Cerbère est un village côtier, le tout dernier des Pyrénées Orientales avant la frontière espagnole. J'affectionne ce village un peu isolé, après la prestigieuse Collioure, le vivant Port Vendres et le savoureux pays du vin réputé, Banyuls sur Mer. Dernier bastion de la côte Vermeille, Cerbère n'a à présent rien de particulier à offrir mais fut un village immensément vivant avec sa gare internationale et le métier d'exception qui s'y pratiquait, c'était le pays des "transbordeuses d'oranges".
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Cerbère by night |
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Cerbère partagé en deux par les rails |
"Mais qu'es aixo ?? "
Les voies ferrées espagnoles sont d'un écartement différent des françaises; aujourd'hui le passage entre les deux pays se fait automatiquement par élargissement automatique des essieux, autrefois il fallait transborder les marchandises des trains espagnols aux trains français et vice versa. Comme il y avait un très grand arrivage d'oranges de la côte est espagnole, des femmes devaient transvaser ces fruits à destination de l'Europe, à la main, en gare de Cerbère.
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Témoignage du passé |
Un wagon témoin est exposé.
Cerbère a vu mourir peu à peu ses activités terrestres et maritimes, ses vignes, et les touristes lui préfèrent les côtes du pays voisin.
J'ai apprécié et découvert Cerbère en automne 2017 alors que je relevais d'un handicap momentané et que j'y faisais ma rééducation en arpentant le village de nuit, pour "réapprendre à marcher".
Là j'y suis en cette douce soirée d'octobre balayée de vent du sud, par pur hasard, un quart d'heure auparavant j'ignorais que j'irais, c'est ça le semi nomadisme !
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Les yeux de cerbère grand ouverts sur la nuit |
Je quitte ma chambre sur roues idéalement placée, au plus près de la mer et je m'en vais au coeur de ville. Cerbère est bâti sur les flancs de collines donc c'est un vrai amphithéâtre partagé par la voie ferrée; en amont de la voie sont les lotissements et les anciens bâtiments ferroviaires, en aval, en dessous de l'immense mur de soutènement, le village côtier et la mer.
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Vue aérienne Géoportail |
Cerbère s'articule autour d'une voie submersible qui récolte, en temps de fortes pluies, les ravins issus des collines escarpées plantées de vignes; le village offre le paradoxe d'une rue où sont garées les voitures et dont les trottoirs sont plus hauts que les véhicules ! Ces trottoirs sont accessibles par des escaliers et de solides barrières de béton les protègent des crues qui peuvent envahir la rue. Pour traverser cette rue, on le fait à pied sec ou au moyen de très hautes passerelles qui enjambent cette rue / rivière.
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Rue principale, réceptacle des ravins |
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Le trottoir sur les toits des voitures |
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Quand il pleut fort, on passe par là |
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Et on isole les trottoirs de la rue cours d'eau |
Elle se termine par un immense tunnel traversant la vaste gare, ou se poursuit par une autre ruelle prolongée par un petit tunnel.
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Le grand tunnel |
Cette ruelle est longée par le très haut mur de la voie ferrée d'un côté et par des falaises surmontées de maisons de l'autre.
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Paquebot dans la nuit : ruelle et murs de la voie ferrée |
Des escaliers permettent d'accéder aux maisons, les anciens monte charges se devinent encore, à demi ruinés.
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Monte personnes |
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Et ancien monte charge |
Justement...les escaliers...
Voilà que je reviens tout juste d'un voyage sur la côte atlantique espagnole, du côté de Bilbao, je suis allée chercher mes jolis souvenirs de petits ports au pied de falaises et dont les maisons accrochées aux murailles de roches sont accessibles par des escaliers. Si on veut tout visiter, on peut cumuler les marches par milliers. J'en suis sortie les mollets usés.
J'ai cherché loin la rumeur de la mer, les eaux mouvantes et les ruelles escaliers, oubliant qu'à 40 km de chez moi, j'ai la même chose !
Et dans la nuit douce de Cerbère, je grimpe et je compte, car je ne peux voir un escalier sans en compter les marches.
Il n'y a personne à cette heure de la nuit, que les lumières blondes, les trous d'ombre, les arbres qui pleurent leurs feuilles, et mes pas. Un rare passant regarde avec curiosité cette femme qui mitraille les escaliers de son objectif.
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La nuit sur Cebère |
Les façades sont belles, les noms de rues sont souvent hommage à des personnages fusillés pendant une guerre, l'impasse Boileau presque accolée à la plage est elle le fruit du hasard ou d'une ironie subtile ?
Des cris perçants trouent la nuit ; un couple qui se dispute ou un film télé ?
J'adore l'atmosphère des villages lorsque la vie a déserté les rues et troue les façades de rais de lumière, de dentelles de balcons ou de petites indiscrétions.
Des trains glissent en silence sur les rails luisants, des jeunes font vibrer un étroit trottoir devant une pizzeria, et soudain des cris d'oiseaux trouent la nuit, non loin d'un chat impassible tapi dans l'ombre. Les oiseaux sont devenus fous ? Et j'éclate de rire : un habitant, smartphone en main distille des cris de prédateurs à des pigeons qui n'en ont "rien à cirer". On échange quelques plaisanteries.
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Du haut d'un escalier, la gare, le train, la nuit |
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La gare |
Et je file à l'hôtel...ah, le Belvédère du Rayon Vert...sans rayon vert si ce n'est les rails luisant dans la nuit, sous ses fenêtres. Un hôtel paquebot construit entre 1928 et 1932, style art déco, à l'histoire passionnante, réhabilité aujourd'hui (appartements, spectacles, évènements) , et qui a repris extérieurement le lustre d'antan.
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La "proue" de l'hôtel |
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Façon paquebot |
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On ne peut plus ignorer |
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L'hôtel paquebot |
La structure de cet établissement bercé par la mer qui s'écrase sur les falaises en contrebas a du enchanter tous ceux qui l'ont fréquenté, célébrités et simples voyageurs, même vu de l'extérieur, le charme opère. N'oublions pas, à Cerbère les trains devaient changer d'essieux pour poursuivre leur route vers l'Europe ou l' Espagne; alors l'attente était longue et l'hébergement indispensable. Les heures sombres de la guerre Civile espagnole et de l'Occupation allemande en France ont eu raison de la prospérité de cet hôtel.
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Figure emblématique de Cerbère |
Ensuite, je reviens à mon modeste hôtel sur roues, de loin ma préférence, avec le chant discret de la mer et les ronrons assidus de Nina.
Demain sera un autre jour. Demain, c'est à présent, la mer enfle et grossit lentement sous l'effet du vent. La balade sera aquatique, pieds dans l'eau, embruns sur le visage, soleil dans les yeux et les gifles du "trou souffleur" que je suis allée chercher discrètement, ce n'est pas très licite...
Ce n'est autre, sur un ancien sentier littoral au pied des falaise, qu'une faille étroite dans la roche : la mer puissante s'y engouffre et ressort sous pression avec hauteur, violence, vacarme et beauté. Et originalité.
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Parcours illicite et dangereux |
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Même lieu, même danger : 91 marches d'escalier...chut ...sans chute |
Un dernier clin d'oeil à l'originalité de Cerbère, enfin celle que j'ai pu voir car le village garde des secrets, assurément. Cette originalité se trouve au milieu du long tunnel. Un espace est vide et si on a la curiosité de lever la tête, c'est une immense lune bleue qui accueille le regard. L'ouverture a été cernée d'un mur tout rond sur lequel se penchent des constructions et qu'un drôle d'escalier, interdit, ourle de manière bizarre; à ses pieds se trouvait la station de pompage de la ville et c'était si simple de s'y rendre par voie aérienne, sous ce tunnel ferroviaire !
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Lune de bleu |
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L'étonnant escalier |
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Et encore l'escalier surprenant |
Une dernière originalité ? Gustative, je ne puis m'en empêcher...Allez y c'est au "Restaurant de la Plage", que vous trouverez face à la plage...A consommer sans modération et avec les doigts !
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Sans légende... |
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A bientôt ! |
Toujours autant de plaisir a te lire je m arrête à Portvendres et ne vais pas à la découverte de Cerbère
RépondreSupprimerLa prochaine fois j irai à cette découverte
Bises
Et elle vaut le coup, cette découverte !! Sans oublier les petits poissons frits
SupprimerSuperbe toutes ces belles photos comme toujours bises BB
RépondreSupprimerMerci, c'est la ville qui s'y prête, à ces photos. Bises BB
SupprimerSuperbe toutes ces photos ,comme toujours, bises BB
RépondreSupprimerune ville que j'ai visitée de jour, il y a peu. De jour et en sombre dans le tunnel tagué...
RépondreSupprimerOui j'ai vu sur FB; il y a un long et étroit tunnel adjacent, très tagué que je n'ai pas visité (de jour) faute de temps. Mais je retournerai là bas, j'ai encore des choses à voir
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