soumis aux marées et inondant une vallée sinueuse de 10 km, cachée au regard.
|
DEpuis plus de 250m de haut, la petite plage de Laga d'où sont prises les précédentes photos |
|
Au zoom |
Ce cap a une particularité c'est un éperon calcaire dans un décor qui ne l'est pas (marnes bleues) et en bon relief calcaire, il est couronné de lapiaz, ces roches creusées par l'érosion en entailles, orifices ou cuvettes. Mieux que ça, l'éperon est parcouru en son coeur de galeries creusées par les infiltrations (il y a quelques grottes cachées) et il plonge de 20 m sous la surface des eaux. L'exceptionnel réside dans le fait qu'à 8 m sous le niveau des eaux, une ouverture nantie d'un siphon aspire par gros temps la puissance de la mer et renvoie un geyser à 100 m au dessus du niveau des eaux s'élançant puissamment vers le ciel. On n'accède à cette grotte "souffleuse" que par la voie des airs (image ci dessous)
|
Image internet |
Le sentier est beau, dans les grands chênes blancs, les pins, avec des lointains bleu ciel et bleu mer.
Un sentier part vers le sommet, ce sera pour plus tard, 305 m ça peut attendre, je veux de la falaise.
Un autre file vers le bas, ce sera pour plus tard, dommage, une corde fixe m'eut conduite à la plage, point de départ des sites d'escalade, enfin une grève de rocs, plutôt. Je l'ai su plus tard...
C'est une falaise calcaire, cuirassée de lapiaz, recouverte de chênes verts qui se dévoile enfin dans une semi nudité. Arrivée à son extrémité, les 200 m sont en surplomb, le point de vue époustouflant et les grimpeurs à l'oeuvre. Ici, un chien garde le sac, ailleurs deux copains terminent la voie en 7 a, du lourd déjà.
|
Le lapiaz calcaire |
|
Fin de grimpe pour le 1er et assurage du second |
|
Le second |
Quelques mots échangés vont me conduire sur un sentier qui permet une boucle, qui épouse tout le dessus de la molaire, sous le couvert végétal.
Le végétal ? Oh il ne me dépayse pas ! Celui des Corbières en plus fouillis vert : du calcaire, qui doit être patinoire par temps humide, des chênes verts jusqu' en bord d'eau, curieux de tout, des salsepareilles agressives et des arbousiers ? quoi d'autre ? La forêt vierge de style méditerranéo atlantique.
|
Une des extrémités de la falaise |
|
Sous bois de chênes verts |
|
Le chêne vert omni présent |
Je marche, marche, marche, de lapiaz en lapiaz, rarement la tête au soleil, quelquefois à découvert, quelquefois en style commando pour m'approcher de la falaise, oups, vertigineux. Les chênes verts descendent vers le bain, les bateaux écorchent la surface de l'eau, des grimpeurs font entendre leur voix dans les voies, et personne ne me voit.
|
Juchée sur du lapiaz |
|
Vers la mer |
|
Même lieu : vers le sommet |
|
Regard sur le vide vertigineux |
|
Ombres et lumière |
|
Des falaises imprenables et les chênes verts qui plongent |
La forêt m'étouffe, l'ombre n'est pas fraîche, les lieux déserts mais le balisage soigné. J'ai l'impression de faire des km, sans fin, sans air, sans relâche. Dans le caillou, mes pas précautionneux, mal chaussée, allez imaginer un terrain pareil au dessus des flots !
|
On y marche très mal, parfois il y a des murs de lapiaz |
|
Le lapiaz est tourmenté de creux, fentes etc |
Enfin je bascule versant nord est, le soleil filtre, les randonneurs s'infiltrent sous le couvert. Un groupe de françaises rieuses, non les hommes ne sont pas interdits mais ils ne sont pas là. Une jeune femme toute seule, qui balbutie l'anglais, et finalement elle est aussi française que moi, cette jeune voyageuse solitaire en van. Un italien avec qui nous conversons en espagnol, ce sont les joies du voyage, les gens du voyage.
|
Il faut oser se risquer et y laisser des estafilades mais alors, quelle vue !! |
|
entre les branches, en bas |
|
Sillage |
Je reviens enfin à Elantxobe, affamée, assoiffée, étouffée et ravie. Descendre 311 marches pour aller boire un verre sur le port et remonter ? Au dessus de mes forces. Je reste à l'étage du milieu, en courbe de niveau vers mon camion et Nina.
|
Le village vu du "2nd étage", écrasé de chaleur |
Alors, parlons de Elantxobe, Elanchove en temps normal. Soit en espagnol. car ici tout est basque.
La richesse du lieu fut la pêche, à la baleine jadis, à l'anchois plus récemment, au touriste aujourd'hui. La pêche est morte, les pêcheurs rares et l'économie défunte.
|
Le port vu d'en haut |
|
Novembre 2006, la pêche y existait encore |
|
La pêche s'en est allée |
|
Mon "dortoir" sur quai |
Agrippé à la falaise, le village escaliers n'invite guère le touriste à s'épuiser, la vie est en bas, le bar, le port, la "piscine d'eau de mer", soit le port, car de plage, il n'y en pas, les rochers au delà des murailles portuaires que les tempêtes franchissent d'un bond. Le Elantxobe du haut, accessible en auto est moins pittoresque, bars, restau, terrain de sport, petite ville sans charme . Et celui du milieu ? Ah celui du milieu...qui y use ses genoux, comme je l'ai fait, ne peut qu'y revenir, sans cesse. Mais c'est un autre récit, peut être ? Celui des 1000 marches.
Ou plus, ou tant qu'on veut, jusqu'à en avoir des courbatures aux mollets le lendemain. Non je ne plaisante pas !
En chiffres
Distance : 6 km dont 4.2 dans la rando proprement dite
Dénivelé environ 200 m
Balisage jaune pour l'aller (cimetière) et rouge et blanc pour retour sur le village
Ere bien chaussé surtout si le temps est humide (roche très glissante)
|
Trajet approximatif |
|
Situation du Cap proche de Bilbao |
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Votre commentaire: