Après une période relativement éprouvante, je reprends le chemin de la montagne, sagement, juste pour renouer le contact avec la forêt, l'eau, la terre et le roc. Pas "d'exploit sportif", pas d'escalade, pas de hors sentier, au programme, juste suivre sagement une boucle qui permet de franchir la jolie rivière nommée Rotja, départ et arrivée à Py, un classique.
Secteur du Pas de la Rotja |
Effectivement je me sens sereine et en forme : je connais une partie du trajet sur chaque rive, je connais les environs visités lors de mes précédentes sorties, je sais le décor caché, les anciennes bergeries ou cortals et leurs cabanes, j'ai un regard interne étendu alors que mes pas foulent le chemin très souvent empierré. Tout n'est que lumière balbutiante, oiseaux étonnés, rumeur de torrent et silence ambiant. Une lune bleutée étincelle dans un ciel pur et les sommets se dorent au soleil, assurément la journée sera belle.
Me révèlera t'elle des surprises ? Pourquoi pas ? Un cèpe, peut être mais le sol est si sec...Pour l'heure, je marche d'un bon pas, le paysage est familier, l'automne ne sera pas beau cette année, tout est trop brûlé.
Les premières ruines de Cantapoc ont succédé aux pavés, aux murs solides et aux terrasses plongeant vertigineusement vers le torrent.
A travers la forêt se dévoilent des falaises, la rivière, les lointains familiers ou non, les saignées des affluents et la chevelure sans fin des arbres revêtant des reliefs escarpés.
Les Aiguilles |
Cantapoc et son joli nom dépassé, voilà le ruisseau chantant des Salettes et la remontée abrupte dans une terre noire et riche dont on emplirait son jardin .
Ruisseau de Salettes |
Voici le carrefour de sentiers et la nouveauté pour moi : direction le pas de la Rotja ou passage de la rivière que j'imagine sur une confortable passerelle. J'ai parcouru 3.5 km et pris seulement 300 m de dénivelé.
Je fouille du regard les sous bois, prête à emplir mon sac...rien; seule une armée de jeunes coulemelles (ou lépiotes élevées) emplira mon regard. C'est bon aussi, grillé, à l'huile d'olive.
Bien sûr un nouveau parcours est attrayant, on imagine plein de nouveautés, même dans un paysage si peu ouvert et seules couleurs, lumières, rumeurs de torrents seront au rendez vous, enfin presque !
Car j'espère quelques ruines, pour compléter ma collection.
Et cela ne tarde pas. Voici la Cabane du Roc de Madrona (1309 m , 3.92 km) qui jouxte un cortal à la classique construction. la nouveauté commence là; il est difficile dans l'épaisseur de ces forêts d'imaginer le paysage voilà 100 ans. Dans ce décor mon imagination peine, et peinera longtemps.
Un peu plus loin, 1392 m, en contrebas du sentier, deux ruines de cortals presque voisins sont flanquées d'une cabane nommée de Puxart, toute ruinée. Quelques belles échappées sur un point de vue escarpé permettent de penser qu'autrefois le décor était monumental.
Le secteur se nomme Cobertorat.
Finition ou décoration ? |
Incroyable point de départ ! |
Façade revue et corrigée |
La construction des cortals est aussi intéressante : accolés à des aiguilles ou à des rocs plutôt en boules, le matériau servait toujours de point d'appui : économie et efficacité.
Un solide support |
Et ainsi, mon chemin va être jalonné de ruines, dont quelques particularités peuvent étonner. Celle ci, qu'annonçait un paysage de murettes est adossée à un long rocher bien lisse et la fenêtre recevant le foin est presque appuyée au rocher; ce dernier servait il de plan incliné pour conduire l'herbe au fenil ? Dans ce cas, ce serait un bien ingénieux système !
Rocher ou plan incliné ? Les deux |
Ils ne sont pas tous visibles, ces vestiges du passé, rarement au bord du chemin et même mon oeil exercé ne les devine pas mais pour une fois le GPS sera mon allié, me conduisant de façon sûre à la ruine, dans un parcours sportif ou rocambolesque.
Ainsi, après avoir trouvé une ruine flanquée de terrasses bien nettoyées, un énorme sapin logeant sur le site, d'où on voit le décor de l'autre rive que je connais si bien, je vais à la recherche, en contrebas du sentier du petit carré servant de symbole.
le site vu depuis la rive opposée : très boisé |
...se trouvent mes lieux de prédilection |
Tout ça je connais |
Quelques prairies d'altitude |
J'hésite un peu car il faut vraiment descendre vers la rivière mais la curiosité l'emporte sur l'inquiétante sauvagerie du lieu.
Le secteur des cortals Mitxeu et Pideill vu depuis la rive en face En fond la vallée de la Rotja |
La végétation locale |
De terrasse en terrasse |
J'utilise les sentes animales et soudain je me retrouve à ras bord du toit effondré d'une cabane, petite ruine dont le toit était étayé de contrepoids, une ancienne poulie de débardage du bois y fut réemployée...donc le débardage date...mais la petite flèche rouge me dit "le cortal n'est pas là".
Cabane du cortal Pideill |
Et c'est en faisant quelques acrobaties que je le rencontre. De manière peu classique. Au pied d'un promontoire rocheux, un tas de terre noire évoque les tas d'immondices que rejetaient sur le terrain les habitants. Surprise, je lève les yeux, et accroché au rocher, comme un château fort, se trouve un mur de pierre blonde. J'escalade et me trouve sur un cortal haut perché, quasi inclus dans la falaise, je ne verrai pas l'entrée mais pour m'en extirper, ce sera soit escalade soit désescalade !
Cortal Pideill |
Des rochers partout |
Il est bâti sur une barre rocheuse monumentale, une vraie exception. Je reviens sur le sentier, me promettant de retourner ici et de redescendre (ou essayer) jusqu'à la Rotja : ce sera chaud, mais je veux voir jusqu'où allait la vaillance la ténacité de ces bâtisseurs de terrasses.
Jusqu'au Pas de la Rotja qu'annonce une belle hêtraie et un cours d'eau bondissant, j'aurai rencontré une belle série de bâtiments.
Affluent de la Rotja, ravin de Sola del Pomer |
Le Pas de la Rotja (1500m, 8.8 km) n'a aucune passerelle, c'est les pieds dans l'eau glacée que se franchit le torrent plutôt "maigre". Aux hautes eaux, c'est risqué voire impossible.
Pas de la Rotja : 1500 m |
Glacée, la Rotja |
A présent m'attend un retour que je sais long; ce ne sera pas vraiment fastidieux : un véritable chemin muletier, construit par l'homme, les bûcherons, je pense, va me conduire sur plus de 7 km jusqu'au village. Une succession de déclivités, une alternance de ruisseaux, de sous bois frais de hêtres et de falaises surchauffées à la végétation étique, sans constructions, sans terrasses, sans traces de vie hormis celle des bûcherons. Dans des pentes impressionnantes !
Vallée de la Rotja |
Au zoom |
Quelques rares murets barrant un ravin et enfin après un long, très long retour , les premières ruines font leur apparition.
Une des Aiguilles et sa grimace |
Ruines et sentier |
Le chemin du Mal Sola file vers des ailleurs magnifiques que je connais, et Py, étalé au soleil dans sa robe rouge et blanche m'attend les bras ouverts, car à Py il se trouve toujours un instant de convivialité.
Py dans son décor |
En chiffres
Distance : 15.9 km
Dénivelé cumulé estimé : environ 900 m
Temps de marche et de visites : 5 h 32
La route : 150 km AR
Le trajet |
La balade que je préfère. Au Coberturat , le patis del Gall. La cabane Puxart a sans doute été fréquentée par mes ancêtres maternels. Quand j'y suis allé je pensais avoir retrouvé leur trace. Ce secteur est magnifique. L'automne en fera un palais.
RépondreSupprimerMerci Amedine de raviver leur souvenir
Coucou, Guy, j'étais en voyage vers la mer, oui je réponds tard, hélas cette année l'automne ne fera pas un palais je crois car les arbres ont déjà perdu beaucoup de feuilles, c'est très sec. Pour le palais faudra se déplacer en Vallespir
SupprimerDe l'eau, du vert, des sentiers, deux ou trois ruines sentinelles, quatre champignons, du dénivelé et de la sueur... la vie loin des villes et de ses tourments ! De quoi bien se ressourcer après de laborieuses journées viticoles ! Et Py.... ah Py !! P.D.S.
RépondreSupprimerLe truc c'est que je vais aussi là bas après les bonnes périodes de repos atlantique, mais Py m'en a voulu, les sentiers ont massacré mes Py ...eds
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